Serons-nous plus près de Dieu si nous sommes malheureux ?
Une princesse ne se marie pas par amour.
La grandeur d'un royaume a des raison que la morale ignore.
L'infortune des princes, l'essentiel est que nul n'ose en parler.
Année 1303 : la crise entre le roi et le pape Boniface VIII atteint son paroxysme. Menacé d’excommunication et d’interdit dans son propre royaume, Philippe le Bel contre-attaque. Il veut convoquer un concile afin de juger et de déposer ce pape indigne. Soutenu par le clergé et le peuple français, il envoie le chevalier Guillaume de Nogaret en Italie avec mission d’arrêter le pape. Nuit du 8 septembre, cité d’Anagni dans le Latium, où réside Boniface pendant l’été. Nogaret et son allié Sciarra Colonna donnent l’assaut avec une troupe de 600 cavaliers et 1.500 fantassins. Ils prennent sans difficulté le palais pontifical. Et se trouvent face à un pape aussi déterminé que le roi lui-même. Avec la même conception jalouse du pouvoir, mais du pouvoir spirituel. Mais la ville se rebelle et les Français doivent fuir. Libre, sauf, mais profondément choqué, Boniface meurt à Rome, peu après. Le successeur de Boniface VIII ? Benoît XI, fils d’un simple berger de Trévise, veut la paix, mais meurt étrangement quelques mois plus tard. La mort de Benoît XI laisse l’Église déconcertée. Pendant près d’une année, il s’avère impossible d’élire un nouveau pape. L’armée du roi de France vient alors intimider le conclave. Peu après, Bertrand de Gault, archevêque de Bordeaux, est élu. 25 septembre 1305, château royal de Corbeil, mariage de Marguerite de Bourgogne et du roi de Navarre, Louis de France. Le duc de Bourgogne et sa famille logent au château depuis quelques jours.
-Je veux être reine!
-Quelle étrange idée, ma mie. Nous sommes plus libres et plus heureux ainsi...
Nous accuser de sodomie, d’hérésie et d’idolâtrie… C’est trop ridicule pour que ce soit cru de qui que ce soit. – Jacques de Molay, grand maître de l’ordre du Temple
Profitons du bonheur tant que nous le pouvons encore.
Le roi de France est au sommet de sa gloire : le pape est muselé, les templiers abattus, les féodaux dociles. Nul ne conteste la grandeur de son royaume. Son œuvre ! Fruit d’un labeur constant, d’un dévouement sans partage. Roi grandiose, mais roi seul. Qu’importe, un roi est toujours seul. Le palais regorge de gaieté. Ces éclats de rire continuels réveillent son vieux cœur. Son fils est heureux d’avoir épousé cette princesse charmante. Ainsi, Louis connaît le bonheur avant de supporter le poids du pouvoir. Tant que lui veille…
Gardez-vous de cette faiblesse que je vois à beaucoup, de diaboliser la moindre chose. Thomas d’Aquin nous a bien mis en garde. […] Saint Augustin nous conte comment Dieu a créé les bons et les mauvais esprits. Comme un poète qui, pour relever les beautés de son œuvre, y sème les antithèses. Notre Seigneur a vu chez Satan, le plus beau de tous ses anges, un orgueil démesuré. Il lui a confié, alors, la couronne du mal, et l’ange déchu est devenu le roy de l’Enfer. Satan est nécessaire à la majesté du bien, car la lumière ne se voit qu’en comparaison des ténèbres. […] L’homme est bien présomptueux d’imaginer un combat entre Dieu et le diable, entre le bien et le mal. Un combat que Satan pourrait gagner. Seul Dieu est lumière, seul notre Seigneur est puissance. Si le diable a une certaine force, c’est que Dieu la lui a donnée. Le mal est une faiblesse inhérente à notre condition humaine. En lui donnant un roy, un symbole, Dieu nous aide à savoir contre qui lutter et somment rester dans Sa lumière. Et puis, sans mal à combattre, nous ne serions plus sur Terre, mais déjà au Paradis. Or mon enfant, le but de notre vie est de gagner notre place auprès de Dieu.