A Kerlé, sur les côtes bretonnes, vit Anka, la vingtaine, une passion bien ancrée pour la mer et la pêche dont elle aurait aimé faire son métier. Face au refus de ses parents et aux traditions bien ancrées dans un village où tous se connaissent, elle a ravalé ses rêves et travaille dans le salon de coiffure de sa marraine. Vladimir, son père marin-pêcheur, disparaît un jour en mer. Seul son bateau, le
Baïkonour, est retrouvé. de son côté, Marcus, originaire du Sud, est grutier. Il a accepté une mission de presque 2 ans à Kerlé. Il aime les grands espaces et la hauteur que lui offre son travail. de là, il peut observer les habitants déambuler. Il va alors remarquer Anka, qui se détache des autres, et vouer pour elle une passion décalée. Jusqu'au jour où il chute de sa grue et plonge dans l'éther du coma. Conjuguant deux absences, Anka et Marcus se trouveront-ils ?
«
Baïkonour » est le deuxième roman d'Odile d'Oultremont. Il s'agit là d'une oeuvre poignante, bouleversante à l'extrême, tant au niveau de la forme que du contenu de l'intrigue.
Le style de l'auteure est soigné, travaillé ; ciselé à l'extrême, il rend le diamant brut des situations, l'étincelant derrière le sombre des existences. Dans le silence tendu entre deux points, deux phrases, une poétique des drames affleure, la musicalité des émotions se fait entendre.
Car il y a bien à dire au-delà des mots tus et l'auteure n'a pas son pareil pour rendre les tiraillements, ambivalences des personnages. Leur psychologie est bien fouillée, les mots savent retisser le fil de leurs émotions à fleur de peau.
Les deux protagonistes, Anka et Marcus, sont attachants dans leurs failles, chacun seul dans l'extrême de sa passion. Et puis une rupture, un vacillement vont les amener au point de rencontre improbable. Pour Anka, il est question d'un deuil à apprivoiser, d'une voie à trouver, sa voix de femme dans un monde d'hommes, misogynes, ou tout du moins repliés sur leurs traditions. Tant pour Anka que Marcus, il s'agit d'embrasser le monde dans l'orbe vaste de l'horizontal marin ou bien vertical aérien ; le point de vue reste extrême, le risque constant, qui permet d'advenir à la vie.
D'aucuns pourraient trouver «
Baïkonour » mièvre, voire rocambolesque. Il m'a plutôt semblé poignant, bouleversant, cette quête vers soi autorisant la rencontre de l'autre, la jonction de deux solitudes complices. C'est une belle histoire de résilience qui voit renaître des pousses du champ brûlé des drames de l'existence.