J'ai souvent eu envie d'être un arbre pour contempler l'humanité avec plus de sérénité, et apporter du réconfort à ceux qui auraient l'intelligence de m'adresser la parole.
Au lieu de s'éclaircir, le mystère s'épaissit. Ce qui est peut-être vrai de tous les grands mystères : plus on s'en approche, plus ils nous glissent entre les doigts.
- C'était quoi ?
- Une femelle renard qui prévient ses petits du danger.
- Quel danger ?
- Nous.
- Vous voulez dire qu'elle ne crie pas toujours comme ça ?
- Non.
- Arrêtez-moi si je me trompe : vous parlez renard ?
- On peut dire ça.
- Vous voulez bien me raconter un truc en renard, Gus ?
- Non. Ça risque de perturber cette petite famille.
- Évidemment.
- Les gens célèbres ont un penchant pour l'autodestruction tellement plus élevé que la moyenne qu'il doit y avoir un truc qui déconne dans leur vie, tu ne crois pas ?
( Peut-être...
" Aujourd'hui, les gens veulent tous se barricader, surtout en ville, et surtout les vieux qui ont la thune pour le faire. La porte blindée à de l'avenir !" avait-il prophétisé, lui qui oublie toujours de fermer la nôtre, de porte, qui ne l'est pas, blindée.
Je ne sais pas exactement de quoi il veut se faire pardonner. D’avoir mis mon chien dehors, de m’avoir laissé un an en foyer, d’avoir démissionné de sa fonction de père en picolant, ou de tout ça à la fois. Mais ça fait quand même du bien de l’entendre et je me dis que le bonheur a peut-être ses chances. Après tout, Rusty, c’est mon choix, pas le sien. Je dois m’estimer heureux qu’il m’ait laissé l’adopter.
Mais quel mot sera plus fort que le silence ?
Le silence n’est jamais silencieux. Il est lourd du chant des oiseaux, et du vent, et du murmure d’êtres qui furètent, halètent, se fraient des chemins de lumière. Dans les villes, il est saturé du bruit des moteurs, klaxons, musiques échappées. La nuit y ajoute celui des téléviseurs qu’on allume pour régler son compte à l’ennui. Le vrai silence ressemble à la mort. Le silence qu’on désire bruit toujours.
"Il y a quand même un truc vicié à la base de cette éducation, si on doit mettre des barreaux autour des gosses pour qu'ils apprennent ! Il me semble que ça devrait être plutôt appétissant, la connaissance."
- Tu vas quand même pas travailler le jour de Noël !
- J'ai un roman à lire, c'est plutôt sympa comme travail.
Ce n'est pas vrai, mais ça leur cloue le bec. Il n'y en a tellement pas un qui lit dans cette famille que je fais soudain figure d'intello.
"Oui : en apparence, c'est une histoire de fonctionnaires, mais en réalité, c'est le concept de sécurité qui est en jeu : la sécurité empêche de vivre."