Ma libraire - dont ce livre est un coup de coeur - m'a présenté ce livre comme proche des écrits de
Jean-Louis Fournier. Ayant beaucoup aimé «
Où on va papa », sur les enfants autistes de cet auteur, je n'ai pas hésité une seule seconde à lire «
Les mots qu'on ne me dit pas », qui parle des parents sourds de
Véronique Poulain (qui elle, est entendante).
Tout au long du récit, la narratrice nous raconte sa vie, depuis son enfance jusqu'à maintenant, et particulièrement son quotidien avec ses parents, différents des parents de ses amis, puisqu'ils sont sourds. Elle oscille entre honte, colère et tendresse. Les chapitres sont brefs, sans fioriture, le ton est drôle, parfois caustique. On s'aperçoit alors de ce que cela représente de vivre avec des sourds : impossibilité d'apprendre à parler lire ou écrire à ses enfants, devoir les surveiller constamment des yeux, ne pas pouvoir faire deux choses à la fois puisqu'il faut parler avec les mains ou décrypter les lèvres, ne pas pouvoir dire « je t'aime » tout simplement. L'éducation de Véronique est donc à part, son adolescence est le moment où elle peut faire le mur tranquillement puisque ses parents ne l'entendent pas partir. Son oncle est sourd aussi, alors avec sa cousine Eve, elles font les quatre cent coups. On sent que c'est parfois lourd à vivre, les sourds ne s'entendant pas, ils sont parfois bruyants, cela énerve la narratrice. Mais la vie est souvent agréable – anecdotes d'une mauvaise traduction en langue des signes, triche à un jeu télévisé – et l'amour qui unit Véronique à ses parents est indéfectible, et l'auteur sait très bien le dire.
Parallèlement, on suit l'évolution de la place des sourds dans la société, peu à peu mieux reconnus et aidés (traductrice en langue des signes à la télévision, centres et associations spécialisés,…). Ses parents et son oncle ont été instigateurs de ce progrès, et on sent la fierté et le respect que cela inspire à la narratrice.
Le récit est touchant, on sourit souvent, on rit aussi parfois et on rentre dans le quotidien des sourds pour mieux les comprendre. On en ressort ému par ce témoignage d'amour sans tabou d'une fille pour ses parents. Et peu importe le handicap, le lien qui unit une famille reste fort malgré tout.