- Comment voyez-vous ce monde d'après ?
- Un monde où l'"homo economicus" deviendrait l'"homo vinculus" et "solidarius", l'homme relié et solidaire. Cette crise a entraîné la précarisation d'une bonne partie de l'humanité, il faut pouvoir vivre une plus grande solidarité. Préparer l'après, c'est aussi faire droit au développement durable, en pensant au Iow tech (technologies simples, peu onéreuses et facilement réparables, ndlr), à utiliser l'énergie de façon plus économe, etc. Et c'est apprendre à vivre un dégagement.
- Un dégagement, c'est-à-dire ?
- La fondatrice des religieuses de l'Assomption, Marie-Eugénie de Jésus (1817-1898), utilisait l'expression de « dégagement joyeux >>, qui me parle beaucoup. Le dégagement s'apparente au détachement, mais il ajoute quelque chose de plus dynamique. Ce n'est pas agir à la force du poignet, mais se laisser dégager de ce qui nous entrave, de ce qui nous aliène, pour devenir plus vivants. Ce dégagement est fait pour la joie, un trait qui m'a toujours attirée chez les sœurs de l'Assomption(...). C'est un dégagement qui n'est pas désengagement du monde : notre charisme est de "travailler à la transformation de la société par l'éducation."
(Conversation avec Cécile Renouard)
Pourtant, nos esprits se tournent aujourd'hui vers le monde de demain. Ce monde que nous pouvons inventer et bâtir. La crise sanitaire a rebattu de nombreuses cartes et laisse un champ libre pour de grands changements. Dans nos attitudes de consommation, notre relation à l'autre, notre conception de la vie. Or les grands changements ne se font pas par la force des choses. Ils sont mis en oeuvre par la force de nos décisions et de nos volontés. Pour changer, il faut le décider. Et c'est en cela que nous voyons que notre plus grande liberté s'épanouit dans notre liberté intérieure. Pour changer le monde, il faut changer soi-même et s'ajuster à la vie.
(Anne-Dauphine Julliand)
Cesser de courir du bout d'une heure à l'autre
être sensible à tout mais ne pas en faire la liste
aimer ceux qui ne sont pas sur nos listes officielles
(…)
Courir en désordre jusqu'à la fontaine
résolument illisible sauf à la joie
de vivre
(…)
N'endosser pour l'heure aucune cause aucun combat
ne rien exclure
et se dire enfin des choses sans importance
(Marie-Laure Choplin, Sortir pour rien)
Demain peut-être le premier étranger qui passe
pour les siens empêchés de l'aimer de près
je lui donnerai de mes mains de mes mots
et ce seront les miens
(Marie-Laure Choplin, Il n'est pas trop tard)