Et ils dansaient le dimanche

Cette chanson n'est pourtant pas une valse, encore moins une romance ; c'est une chanson à marcher, à suivre l'espoir, une chanson à s'épauler.
Szonja est fière du garçon stupide qui la talonnait dans le train depuis Budapest.

L'usine à ses oiseaux blessés pour qui on ne trace que des lignes courtes.

Des hommes jeunes, moins jeunes, des mères de famille, la réalité du dehors y reflue avec la peur que la misère encolle les pieds et que tout espoir se brise.

Elle s'en tient juste à ses besoins élémentaires comme tous ceux qui n'ont qu'une vie brute avec juste assez de bonne volonté pour se maintenir sur le fil tendu entre la faim, la soif,!a peur de n'être plus à l'abri, plus aimée de personne, de n'avoir plus d'origine.

Au retour du lavoir, elle hésite sur le seuil de la cuisine. Sa bassine de linge sur la hanche, le froid de l'émail qui remonte jusqu'au sein, un silence épais à franchir entre eux deux. En aura-t-elle la force ?
Szonja regarde cet homme planté au milieu de sa solitude, la tête entre ses bras repliés, une bouteille vide à l'extrémité de la table. Elle voit le corps divisé, les épaules écroulées, et le cercle mauve de son verre sur la nappe brodée par la muette. Elle voit l'homme vaincu [...]
Un tremblement infime suffit à réveiller son homme. Elle hésite, redoute son humeur fétide, les yeux embués de fiel, n'ose pas lui parler. Son regard s'arrête encore sur l'auréole de vin, remonte aux plis sombres de son visage, empâté de mauvais somme.
Une peur nauséeuse la fait reculer d'un pas. Trop tard. C'est ce mouvement qui traverse Jean, émergeant à peine de sa torpeur, cet air dégoûté qu'il découvre soudain sur le visage de sa femme. (pp. 166-167)

Une voiture de la direction roule dans un silence solennel qui masque les soupirs.

La vie court et l’espérance ne traîne pas. Se marier, s’abriter, enfanter, s’enraciner… plutôt ici qu’au pays de Mussolini .

Pour la première fois depuis son arrivée en France, elle a envie de se déplier, de goûter cette simplicité d’exister, de gaspiller son temps sans penser à rien, sans compter les heures qui la séparent du réservoir humain de l’usine.

Gisèle s'en prend au gars vertement." On t'a aussi donné l'ordre de laisser la priorité aux hommes ? ! Le parti ne fera rien sans nous, n'oubliez pas ! Moi, je voulais juste dire au camarade Thorez de ne pas oublier le droit de vote des femmes. Tu lui passeras le mot, hein ? "

La peine qu'on ne dit pas parce que la mIsère est commune, parce que l'on ne peut même pas jalouser son semblable , parce que jamais un bonheur ne surgit plus haut qu'un autre.