Un grand merci à Babelio et aux éditions Slatkine& Cie, pour ce « roman biographique » qui m'a laissé avec le sourire, alors que l'histoire en elle-même pourrait être triste. Ce n'est pas seulement le style de l'auteure, mais aussi et surtout son état d'esprit qui rendent cette lecture agréable.
Après un début dans la vie plutôt difficile, et quelques galères au moment de débuter en France, l'auteure, née au Burkina Fasso, est maintenant connue dans le domaine artistique comme animatrice de radio (émission « Par Jupiter » sur France-Inter), et comme comédienne humoriste. Je vous recommande quelques vidéos de ses interventions sur France-Inter, sur son site https://roukiataouedraogo.com/. On retrouve dans ses chroniques beaucoup de thèmes de son roman.
Alors, le roman ?
C'est une histoire assez simple : une petite fille, née dans le village de Fada N'Gourma, devrait avoir une enfance tranquille auprès de ses parents et de ses frères et soeurs. Mais voilà qu'un jour, sans que rien ne puisse le laisser prévoir, le père, modeste fonctionnaire, est accusé de détournement de fonds et emprisonné.
Alors la mère prend en mains la destinée de la famille : en se mettant à fabriquer et à vendre des galettes (qui fournissent un titre au livre), elle assure le quotidien, la nourriture de tous, l'éducation des enfants, tout en se démenant dans une société patriarcale pour faire innocenter et libérer son mari.
Celui-ci, très attaché à son image de dignité, se réfugie dans le silence, et semble se résigner à son sort. C'est donc la mère qui effectue toutes les démarches, et parfois en cachette !
Tout au long de ces pages, on sent que l'auteure rend un hommage appuyé à sa mère, qui non seulement s'occupe d'elle du point de vue matériel, mais aussi lui prodigue son amour et lui « montre la route » pour sa vie future.
Dans un style toujours clair et agréable,
Roukiata Ouedraogo décrit la vie du village, avec des moments d'humour comme le « match des Mamans », des moments moins gais aussi, mais toujours avec bienveillance et empathie.
Ces épisodes de l'enfance sont « croisés » avec d'autres moments vécus à Paris, où elle participe à une grande manifestation de la Francophonie. L'occasion pour la jeune africaine de se moquer gentiment de la vie mondaine des élites françaises, de l'accueil un peu protecteur qui lui est réservé, et des expressions « recherchées » qui lui sont incompréhensibles. J'ai bien aimé la scène où tous les participants doivent être réunis sur une photo avec le Président de la République, et où au dernier moment, les invités se livrent à une bousculade feutrée pour se placer au plus près du centre de la photo…
Le ton bienveillant et souriant n'empêche pas que certains problèmes graves soient abordés : l'isolement des villages et la difficulté des transports dans le pays, les abus de pouvoir des petits fonctionnaires, et aussi la condition des femmes, avec le terrible souvenir de l'excision de la petite fille.
Voilà donc une lecture que je recommande, et qui, à travers les souvenirs et les impressions d'une petite fille et d'une femme africaine, nous donne avec le sourire une leçon de sagesse.