« L’amour a la vertu de dénuder, non pas deux amants l’un en face de l’autre, mais chacun devant soi- même » ….
Aujourd'hui encore, les passants vont vers la plaine, penchés en avant, le manteau relevé sur la bouche. Ils ne regardent pas autour d'eux, même si le temps est beau. Leur ombre tombe derrière eux, sur la route, et les suit doucement. La colline les suit, avec son horizon régulier. Je connais cet horizon, chacun des petits arbres qui couronnent les crêtes. Je sais ce qu'on voit de sous ses arbres.
(Histoire secrète)
C'est par cette route que passait mon père. Il passait la nuit parce qu'elle était longue et qu'il voulait arriver de bonne heure. Il faisait à pied la colline puis toute la vallée et puis les autres collines, jusqu'au moment où apparaissaient ensemble le soleil en face et lui sur la dernière crête. La route montait vers les nuages qui se brisaient dans le soleil au-dessus des brumes de la plaine. Moi, je les ai vus ces nuages : ils luisaient encore comme de l'or ; mon père, de son temps, dit que quand ils étaient bas et embrasés, ils lui promettaient une bonne journée. Alors, sur les marchés, circulaient des pièces d'or.
(Histoire secrète)
Quand il y avait Ceresa, il y avait toujours de bons moments : on était en maillot dans l’eau, on préparait le goudron, on vidait les barques, et à la belle saison, on goûtait avec le seau de raisin sur la table, sous les arbres. Les filles qui allaient en barque s’arrêtaient pour plaisanter sous l’appentis.
(Le blouson de cuir)
Avant de connaître Nino je ne m'étais jamais aperçu que les enfants avec lesquels je criais et courais sur la route étaient sales et mal raccommodés. Je les enviais même parce qu'ils allaient nu-pieds et que certains savaient poser le talon sur le chaume sans se faire mal. Mes pâles pieds citadins au contraire se recroquevillaient rien qu'à les poser sur les cailloux de la route.
De tout de ce que j'avais appris d'eux, il n'y a que quelques jurons qui intéressèrent Nino. Nino habitait une villa à la sortie du village et avait de nombreuses sœurs plus âgées qui m'intimidaient.
(Premier amour)
Le matin, c'était l'heure la plus belle, parce qu'on pouvait toujours espérer davantage que le soir.
Quand il y avait Ceresa, il y avait toujours de bons moments : on était en maillot dans l’eau, on préparait le goudron, on vidait les barques, et à la belle saison, on goûtait avec le seau de raisin sur la table, sous les arbres. Les filles qui allaient en barque s’arrêtaient pour plaisanter sous l’appentis.