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sur 171 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
J'avoue que tout le long de la lecture de ce texte (à l'écriture délicieuse mais au sujet particulièrement éprouvant), je me suis demandé sur quelle terrible catastrophe allait déboucher ce tête-à-tête étouffant entre une mère toxique, tyrannique, violente et sa fille Elsa. La mère vient d'acheter un appartement et l'enfant arrive dans un espace nouveau qu'elle n'a bien sûr pas choisi. Elle va devoir s'adapter à une nouvelle chambre, un nouveau quartier, une nouvelle école. C'est peut-être ce qui caractérise l'enfance : accepter des choses qu'on n'a pas choisies. Difficile d'échapper à l'emprise de l'adulte dont on dépend, difficile de s'opposer, de protester, de dire non. Subir. Subir les lieux. Subir la nourriture. Subir les choix, tous les choix, les bons et les mauvais. Se soumettre. Ne jamais rien dire. Attendre de grandir. Mais échappe-t-on vraiment un jour au poids de la famille et aux traumatismes de l'enfance ? Ici, le regard de l'enfant s'attache à observer les lieux, les choses et le temps qui passe avec beaucoup de minutie, comme si la contemplation du monde, en lui emplissant l'esprit, allait lui permettre d'échapper à sa mère, à ce huis clos insupportable et particulièrement oppressant. Une mère paumée qui s'agrippe à sa fille (physiquement et moralement) pour s'empêcher de couler sans se rendre compte qu'elle l'entraîne elle aussi dans son naufrage. L'écriture à la première personne, sensible et sensuelle, rend parfaitement bien les états d'âme d'une enfant réduite au silence à cause d'une mère abusive et égocentrée, une mère qui chaque jour détruit un peu plus sa fille. Et c'est la façon dont l'enfant perçoit ce quotidien, cette violence sourde, silencieuse et répétée qui nous est racontée à travers son point de vue.
Un texte fort et puissant qui dit toute la violence familiale : une lecture en apnée dont on sort épuisé tandis que les dernières lignes nous mettent à terre. Magnifique !
Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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Les premières lignes du roman de Pauline Peyrade frappent par leur extrême précision, comme si la narratrice, une enfant dont on ne sait rien encore, cherchait à tout scruter pour comprendre l'incompréhensible, à tout nommer pour nommer l'innommable. C'est vraiment ce ton qui frappe d'emblée comme une grande réussite en même temps qu'il met mal à l'aise. Nous sommes donc placés en état d'ultra-vigilance, nous demandant le coeur battant ce qui se passe de si horrible dans cet appartement où vivent la narratrice et sa mère; et quand viendront les scènes qui peuvent tenir lieu de réponse, nous ne comprendrons pas plus que cette petite fille ce qui se passe, et cela en dépit de phrases affutées comme des lames. C'est cet état de sidération de la victime qui est si bien rendu qu'il est partagé par le lecteur.

Au-delà du thème de la maltraitance d'une fille par sa mère, dont la violence bouscule forcément mais n'incite pas à se jeter le coeur léger dans la lecture, ce que je trouve très fort dans ce texte est son écriture parfaitement tenue. Chaque mot est porté au maximum de son expressivité et s'enchaîne comme un chapelet de petites bombes parcimonieusement lâchées, à la précision de tir redoutable.
"Les battements de mon coeur font trembler mes os, ma gorge, mes cuisses, mes poumons sont sur le point d'éclater" (p97) : on sent au coeur de cette phrase (et plus précisément dans le rôle tenu par "mes poumons", fin de l'accumulation ou début de la proposition d'après ?) un glissement imperceptible et souterrain qui la fait bouger au point de la menacer, créant ainsi une zone trouble au plein coeur de la netteté. Les phrases sont à l'image du roman, troué par un abîme que la maîtrise du style n'arrive pas à circonscrire. C'est bouleversant et très beau.
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Pauline Peyrade est arrivée sur la scène littéraire à pas de loup. J'ai peu entendu parler de cet ouvrage et c'est seulement en remarquant le bandeau : Goncourt du premier roman - que je m'y suis penchée. Je ne vais pas vous faire languir, il mérite clairement son prix. Peyrade dans une soirée, c'est l'invité qui se fait toute discrète, que l'on ne remarque pas, mais qui prend toute la place lorsqu'elle prend part à une conversation. C'est celle qui utilise peu de mots comme pour économiser sa salive mais qui les choisis bien. Avec ce court texte, elle n'en dit jamais trop. Elle laisse des zones d'ombres, installe des malaises, comme pour forcer le lecteur à imaginer tout ce qu'elle ne dit pas. Et c'est magistral !

Le sujet est osé, difficile, délicat. Une relation mère-fille nous est conté de la plus étrange des manières. Parce que cette relation, nous le découvrons bien assez tôt, est ultra-toxique. A chaque fois que j'ouvre un livre, je me demande toujours comment je le présenterais (#syndromedelalibraire). Et pour celui-ci je me suis dis : Quel roman ! Je tentais de reprendre ma respiration car clairement, la lecture se fait en apnée. Mais je me suis surtout dit : Il n'est pas à mettre entre toutes les mains. Sincèrement, ça peut vous remuer les trippes si vous avez un certain historique. Et bien que quelque fois je reconnais que la librairie ressemble à un cabinet de psys... je ne me vois pas dire à un client : sinon vous, ça va avec maman ?

Vous êtes prévenu. J'ai envie de vous protéger autant de vous supplier de lire ce livre. Parce qu'arriver dans les rayons avec ce genre de premier roman, c'est sacrément osé. Ca m'a fait penser à Adeline Dieudonné avec La vraie vie ou à Maud Ventura avec Mon mari. C'était des premiers roman et ils ont bousculés les codes. Ils étaient différents. Ils traitaient de sujets où l'on se devait de prendre des pincettes. Mais pas elles, et c'est pour ça qu'elles iront loin.

Je me souviendrais de ce livre. Longtemps. de ces deux parties bien séparées. de l'enfance d'Elsa avec cette mère bancale. de son besoin de faire les choses bien. de ne pas faire de bruits ou de saleté. Très certainement, de son envie de disparaitre pour échapper à ce monstre. Et puis de sa vie d'adulte qu'elle débute avec ses chaussures remplies de cailloux. de cette tension qui monte, de ces mots coincés qu'elles n'a pas pu dire. On sent, on sait, quelque chose va se passer.

Le Goncourt du premier roman 2023 : allez-y les yeux fermés !
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Le livre est divisé en 2 parties : « âge un » et « âge deux » qui correspondent respectivement à l'enfance et à l'âge adulte de la narratrice, Elsa.
Elle raconte sa relation avec sa mère. D'abord ambiguë, on sent que la mère veut être rassurée par sa fille, savoir qu'elle l'aime. La solitude et l'angoisse caractérisent la mère. Puis une relation plus toxique apparaît.
En déménageant, Elsa a également changé d'école. Elle devient amie avec Issa. Mais là aussi la relation est ambiguë. Elsa reproduit un schéma familial hérité de sa mère.
Devenue adulte, l'emprise est toujours présente. Elsa est toujours enfermée dans ce duo malsain, sorte de huis clos perpétuel alors qu'elle a son propre appartement.
J'ai lu cette histoire en apnée. J'avais une boule au ventre ou à la gorge selon les passages. L'écriture s'appuie sur les sens et intensifie le récit de l'enfant. Une lecture angoissante qui ne sera pas pour tout le monde. En tout cas si vous n'avez pas envie de lire de roman sur l'inceste maternel, la violence psychologique et physique intrafamiliale, passez votre chemin. Mais si vous aimez être bousculé par vos lectures, alors ne passez pas à côté de ce premier roman fort, puissant, marquant et remarquablement écrit ! Il a reçu le prix Goncourt du premier roman 2023 mais je trouve qu'il est passé un peu inaperçu.
Lien : https://joellebooks.fr/2024/..
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Elsa et sa mère emménagent dans un nouvel appartement. Ça y est, la mère devient propriétaire. Elsa hérite d'une chambre à la moquette mouchetée de bleu et de blanc, pourvue de deux lits superposés. Chaque détail, objet, odeur, est disséqué par l'écriture au scalpel, sèche et précise, de Pauline Peyrade.
Le huis clos entre une mère toxique et sa fille sous emprise n'est adoucie que par une nouvelle amitié : Issa prend Elsa sous son aile, permet son intégration à l'école, elle dont les pensées se brouillent à chaque question de la maîtresse, à chaque vision de la beauté de son amie. C'est l'âge un, comme un acte I où Elsa voit tout, même s'il vaut mieux regarder les savons sur le rebord de la baignoire plutôt que la réalité, mais ne comprends pas.

L'âge deux commence quinze ans après. Elsa a sa vie, un petit appartement, vient voir sa mère qui envisage de vendre le sien, trie les affaires, met en vente les meubles, incapable d'occuper durablement les lieux. Les affaires de sa fille remplissent des sacs poubelle, sans avoir été triés. Lorsqu'Elsa les ouvre, elle en est incapable. le passé lui revient à coup de barbies et de dessins oubliés.
Partir en vacances ensemble, quelque part où il y aurait la mer, un horizon. Elsa hésite, sa mère insiste. Elsa est coincée dans l'âge de comprendre, l'âge de détruire.

J'ai failli être découragée par cette écriture « plus qu'à l'os », selon les paroles mêmes de l'autrice rencontrée à L'Histoire de l'Oeil. Mais ce récit m'a embarquée d'une traite, en apnée. Avec une précision que j'espère retrouver dans de futurs ouvrages ! En attendant, je vais essayer de découvrir ses pièces de théâtre…
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Un livre choc, très bien écrit qui distille peu à peu la relation toxique d'une mère et de sa fille, de la mère avec la grand-mère. C'est très violent, bouleversant de solitude, de haine, d'emprise. Un livre qui peut mettre très mal à l'aise mais qui ne peut être oublié. Un premier roman impressionnant !
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