Séléna aurait aimé, de temps en temps, être plus égoïste et insubordonnée, capable de caprices, de colères et de scandales. A cet instant, elle aurait rêvé laisser tout le monde en plan dans le salon et monter dans sa chambre, ou mieux encore demander l'asile politique à Vérane et à ses parents (pas toujours très marrants, heureusement les parents sont plus cools avec les enfants des autres qu'avec les leurs.) Mais elle resta sagement assise.
Pendant que madame Pekar et ses parents parlaient (solfège, composition, concert...), elle pensa aux cerfs-volants : elle remplit son esprit de formes multicolores dans un ciel bleu
Le repas reprit. Ses parents ne pouvaient s'empêcher de manifester une certaine fierté concernant leurs talents de comédiens. Séléna n'avait qu'un mot à l'esprit : ridicule. Mais elle était touchée de voir leur complicité enfantine. Ça lui faisait chaud au cœur. Au moins partageait-ils la même folie. C'est peut-être ça l'amour.
Il y avait les cours, tout ce qu’il fallait apprendre, et la vie entre les cours et tout ce qu’il fallait apprendre sur les relations humaines.
Il lui semblait grandir par le fait même de se poser des questions sur ce que c'était grandir.
Elle sortit. Le froid se plaqua sur son visage, piqua ses yeux et fit naître des larmes. Elle sortit un mouchoir et essuya ses yeux. Elle mit sa capuche, baissa son bonnet sur son front et elle prit la direction de la gare. Il y avait du vent, il devait faire moins de zéro degré, mais elle était heureuse d'avancer.