C'est l'insécurité au pays des sorciers : un dangereux criminel s'est échappé de la forteresse d'Azkaban. Les matons surnaturels tentent de le retrouver, et autant vous dire qu'ils ne sont pas commodes. Et c'est sans compter que ce fameux Sirius Black connaissait bien les parents de Harry… Il se pourrait même que ce soit lui qui les ait livrés à Voldemort.
Conformément à son tome précédent,
J. K. Rowling poursuit sa saga en interrogeant de plus en plus en profondeur la société anglo-saxonne sous une histoire innocente de petits sorciers. La chambre des secrets nous avait montré la ségrégation, le prisonnier d'Azkaban nous montre l'autoritarisme. le criminel qui nous paraît tout d'abord redoutable est très vite soupçonné d'être moins coupable qu'il n'y paraît (surtout si, comme moi, vous êtes habitués à la littérature de divertissement) ; parallèlement à ça, les Détraqueurs envahissent les environs de Poudlard pour retrouver celui qu'ils ont incarcéré. Et à prisonniers exceptionnels, gardiens exceptionnels… Au point qu'on en vient à se demander si le remède n'est pas pire que le mal.
Et c'est là qu'on aurait pu avoir un héros gentil et naïf qui découvre le monde autour de lui et se demande si c'est bien gentil d'être aussi méchant. Mais nous avons Harry Potter, que diable, et dès le premier chapitre nous comprenons qu'il n'a que trop morflé : subissant le harcèlement sans cesse, il commet sa première grosse connerie et ne va pas supporter longtemps que l'assassin de ses parents coure en liberté. Un personnage jusque-là trop lumineux commence à s'assombrir, et s'il semble plus raisonnable pour la fin, toute sa haine ne s'est pas évaporée ; une évolution prometteuse pour la suite, qui annonce personnages travaillés et questionnements complexes.
Bref, on pourrait croire que cette lecture était une partie de plaisir. Pourtant, on commence à s'agacer du retour de certaines vieilles ficelles. le départ puis le retour chez les Dursley (qui, on s'en doute, sera encore plus pénible dans le tome suivant), la maison Serpentard qui met les glandes à tout le monde et reste (presque) impunie, la succession de cours interminable quand on se doute bien que la confrontation finale arrivera pile à la fin de l'année scolaire… Bref, j'ai senti un ventre mou pendant une bonne partie du roman. Pourtant, à un certain point du récit, Harry va se rendre dans un certain village pour y commettre une certaine… bêtise, et à partir de là, c'est 150 pages de tension dramatique qui ne s'arrête quasiment jamais. Entre un match de quidditch mémorable et un double final (non pas qu'il arrive dans plusieurs lieux à la fois, mais il utilise un trope narratif que vous vous serez naturellement spoilé en voyant les catégories dans lesquelles je range ce livre, mouhaha), l'auteure parvient à maintenir la pression même avec des dialogues durant plusieurs chapitres en ménageant cliffhangers, twists, climaxs et autres joyeuses peaux-de-vacheries. En-dehors d'un rebondissement assez rocambolesque à propos de Ron et son rat (mais qui est somme toute tout à fait raccord avec le message autour de l'expérience de deuil qu'il vit dans ce tome-ci), on a là un sans-faute au niveau de l'enchaînement des révélations, sans compter que celui-ci gagne une adorable bestiole à la fin de l'histoire (Ron, pas le rat, ce serait plus glauque sinon).
Harry Potter et le prisonnier d'Azkaban a failli me décevoir, mais a vite su se rattraper. Hâte de passer à la suite, donc, mais moins pour retrouver la même tambouille (de sorcier) que les trois premiers tomes, que pour voir l'univers évoluer et arrêter de tourner en rond. Un peu de maturité ne nous fera que du bien : c'est pourquoi tous à vos balais et allez me transformer Rogue en grenouille ! Parce que bon, il n'y a pas que la culture dans la vie.
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