AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations sur Les incertitudes du langage (6)

Il y a des cas où l'on a affaire à des gens tellement inquiets que toute la clarté du monde n'y fait rien. (p.17)
Commenter  J’apprécie          70
Le cahier de doléances des habitants de Caillan (Languedoc) en 1789, demande que tous les français soient anoblis.
Commenter  J’apprécie          60
- Mais non, mais pas du tout. Dans ce temps-là on pouvait devenir rentier très jeune. Ce n’était pas une exception. Mon grand père de Nîmes était un petit épicier, près de l’église Saint-Perpétue. A vingt-neuf ans, il trouva qu’il avait assez travaillé. Il se retira de son épicerie et passa le reste de sa vie à jouer aux boules, avec ses voisins de mazet. Dans la famille, il faut avouer qu’on le jugea un peu sévèrement. Il eut plus tard des périodes de gêne, et même de grande gêne. On ne manqua pas de dire à mon grand-père que c’était par sa faute. Mais pour rien au monde, il ne voulut se remettre à travailler. Somme toute, il vécut très heureux jusqu’à quatre-vingt-quatre ans. Il n’avait guère travaillé que dix ans dans toute sa vie. On n’avait pas encore inventé les machines dans ce temps-là.
- Mais les machines…
- Oui, évidemment, les machines semblent avoir été inventées pour nous éviter les fatigues, mais tous les travailleurs travaillent beaucoup plus depuis qu’ils s’en servent. Cela se voit tous les jours : chez moi, on a acheté une petite machine à laver il y a un an. Depuis, on passe son temps à la faire marcher. Il arrive, qu’elle tremble, elle s’emballe, il faut la surveiller de près.
Commenter  J’apprécie          10
Nous ne pouvons guère entendre invoquer la liberté (et tout aussi bien la tradition, la justice, l'égalité) sans nous demander (avec un peu d'agacement): mais enfin est-ce qu'il y a réfléchi? Est-ce qu'il réalise ce que c'est que la liberté ou la justice? Ou bien est-ce que simplement il sait que c'est une idée qui fait bien, une idée remarquable, que nous nous accordons tous pour révérer. A laquelle nous sommes tous prêts à nous soumettre. Du coup, nous cessons de communiquer avec lui. Il se produit dans notre lecture une sorte de court-circuit à propos de cette phrase: le cliché. De cette phrase qui dès lors nous semble la raison et en tout cas le lieu du court-circuit. De cette phrase qui nous paraît subitement privée de sens, fait de purs mots sans signification - puisque nous ne savons justement quel sens leur attribuer. C'est n'est pas l'auteur, c'est le "lecteur" de lieux communs qui se trouve brusquement tout accablé de mots et de phrases creuses. Seulement il arrive en de tels cas que tout naturellement nous projetons notre embarras sur la personne, ou l'objet qui l'a causé. C'est ainsi que le marbre nous paraît froid; et la couverture de laine nous paraît chaude. Et l'auteur de lieux communs empêtré de langage. Mais c'est nous seuls qui le sommes.

- Bref, vous voyez une illusion de projection à la base des doctrines littéraires de Gourmont ou de Schwob.

- Oui. Comme à la base de toute illusion des grands mots; de toute illusion de verbalisme. Remarquez encore qu'il s'agit d'une projection inversée. Le lecteur hésite entre deux sens possibles et finalement s'accroche au mot défectueux qui permet ces deux sens. Il ne voit plus que ce mot. Il lui semble que ce mot est la cause de tout le mal. Pourtant, ce qu'il reproche à l'auteur c'est d'être parti de ce mot, de s'être laissé guider par lui. Il le voit à l'envers. je ne crois pas exagéré de dire que nous voyons la littérature à l'envers. Passe encore pour le simple lecteur, vous et moi. Quand c'est la critique littéraire, quand ce sont tous les critiques à la fois, cela devient beaucoup plus grave.
Commenter  J’apprécie          10
Connaissez-vous l'histoire de Mina?
- Je ne me la rappelle pas.
- Eh bien, cette Mina est une fille de roi. Et bien entendu, mal élevée comme toutes les filles de roi. On lui donne tout ce qu'elle veut. De sorte qu'elle n'a jamais le temps d'être malheureuse. Ni, bien entendu, d'être heureuse. Mais un jour, à travers les grilles, elle voit une paysanne qui rit avec son amoureux. Bien surprise. Le lendemain, la même paysanne qui pleure: son amoureux lui a fait un vilain tour. Et Mina, plus surprise encore. La voilà qui saute la grille, et s'en va dans le monde. Elle observe, elle prend des notes, elle arrive à savoir à peu près quand il faut pleurer, et quand il faut rire. Mais elle s'y est prise trop tard, elle ne le sais jamais si bien qu'elle ne se trompe parfois et ne rie quand il faudrait pleurer. Ça lui fait une vie difficile.
Commenter  J’apprécie          10
- Mais comment éviter, sitôt précisément qu’on veut la regarder de près (la vérité), de la perdre ?
- On ne l’évite pas. Tout ce que l’on peut attendre, c’est qu’en poussant l’enquête assez loin, assez patiemment, elle se reformera en nous sans même que nous en ayons conscience. Si un peu de réflexion nous écarte de la merveille, beaucoup de réflexion nous y ramène : la reconstitue en nous, lui fait son lit. Pour le reste, je suppose que la seule solution est de la garder en nous, sans trop y songer, bien entendu sans la dire. Comme une sorte de secret. Imaginez quelqu’un qui saurait l’avenir. Il voit autour de lui les hommes qui s’agitent, qui bavardent, qui font des projets. Et lui prend part aux projets, aux causeries, à l’agitation. Mais en même temps il sait à quoi s’en tenir : quels sont ceux des projets qui aboutiront, ceux des hommes qui ressembleront à leurs propos; dans quel abîme d’insignifiance et d’oubli vont se précipiter les amours, les décisions, les rêves, les ordres. Et bien, nous sommes tous cet homme-là. Nous en savons même bien plus que lui. Nous n’avons même pas besoin de savoir ce qui arrivera. Nous savons ce qui existe, et qui est quelque chose de beaucoup plus fantastique et merveilleux que tout ce qui peut arriver encore. Ou plutôt nous savons que tout ce qui arrivera n’est qu’une autre forme, un autre accident de cette terrible réalité. C’est mieux que si nous le savions par avance. Nous savons comment nous le comprendrons. Nous savons dès maintenant ce que ce sera pour nous.
Commenter  J’apprécie          00




    Lecteurs (20) Voir plus



    Quiz Voir plus

    Retrouvez le bon adjectif dans le titre - (5 - essais )

    Roland Barthes : "Fragments d'un discours **** "

    amoureux
    positiviste
    philosophique

    20 questions
    849 lecteurs ont répondu
    Thèmes : essai , essai de société , essai philosophique , essai documentCréer un quiz sur ce livre

    {* *}