Citations sur Oeuvres complètes (211)
On est pas sérieux quand on a dix-sept ans.
_un beau soir, foin des bocks et de la limonade,
Des café tapageurs aux lustres éclatant !
_ On va sous les tilleuls verts de la promenade.
Les gens de Charleville sont grincheux comme leur climat, froids et traîtres comme le brouillard de la Meuse, égoïstes surtout. L'Ardennais est, par tempérament, ennemi de la poésie non sentie même par ceux qui se piquent de la comprendre.
(Isabelle Rimbaud, lettre de 1896)
Charleville, (Ardennes), le 24 mai 1871
À Monsieur Théodore de Banville.
Cher Maître,
Nous sommes aux mois d’amour ; j’ai presque dix-sept ans. L’âge des espérances et des chimères, comme on dit, – et voici que je me suis mis, enfant touché par le doigt de la Muse, – pardon si c’est banal, – à dire mes bonnes croyances, mes espérances, mes sensations, toutes ces choses des poètes – moi j’appelle cela du printemps.
[Rimbaud] en est venu à un point où cela seul compte qui est renouvellement radical, révolution, mise en question de toutes les valeurs, de toutes les traditions. Pour le poète qui est voyant, la poésie est expérience, elle est sa propre expérience.
Il n’a plus, du même coup, à connaître les formes traditionnelles de la langue et de la prosodie. Il créera des formes nouvelles, et s’il le faut, il livrera aux hommes de « l’informe ».
(Antoine Adam, Introduction)
Delahaye a rapporté les conversations qu’il eut alors avec son ami. Il y ajoute cette précision qu’elles datent des dernières semaines de 1870. Rimbaud, dit-il, lui parla alors d’une poétique nouvelle dont, pour le moment, il ne faisait qu’entrevoir le but et les moyens. Delahaye, pour résumer cette poétique, emploie une intéressante formule. « Il tendait, écrit-il, vers la notation pure et simple. » Il expliquait à Delahaye que nous avons seulement à ouvrir nos sens à la sensation, puis à fixer avec des mots ce qu’ils ont reçu. Notre unique soin, ajoutait-il, doit être de voir, d’entendre et de noter. Et cela, sans choix, sans intervention de l’intelligence. Le poète doit écouter et noter « quoi que ce soit. »
(Antoine Adam, Introduction)
Sire, ce serait vraiment méfait de pendre ces gentils clercs : ces poètes-là, voyez-vous, ne sont pas d'ici-bas : laissez-les vivre leur vie étrange ; laissez-les avoir froid et faim, laissez-les courir, aimer et chanter : ils sont aussi riches que Jacques Cœur, tous ces fols enfants, car ils ont des rimes plein l'âme, des rimes qui rient et qui pleurent, qui nous font rire ou pleurer : Laissez-les vivre : Dieu bénit tous les miséricords, et le monde bénit les poètes.
("Charles d'Orléans à Louis XI")
FLEURS
D'un gradin d'or, - parmi les cordons de soie, les gazes grises, les velours verts et les disques de cristal qui noircissent comme du bronze au soleil, - je vois la digitale s'ouvrir sur un tapis de filigranes d'argent, d'yeux et de chevelures.
Des pièces d'or jaune semées sur l'agate, des piliers d'acajou supportant un dôme d'émeraudes, des bouquets de satin blanc et de fines verges de rubis entourent la rose d'eau.
Tels qu'un dieu aux énormes yeux bleus et aux formes de neige, la mer et le ciel attirent aux terrasses de marbre la foule des jeunes et fortes roses.
Quelquefois je vois au ciel des plages sans fin couvertes de blanches nations en joie.
Et je redoute l'hiver parce que c'est la saison du confort!
Je ne suis pas prisonnier de ma raison.