Imaginez-vous être dans votre chambre la nuit. Déshydraté, vous sortez pour vous servir un verre d'eau. Une atmosphère oppressante vous entoure, au fur et à mesure de vos pas. Des bruits de chaînes. Vous allumez la lumière, et vous la voyez. Katherine van Wyler, la sorcière de Black Spring. Yeux et bouches cousus, elle est là. Elle ne bouge pas… et elle ne bougera pas. Vous passerez la nuit sans aucun danger, mais avec une sorcière vieille de quatre siècles dans votre cuisine. Voici
Hex de
Thomas Olde Heuvelt, un roman qui m'a fait frissonner !
¤ Je ne pensais pas pouvoir avoir peur en lisant
Je n'ai jamais ouvert un livre d'horreur. le genre ne m'avait jamais réellement tenté. On ne m'a jamais raconté une histoire au coin du feu. Écouter et avoir peur n'était qu'un truc pour enfant. Comment des mots sur du papier pouvaient-ils m'effrayer ? En voyant l'e-book dans ma bibliothèque numérique, le résumé d'
Hex me tenta bien, d'autant plus que livre semblait avoir été validé par
Stephen King, j'ai de suite pensé que c'était là une bonne opération. Je dois dire que la surprise fut bonne. Peut-être que le mot « peut » est légèrement poussé, mais
Hex m'a réellement fait frissonner avant tout par l'ambiance que le néerlandais
Thomas Olde Heuvelt a placée. L'immersion était prioritaire, d'autant plus que c'était un format e-book. Chaque soir, plongé dans le noir et dans le silence, je défilais les pages. Et plus j'avançais dans l'histoire, plus je défilais. Jusqu'à la dernière page.
¤ Black Spring et Katherine
Hex prend son nom de l'agence chargée de surveiller Katherine. Katherine van Wyler est une femme néerlandaise arrivée durant le XVIIe siècle au Nouveau Monde. La vieille femme fut accusée de sorcellerie quand les villageois de New Beeck ont vu son fils mort courir dans les rues de la ville. Depuis, elle hante les rues de la rebaptisée Black Spring, entrant à sa guise chez les gens. Katherine n'est jamais sorti de Black Spring, et quiconque entre dans Black Spring n'en ressort jamais.
Thomas Olde Heuvelt dans
Hex nous raconte alors la vie de ces villageois et de leur charmante compagnie. Les traumatisés Holst, la famille Grant, les membres de l'agence
Hex ou encore les nouveaux venus Delarosa et les voisins
Vandermeer. Une galerie de portraits superbement bien dressés qui chapitre après chapitre nous racontent leurs péripéties. Au centre d'entre elles, bien évidemment Katherine. Black Spring se fiche des lois internationales, seul compte le Décret d'exception afin de vivre en harmonie avec Katherine et ne pas reproduire les erreurs du passé. Parmi les mesures prises, l'interdiction de s'en approcher… Ses yeux et sa bouche cousus ne le sont pas pour rien. Et c'est sous cet aspect que Katherine est effrayante.
Thomas Olde Heuvelt nous effraie par l'ambiance qu'il crée dans
Hex. Dès que Katherine était présente, je ressentais aussitôt une oppression et une angoisse. Tout comme les habitants de Black Spring qui vivent depuis des années, parfois depuis leur naissance avec Katherine mais ne s'y sont toujours pas habitués. Derrière des profils quelque peu étranges, c'est tout un village auquel on s'attache.
¤ Des jeunes et leur soif de liberté à Black Spring
Si Black Spring vit avec ce fardeau depuis des siècles, que se passe-t-il pour qu'une histoire nous soit contée ? C'est un peu comme mai 68 finalement. Les jeunes adolescents de Black Spring n'en peuvent plus de vivre avec ce qui les prive de leur liberté. Katherine ? L'
Hex ? En tout cas, toutes ces lois liberticides qui les empêchent de publier et de diffuser ce qu'ils veulent, de voir les gens qu'ils aiment, de partir découvrir le monde. le projet OLY est monté… Il contrevient à beaucoup de lois du Décret d'exception il faut se le dire. Alors même que les parents de ces jeunes pour la plupart siègent au Conseil et que chacun sait ce qu'il risque.
¤ Une violence terrible(ment) clichée ?
Hex est un concept qui utilise des ingrédients pour la plupart basiques mais qui se marient très bien entre eux pour nous livrer une histoire dans un cadre atypique… quelque peu typique. Par là, j'entends le recours à de vieilles légendes dignes du passé toujours omniprésentes dans l'esprit des populations présentes. À cela s'ajoute l'esprit « village » où tout le monde se connait, une unité urbaine plutôt petite avec des forêts aux alentours. Une Église et des croyants – même s'ils ne le sont pas tous. Et des lois… originales pour notre époque. Ce village confiné est un monde dans un monde, l'irréalisme de la chose est contrebalancé par le fait que le contact avec le monde existe bien. Black Spring est dans un dôme, mais dôme ouvert et filtré. Des bases solides qui produisent une histoire qui reste pour moi originale et superbe. Une histoire tout de même violente, et tristement violente. Il y a des scènes qui ont été marquantes, même je dirais déchirante. D'autres pour lesquelles je ne pensais pas que ça allait se produire, ou même imaginer que l'on puisse écrire cela. La violence contre les enfants est généralement évitée dans les oeuvres visuelles, je ne m'attendais pas à ce que
Hex y recourt autant je l'avoue. Outre la violence physique, il y a beaucoup de violence psychologique, autant pour les personnages que pour nous. C'est assez malsain mais c'est ce qui fait le charme de l'histoire de
Thomas Olde Heuvelt.
¤ Une histoire intelligente
Thomas Olde Heuvelt ne s'est pas contenté de l'horreur dans
Hex. Oh bien que non. L'histoire d'après lui a été remaniée pour la version anglaise – celle que j'ai lue – il a notamment transformé la fin. Une fin véritablement intelligente qui nous impose la réflexion. Ce que je trouve puissant, c'est tout de même le gouffre qui s'impose à nous entre notre position au début de l'histoire et à la fin. Je le dis à demi-mots pour ne spoiler les futurs lecteurs et ceux qui l'ont déjà lu sauront sans doute de quoi je parle. Mais finalement, nous sommes un peu les sujets d'expérience au même que les habitants de Black Spring, notre vision des choses est semblable étant donné que nous n'avons pas été maître des mots. Quant à la toute fin d'
Hex, comme à mon habitude, cette fin en demi-teinte m'embête car elle amène bien trop de mystères auxquels nous n'aurons jamais les réponses.
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