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Roman psychédélique et halluciné, « Les Fleurs du karma » narre les fugues respectives de deux jeunes femmes à deux époques différentes. Les années 2000 pour Laïka Orbit et les années 60 pour Kinky Baboosian. Entre elles, un mathématicien complétement barré, voire carrément fou, fait le lien. Insatisfaits, ils fuient tous les trois la société. En quittant le domicile familial, en marquant sa désapprobation par le mutisme et des airs de « Bouddha boudeur », en s'injectant des drogues de toute sorte ou en vouant sa vie aux mathématiques (peut-être pas les plus académiques) tout est bon pour se mettre en orbite, loin d'une repoussante réalité.

Pincio complique un peu les choses avec l'histoire de Laïka Orbit. Un nom qui en dit long : Laïka fait évidemment référence à la première chienne à avoir été envoyé dans l'espace, en orbite autour de la terre plus précisément. Et c'est peu dire que le monde dans lequel évolue ce personnage fait problème (en matière de réalisme) : A Cloaqua Maxima, les industries ne produisent que de la merde, la poussière est partout et sert à contrôler la population, tandis qu'un répondeur spécial « délation » a été mise en place par les autorités. Quelle est cette réalité ? Voilà qui suscite l'intérêt du lecteur dès les premiers chapitres et qui donne un ton très transfictionnel au roman.

Si la réponse apportée à cette question concernant Laïka Orbit (qu'est-ce donc que cette réalité improbable ?) ne convainc pas complétement, le roman réussi parfaitement à captiver le lecteur : Pincio est un superbe narrateur et le personnage du « mathématicien fou » (le personnage qui fait le lien entre les deux femmes) est très attachant, genre personnage « coup de coeur » dont on se souvient longtemps. Peut-être n'est-il pas nécessaire de tout comprendre après tout ? Puisque je vous dis que c'est un roman halluciné… ;-)
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Jusqu'où aller pour se perdre?


L'entrée en matière du livre risque de vous surprendre si vous attendez la fumée des encens et les fleurs dans les cheveux d'entrée de jeu. Nous rencontrons tout d'abord Laïka Orbit, jeune femme perdue dans une ville tout aussi paumée, quelque part dans un état oublié de dieu, un endroit où la poussière surveille vos moindres faits et gestes et où les usines fabriquent de la merde. Littéralement.

Elle s'abime dans la contemplation d'une brèche dans le plafond du motel. Elle a oublié tout ce qui faisait sa vie et son identité. Sa seule certitude: ce monde n'est pas le sien. "La vérité est ailleurs". A ses côtés un vague mathématicien, la tête toujours emplie de calculs et qui parle sans voyelle. du peu qu'on sait, c'est lui qui l'a amenée ici pour fuir une vie qui l'ennuyait mais qui lui manque, maintenant qu'elle ne s'en souvient plus.

Comme disait Tolkien "ceux qui errent ne sont pas toujours perdus". Et pourtant dans les Fleurs du Karma, c'est bien d'errance et de perdition dont on nous parle. Notre attention va finalement se porter sur l'homme et son passé, et surtout sa mère, Kinky Baboosian, qui l'a élevé en pleine communauté hippie, faisant du garçonnet un "petit bouddha boudeur". Si Laïka se perd dans une faille réelle au dessus de sa tête, notre petit être désaprobateur va quant à lui s'enfoncer dans une fissure interne, refusant le chaos de la révolution des fleurs.

Ce roman orchestre une critique de notre société qui nous prend par l'envers. Cet univers "parallèle" qui se montre comme une version dégradée de notre monde d'abord. Ensuite, cet enfant qui grandit au sein d'un mouvement alternatif, mais qui n'aspire qu'à la normalité de la société de consommation. Plus vieux, il se rendra compte que finalement, système et mouvement underground valent bien Charybde et Scylla.

Si la navigation dans ces eaux troubles est bien menée, je regrette tout de même une fin qui me semble trop floue et trop hative, on attend une réconciliation entre ces personnages et leur réalités qui finalement n'arrive pas.
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Après mon enthousiasme pour «Cinacittà, mémoire de mon crime atroce», je tournais autour des fleurs du karma depuis quelques mois, sans oser l'ouvrir, par peur d'être déçue.

“Have you ever had that feeling
when you're not sure if you're awake or still dreaming?
...Don't be afraid.” (*)

Pas besoin d'avoir peur, c'est un très bon trip, dans l'ombre porteuse du grand Philip K. Dick – avec Laïka Orbit, jeune femme perdue dans un monde recouvert de poussière rouge qu'elle ne reconnaît pas, et qui cherche dans ses souvenirs pleins de trous le chemin pour la ramener dans sa réalité - avec Kinky Baboosian, ayant fui la côte Est après l'envol de Laïka en orbite autour de la Terre, comme des milliers de jeunes dans les années 60, en route vers Frisco - avec son fils né en plein été de l'amour à San Francisco, un enfant sans nom et sans numéro de Sécurité sociale, et qui, dans le grand foutoir du Flower Power, s'enfuit dans les nombres, y cherchant des traces de régularité absentes du réel.

L'idéal de fuite ne dure jamais. La poussière du temps et de la paranoïa s'infiltrent partout, et finissent par mener au désenchantement.

« Enfant, j'avais compris que la paranoïa était un atout, une des façons les plus gratifiantes de donner un sens à la vie. Malgré cela, assister à la fin d'une époque a été pénible pour tout le monde. Même pour moi, qui la détestais de tout mon coeur. J'ai vu des choses que vous, contemporains, ne pourriez imaginer. Des agents infiltrés devenir des hippies dans l'âme en tombant amoureux de jeunes filles qui n'attendaient que de se lier avec quelqu'un qui joue double-jeu, vu qu'elles avaient fini par se lasser de cette fable Peace & Love. J'ai vu des adultes, jeunes et moins jeunes, des deux factions, perdre leur propre identité. Des policiers arrêter de croire au respect de la loi et des contestataires signer le registre des salariés du FBI pour le simple plaisir de se trahir eux-mêmes et de trahir leurs amis. J'ai vu les meilleurs esprits de cette génération fuir et se détruire aux acides pour retourner d'où ils étaient partis. J'ai vu le monde tourner. J'ai vu le pas lent et funèbre avec lequel le monde redevient la merde qu'il était auparavant. »

Les fleurs du karma est excellent roman sous substance.

(*) GMS – Arabian night on mescaline
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Il s'agit d'une histoire très particulière… J'ai fini ce roman, offert par les éditions Asphalte, dans le cadre de l'opération Masse Crtitique organisée par Babelio, il y a déjà un petit moment et j'ai encore du mal à me remettre de cette lecture. Rien que pour cela, je ne peux que vous en conseiller la lecture !

Nous suivons plusieurs parcours dans ce roman. Tout d'abord, celui de Laika Orbit, jeune femme complètement perdue, qui essaye de reprendre pied sans y parvenir, qui ne se rappelle ni d'où elle vient, ni de son vrai nom, et qui évolue dans un monde étrange auprès d'un compagnon mystérieux et très particulier.

Nous avons ensuite l'histoire de Kinky Baboosian qui vit dans les années 60. À 16 ans, elle fuit sa famille à l'histoire compliquée et rejoint la communauté hippie, goûte à l'amour libre et aux drogues et élève son fils en dehors du système. Ce dernier, troisième personnage central du roman, cherchera toute sa vie sa place, sans jamais la trouver vraiment, en rationalisant et en calculant tout ce qui l'entoure, manière pour lui de contrer son enfance dissolue.

Les destins de ces trois personnages vont bien entendu être liés autour de cette idée de fuite, ce désir de partir toujours plus loin sans savoir où, sans savoir comment revenir et sans toujours en comprendre les raisons.

Ce roman est extrêmement bien écrit, il s'enchaîne de manière fluide, on passe d'un personnage à un autre sans s'en rendre compte. Il est vraiment très bien construit.

Laika évolue dans un monde hors de la réalité, difficile à situer et à comprendre, et au final, il est nécessaire de lâcher prise nous aussi et de ne pas chercher à comprendre et à trouver une logique, se laisser porter par la vague, ce que Laika ne parvient pas à faire elle-même. Une multitude d'analogies avec notre propre monde peuvent être faites lorsque nous suivons Laika, et le plus dur est de comprendre s'il s'agit de rêve ou de science fiction, et même en fermant le roman, on cherche encore à comprendre comment les destins de ces personnages sont réellement liés…

C'est le genre de roman agréable à lire quand on le tient en main, mais que je n'ai pas toujours ouvert avec l'enthousiasme qui me caractérise à la lecture d'un roman. C'est un livre dur, qui fait réfléchir, et qu'on referme en se posant tout plein de questions, en essayant de comprendre, de rationaliser ce qu'on vient de lire.

Quand j'ai sélectionné cet ouvrage lors de l'opération Masse Critique, et j'en profite pour remercier Babelio et Asphalte éditions, je savais que j'allais vers une lecture très différente de mes habitudes, et je suis contente d'avoir fait cette expérience de lecture. Car Les Fleurs du Karma est une vraie expérience, le genre d'ouvrage qui ne peut laisser indifférent et qui ravira tous ceux qui cherchent à en savoir un peu plus sur le phénomène hippie.
Lien : http://breveslitteraires.wor..
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Lu grâce à la Masse Critique de Janvier, je m'attendais à une histoire bien romancée sur le destin croisé de 2 femmes. Bien sur, j'avais totalement tort.

On suit les déboires de Laïka dans un monde étrange et paranoïaque, sans savoir où l'auteur veut en venir. Puis commence les flash-back, les histoires imbriquées dans une histoire,imbriquée dans une histoire, imbriquée dans une histoire qui n'a rien à voir avec les autres histoires. Les narrateurs changent, Laïki, Kinky, le mystérieux homme, Laïka de nouveau et ainsi de suite, les époques s'entrecroisent, avant, après, encore avant, un peu après, retour au présent, puis un présent parallèle, on s'y perd.

C'est un grand amalgame dont on ne voit pas l'issue et l'auteur nous le fait d'ailleurs bien remarqué, si vous vous attendiez à une jolie histoire pour rêver c'est raté. Il ne s'arrête pas là, apostrophant le lecteur, le dépréciant, le tournant au ridicule à coup de, vous n'êtes pas spécial juste une erreur. Crachant sur tout ou presque, dénonçant la société de consommation entre autre et cherche à nous ouvrir les yeux sur la merde dans laquelle on vit.

J'ai eu énormément de mal à lire ce livre, si ce n'était pas pour faire un vraie critique, je me serai arrêter avant la fin sans regret. Fin qui convient parfaitement à l'oeuvre, complètement décalé qui fini de nous perdre.
Le plus dommage dans tout ça, c'est que c'est bien écrit. le style est fluide, les scènes bien aérer sans jamais être trop légère, les informations fiables et bien décrites, vraiment si le sujet et l'angle n'était pas si négatif, ce serait parfait.

En clair, c'est un livre pour hippies qui veulent se rebeller contre la société, pessimiste et masochiste.
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Remarquable exploration dickienne des postérités psychiques du flower power.

Publié en 2005 et traduit en français en 2013 par Sarah Guilmault aux excellentes éditions Asphalte, le quatrième roman de Tommaso Pincio poursuivait l'exploration conduite trois ans plus tôt dans "Un amour d'outremonde", en la portant à un rare niveau d'acuité, et en accentuant avec bonheur l'hommage implicite à Philip K. Dick, l'un des écrivains fétiches de l'auteur.

Poursuivant donc cette quête de l'impact psychique de la civilisation contemporaine "digérant" les mouvements socio-politiques (même inavoués) du passé, Tommaso PIncio délaisse le grunge post-punk des années 90 et sa pop culture déjà presque totalement assimilée - et rendue inerte - pour revenir à une source souterraine majeure, celle du flower power, et tout particulièrement celle de "l'été de l'amour" à San Francisco, avec ses ramifications ultérieures, survivant un temps à l'échec aussi orchestré qu'auto-administré, à Amsterdam ou sur des plages asiatiques. Une jeune femme ordinaire d'aujourd'hui, une hippie emblématique de 1966 et un étrange jeune homme, mathématicien n'utilisant fréquemment pas de voyelles, dessinent ainsi un incroyable périple, entre trois espaces-temps, 1966, 2005 et un lieu hors limites, métaphorique en diable, plat enchaînement de villes poussiéreuses culminant à Cloaca Maxima, le pays des usines à excréments... jusqu'aux accélérations finales de la narration et à leurs révélations.

Un "Au bout du labyrinthe" revisité avec un formidable brio contemporain et une ambition socio-politique bien déterminée.
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