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Citations sur Rosa Candida (367)

Rares sont ceux qui prennent le temps de penser à la mort. Et puis il y a ceux qui n'ont pas le temps de mourir. C'est un groupe qui s'accroît.
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Papa ne croit pas aux coïncidences, du moins pas quand il s'agit des événements primordiaux de l'existence, comme la naissance et la mort ; la vie ne s'allume pas ni ne s'éteint comme ça, par hasard, dit-il. Il ne peut pas comprendre que la conception puisse résulter d'une rencontre fortuite, que l'occasion de coucher avec une femme puisse se présenter à l'improviste, pas plus qu'il ne peut comprendre que la mort puisse résulter d'une flaque d'eau ou de gravillons dans un virage...
... Trop de coïncidences, ça n'existe pas, une à la rigueur, mais pas trois ; pas de coïncidences en série, dit-il : l'anniversaire de maman, la date de naissance de sa petite-fille et le jour de la mort de maman, tout ça le même jour du calendrier, le sept août. Pour ma part, je ne comprends pas les calculs de papa : d'après mon expérience, c'est justement quand on se met à escompter quelque chose de précis, que tout autre chose arrive. Je n'ai rien contre la marotte d'un électricien à la retraite à condition que ses calculs n'aient rien à voir avec ma négligence en matière de préservatifs.
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J'ai déjà mis les choses au point et papa doit bien se rendre compte que l'enfant est le fruit d'un instant d'imprudence, et que ma relation avec la mère s'est limitée au quart, que dis-je, au cinquième d'une nuit.
" Ta mère n'aurait pas vu d'objection à les inviter au dernier repas". Chaque fois que papa a besoin de donner du poids à ses paroles, il tire maman de sa tombe pour l'appeler en renfort.
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-"Ta mère mettait toujours de la ciboulette avec l'églefin", dit papa, tandis que je lui prends les ciseaux des mains et m'étire pour atteindre dans le coin de la serre la touffe toujours verte dont je lui tends une poignée. C'est moi le seul héritier de la serre de maman, comme papa me le rappelle régulièrement. Ce n'est pas qu'il s'agisse d'une culture de grande envergure comme trois cent cinquante pieds de tomate et cinquante plants de concombre qui se transmettraient de mère en fils ; il ne s'agit en fait que de roses qui poussent toutes seules, sans qu'on ait besoin de s'en occuper spécialement, et peut-être de la dizaine de plants de tomate qui restent. Papa se chargera d'arroser en mon absence.
"Je n'ai jamais été porté sur les légumes, mon petit Lobbi, c'était le dada de ta mère. Moi je pourrais tout au plus manger une tomate par semaine. A ton avis, à la récolte, ça va donner combien de fruits par plant ?
- Tâche de les donner, alors.
- Je ne peux tout de même pas frapper à tout bout de champ chez les voisins avec mes tomates.
- Et Bogga ?
Je dis cela tout en me doutant bien que la vieille amie de maman doit avoir les même goûts que papa.
"Tu ne veux tout de même pas que j'aille toutes les semaines rendre visite à Bogga avec trois kilos de tomates. Elle insisterait pour que je reste à dîner.
Je pressens aussitôt ce qu'il va dire ensuite.
"J'aurais voulu inviter la demoiselle et l'enfant, poursuit-il, mais va savoir si tu n'y serais pas opposé.
- Oui, j'y suis opposé. La demoiselle, comme tu dis, et moi, on n'est pas un couple et on ne l'a jamais été, même si on a un enfant ensemble. Ca a été un accident".
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« Nous allons avoir un enfant ensemble l’été prochain. »
Ça m’a vraiment fait un coup et il ne m’est rien venu à l’idée que d’appeler le garçon et de commander un verre de lait. Elle a pris un chocolat chaud. J’ai considéré un moment les miettes sur la table qui n’avait pas été essuyée après le départ du client précédent.
« Tu as l’habitude de boire du lait ? demande-t-elle.
— Non, pas vraiment. »
Elle rit. Je ris aussi. Je suis content qu’elle rie. Maintenant, quand j’essaie de me remémorer tout ça, je me souviens surtout de son profil tandis qu’elle remue la boisson chaude dans sa tasse. Nous nous sommes tus un moment, elle buvant son chocolat et moi mon verre de lait. J’avais du mal à imaginer un enfant dans ma vie.
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Une fois assis, je vois la femme apporter du jus de fruit, du café et du lait bouilli et elle me demande si je ne voudrais pas une tasse de chocolat chaud après le café.
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Nous nous levons tous les deux et je suis debout juste
devant la glace, je prends Anna par le bras et l’attire
doucement jusqu’à ce qu’elle m’ait rejoint dans le miroir
comme sur une photo de famille prise en studio et mise
dans un cadre sculpté et doré, comme si nous étions en
train de confirmer solennellement une union de quarante
jours. Je suis pâle et maigre, elle est pâle elle aussi.
Derrière nous se dresse dans son lit à barreaux notre petite
fille qui vient de se réveiller avec un grand sourire, les
joues roses et des fossettes aux coudes. Toute la famille est
alors réunie dans le cadre.
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Quand c’est fini, je me sens comme si on n’avait pas fini
du tout ; il n’y a pas encore de séparation nette entre son
corps et le mien. Pendant quelques minutes de plus, nos
souffles sont synchrones.
Durant les dix minutes qui suivent, il me semble
impossible d’être plus proche d’un autre être humain et je
trouve incroyable d’avoir si intimement accès à une femme,
qu’elle soit en moi et moi en elle. Je l’aime démesurément
et je trouve que cela ne change rien que nous ayons un
enfant ensemble ; elle est nouvelle et autre. La serre s’est
engloutie dans la nuit des temps, je ne serais pas surpris si,
victime de vandalisme, elle avait été réduite en miettes. Je
ne crois d’ailleurs pas si bien dire ; papa répond de façon
évasive quand je lui demande où en est la croissance des
tomates. Je la touche tout entière, aussi pour me
convaincre qu’elle est toute avec moi. Après, je me lève
pour aller boire un verre d’eau à l’évier de la cuisine. Le
ciel est étrangement exalté et la lune joue à cache-cache
avec les nuages. Je vois le vieux bonhomme d’en face, qui
ne dort pas, debout près de la fenêtre, regardant dehors.
En retournant au lit, je caresse le dos d’Anna et elle se
retourne sans se réveiller. Elle est toute mince. Je caresse
sa taille, qui émerge du drap de quelques centimètres.
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Elle porte une robe et c’est la première fois que je vois
Anna ainsi vêtue. Notre fille arbore aussi sa robe jaune à
fleurs, ses chaussures du dimanche et son bavoir. Elles ont
toutes les deux des barrettes dans les cheveux et sont
parées comme si elles célébraient quelque chose ensemble.
Il me vient à l’esprit que ce pourrait être l’anniversaire
d’Anna, que je ne sais pratiquement rien d’elle, que je ne
connais même pas la date de naissance de la mère de mon
enfant.
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Je ne pensais à rien de particulier quand il me vient une
idée saugrenue, comme un chat qui s’allonge, les pattes à
coussinets roses en l’air, pour se faire caresser le ventre.
Tout à coup il me semble pouvoir envisager d’être un
homme marié et même marié à l’église et que ce peut être
un sort enviable que d’enlacer toute sa vie la même femme,
pas forcément pour faire quoi que ce soit, mais simplement
pour être dans la même chambre. Je serais tout disposé à
donner son bain à la petite, à lui mettre sa couche et je lui
aurais mis son pyjama quand elle rentrerait du laboratoire,
et puis je passerais de l’huile d’amande douce sur les joues
roses de l’enfant pour qu’en l’embrassant, ma femme sente
le parfum d’amande de notre fille. Et puis l’un ou l’autre de
nous deux suivrait le cercueil de l’autre. Sauf, bien
entendu, au cas où nous trouverions la mort au même
instant, comme le couple sur la route de campagne ; il y
aurait de la pluie et de la buée sur le pare-brise et j’allais
justement mettre le chauffage à fond quand, au même
moment un camion a tourné pour s’engager sur la route
nationale.
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