Je ne suis pas vraiment fan des enquêtes criminelles, et je ne savais à peu près rien d'
Anne Perry. Et puis il y a eu cette émission, sur France Culture (un épisode de l'excellent « Sans oser le demander »)..
Je suis restée perplexe : Quoi? Serais-je donc passée sans le savoir, pendant toutes ces années, à côté d'un très grand écrivain ? Et pourtant elle est notre contemporaine, même si elle n' a écrit que des romans policiers « historiques « .
Bref, j'ai plongé.
Pourtant, pour ce premier opus, celui qui met en place le tandem Thomas Pitt/ ( le policier perspicace) et Charlotte Elison (la jeune et jolie Bourgeoise affûtée), dans une intrigue à la Jack l'Eventreur, j'ai été légèrement déçue.
Tout d'abord, je trouve que trop souvent les dialogues sonnent faux, et que l'exposition des sentiments n'est par toujours rendue de façon plausible.Pour ne prendre qu'un exemple je n'imagine pas une seconde que dans la bonne société des années 1880, on puisse sans conséquence traiter sa belle-mère ou sa grand-mère de « vieille hypocrite « (A notre époque, déjà, il me semble, ce serait hautement improbable,
En tout cas je le crois ((Enfin bon, euh….en tout cas je l'espère )).
Mais bon, admettons.
Pour moi, très difficile aussi d'avaler la manière dont nous est relatée une certaine soirée de deuil, après l'annonce du dernier crime de la série: on commande aux domestiques un « repas léger », au cours duquel semble-t-il on ne se dit rien , Après quoi chacun s'en va sangloter tout seul, dans son lit.
Je sais bien / je ne vois que trop bien, qu'
Anne Perry ( l'auteure) veut nous signifier à quel point les Victoriens étaient guindés, corsetés, se voulaient coupés de toute émotion malséante,.
Malgré tout, désolée, moi je n'achète pas. Je trouve que Perry force ici le trait, au-delà du raisonnable.
Il me semble surtout qu'une très grande partie des échanges, en particulier entre Thomas Pitt et Charlotte, n'a pour fonction que de nous apporter des informations sur ce que l'auteure veut nous faire connaître de la société victorienne : la misère et le sordide dans lesquels croupissent les classes défavorisées; les us et coutumes des «pick-pockets », des délinquants, et d"une manière générale de tous ces « Pauvres » , si mystérieux aux yeux des Bourgeois aisés, bref tous ces bas-fonds que Pitt, lui, peut connaître, mais la trop bien élevée Charlotte bien sûr pas du tout.
Un procédé narratif efficace, c'est certain, mais quelque peu artificiel, au bout d'un moment.
Enfin bref, je n'ai pas encore tout à fait terminé le roman, mais à peu près deviné l'identité du criminel, je crois. Et donc, jusqu'à présent, ne suis pas tout à fait convaincue par ce premier tome. Je ne crie pas au chef-d'oeuvre.
Pourtant, il faut bien le reconnaître, un certain charme «austennien » opère : celui des tasses de thé, et des jacasseries de salons ou de bals; des volières de femmes entassées, sous l'oeil sévère d'un Patriarche. le charme (oppressant) de ces grandes maisons victoriennes dans lesquelles le fracas, la laideur du monde, n'entrent que filtrés par les haies de roses, par les lourds rideaux , et par-dessus tout par les convenances.
Tandis que caracole, évidemment, la figure libre, féministe avant l'heure, d'une Charlotte Elinson à l'esprit vif et la langue bien pendue.
Mais le tome 2 est là, à portée de main:
Quelles que soient mes réticences, aucun doute possible: je ne vais pas tarder à repiquer!