Le grand amour de Virginia

Il avait fait mine de s'intéresser à la femme blonde, mais c'était elle, Virginia Brandon, avec sa beauté flamboyante, son arrogance et sa façon de défier les hommes du regard, c'était elle qui retenait toute son attention. Il s'était juré de l'avoir et son instinct lui soufflait qu'elle était mûre pour être prise. Elle était lasse et furieuse contre cet époux qui avait, sans vergogne, exhibé une maîtresse. Oui, il l'aurait, il en était certain. Mais pas tout de suite, pas encore. L'attente exacerberait encore son désir. Et qu'elle attende, elle aussi! Au bout du compte, elle tomberait à ses pieds. Comme les autres.

L'île de Cuba, toute proche, était agitée par des troubles. Du coup, des habitants de l'île se précipitaient à La Nouvelle-Orléans dans l'espoir d'y trouver quelque soutien. Certains voulaient aider les Espagnols qui ne tenaient guère à abandonner leurs riches possessions dans l'île, d'autres optaient pour les rebelles désireux de prendre le pouvoir et de se gouverner seuls. Pour tout compliquer, il y avait encore une troisième force : des Américains qui cherchaient à faire tourner à l'avantage des Etats-Unis n'importe quel conflit déchirant un pays proche.

L'ennui, c'est qu'ils n'avaient pas encore passé suffisamment de temps ensemble. Ils n'arrivaient pas à être complètement sincères l'un vis-à-vis de l'autre quand ils évoquaient leurs passés, tant ils craignaient de recommencer à se quereller. Ils s'aimaient. Mais l'amour leur suffirait-il pour affronter toute une vie, unis par les liens du mariage? L'amour les abandonnerait-il un jour? Ne finiraient-ils pas par s'ennuyer ensemble, par se haïr peut-être?

Ce sont des femmes comme vous qui encouragent les hommes à leur marcher dessus! Il ne vous a pas épousée avant de vous amener ici comme-compagne de voyage. Je parie d'ailleurs qu'il ne vous a jamais parlé de mariage! Vous vous êtes abaissée à le suivre en n'étant que sa maîtresse. Vous ne vous attendiez pas à ce qui se passe à présent? Dès qu'ils s'en lassent, les hommes comme lui se débarrassent sans un regard de ce qu'ils ont conquis trop facilement.

l n'était pas normal qu'une dame vienne toute seule à l'Opéra. Mais peut-être ne s'agissait-il pas d'une dame, mais de la maîtresse entretenue de quelque nouveau riche. De nos jours, il n'était pas facile de distinguer les unes des autres.