C'est ça le truc avec Dara et moi : nous sommes à la fois pareilles et différentes. Comme le soleil et la lune, ou plutôt comme une étoile de mer et une étoile dans le ciel. Elles ont un lien de parenté, bien sûr, et en même temps elles appartiennent à deux mondes distincts. De nous deux, Dara est toujours celle qui brille.
La vie ressemble à peu près à ça d’ailleurs : un pull informe plein de trous, de nœuds et de fils qui risquent de s’accrocher. Inconfortable et qui gratte. Un cadeau que vous n’avez jamais demandé, jamais désiré, jamais choisi. Un cadeau que vous devriez être impatient de revêtir, jour après jour, alors même que vous préféreriez rester au lit sans rien faire.
J’avais ressenti la même chose qu’elle, une terreur pure, violente, celle de la nuit permanente qui adviendrait si la lune interrompait soudain sa course, si l’équilibre des forces n’était jamais rétabli.
Vous voyez, déjà à l’époque, je savais. Il n’y avait pas de truc. Ce n’était pas un tour. Parfois le jour et la nuit s’inversent. Parfois ce qui doit se lever se couche et vice versa. L’amour se transforme en haine, les choses sur lesquelles vous vous appuyez se dérobent sous vos pieds et vous vous retrouvez à pédaler dans le vide.
Parfois, les gens cessent de vous aimer. Ce genre de nuit-là ne disparaît pas, peu importe le nombre de lunes qui se lèvent à nouveau et emplissent le ciel d’un vague ersatz de lumière.
C’est ça le truc avec Dara et moi : nous sommes à la fois pareilles et différentes. Comme le soleil et la lune, ou plutôt comme une étoile de mer et une étoile dans le ciel. Elles ont un lien de parenté, bien sûr, et en même temps elles appartiennent à deux mondes distincts. De nous deux, Dara est toujours celle qui brille.
Plusieurs paires d’yeux se braquent sur moi. Autrefois, j’aurais apprécié d’être le point de mire, ça m’aurait fait plaisir. Ce soir, je me sens nerveuse, jaugée, exactement comme lors d’un examen médical.
La bière n’a pas son effet habituel. Au lieu d’éprouver ce mélange de chaleur, de détente et d’insouciance, j’ai juste mal au cœur.
La vie, c'est atterrir à un autre endroit que celui prévu et décider de s'en contenter.
Je ne sais pas ce qui est le pire : être chez moi et que tout me paraisse différent, ou être chez moi et que tout me paraisse identique.
Il y a beaucoup de mots, ou expressions, que l’on aimerait ne jamais entendre dans la bouche de son père. Lavement. Orgasme. Déception.
Le truc étrange, quand vous avez réchappé à la mort, c'est que tout le monde s'attend, ensuite, à ce que vous nagiez dans le bonheur, que vous preniez le temps de chasser les papillons dans les herbes hautes des prés, ou d'admirer les arcs-en-ciel qui se forment dans les flaques de cambouis sur l'autoroute. "C'est un miracle", dira-t-on avec un regard dégoulinant d'espoir, comme si vous veniez de recevoir un bon gros cadeau et que nous n'aviez pas intérêt à décevoir mamie au moment d'ouvrir le paquet, à faire une grimace en découvrant le pull informe qu'il contient.
La vie ressemble à peu près à ça, d'ailleurs : un pull informe plein de trous, de noeuds et de fils qui risquent de s'accrocher. Inconfortable et qui gratte. Un cadeau que vous n'avez jamais demandé, jamais désiré jamais choisi. Un cadeau que vous devriez être impatient de revêtir, jour après jour, alors même que vous préfériez rester au lit sans rien faire.
La vérité est tout autre : il ne faut aucun talent particulier pour réchapper à la mort. Ou à la vie.