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Citations sur La Vie clandestine (145)

Ce qui n’existe pas insiste, insiste pour exister.
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C'est alors que je pose cette question, la seule qui demeurera, et dont je note fiévreusement la réponse sur une feuille volante.
"Comment le saviez-vous ?
- Pardon ?
- Comment sait-on que c'est la vraie vie ?"
Il marque un temps. J'entends son souffle, et le mien. Il reprend, en baissant d'un ton, comme si nous partagions un secret. Deux inconnus ayant soudain pris conscience qu'ils ont les mêmes tourments, qu'ils sont habités, par les mêmes questions dont ils ne parlent à personne.
"Ah, mais on ne le sait pas. On le comprend ensuite, quand ce n'est plus le cas. Sur le moment, on ne se rend compte de rien."
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Mon frère s'incline, retire les feuilles mortes qui trainent sur la tombe. Il a ensuite ce geste, semblable au battement d'ailes d'un oiseau: il embrasse le bout de ses doigts, et effleure le marbre à nos pieds. Une digue cède en moi, et tout se déverse: la tristesse, la colère, la violence, la honte. Mais également l'amour, le souvenir, la douceur, le manque, qui se tenaient là, eux aussi, et dont il m'aura fallu achever cette étrange épopée pour reconnaître l'existence. Tout tient ensemble, c'est ainsi, le bien et le mal enlacés à la façon de racines noires plantées dans mon coeur. p.311
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Pour ma part, ai l'impression d'avoir trouvé ce que je cherche, sans le savoir, depuis toujours. Un homme qui puisse s'asseoir devant moi, et admettre l'existence de la souffrance qu'il a causée. Des êtres qui acceptent de se livrer et comblent le vide dans mon coeur. J'apprendrai ensuite que l'un des convives a fait part de son inquiétude: ce soir-là, en ma présence, tout le monde parlait trop. Beaucoup trop. Hellyette et Régis lui ont rétorqué qu'ils savaient très bien ce qu'ils faisaient. J'étais libre d'utiliser leurs propos, dans cet obscur projet qui n' était même pas politique mais semblait nécessaire pour réparer une mystérieuse blessure. Dès le départ, ils savaient qu'ils ne reviendraient pas dessus. Ils avaient décidé de me faire confiance. Venant de maîtres du silence, aussi prisonniers du secret que moi, ce genre d'allégation est à mes veux à la fois un exploit, un cadeau dont on n'a pas les moyens, et un saut dans le vide. p.299
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Imaginez que vous parliez chinois à des interlocuteurs espagnols : vous pouvez parler doucement, supplier, crier, pleurer, cela ne change rien, ils ne comprennent pas le chinois.
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L’histoire appartient aux êtres qui parlent fort, effaçant ceux dont la parole est plus modeste ou plus fragile. Ceux qui doutent, craignent de blesser ou de trahir, ceux qui n’ont pas les mots, ceux qui ne savent pas. Ceux qui ont des regrets, des remords, ceux qui se sentent coupables et qu’on n’entend pas. Ce sont eux que je cherche, parce qu’ils me ressemblent.
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(…) nous traçons notre route comme nous le pouvons, tandis que le temps s’écoule, et ne s’écoule pas. Quelquefois, nous trouvons, poussés par des forces mystérieuses, un refuge au milieu de la forêt, ou en plein cœur de la ville. Parfois, nous rencontrons là un autre cœur égaré, poussé à l’abri par les mêmes forces mystérieuses. Cet être, croyons-nous, ne nous ressemble pas, il est même celui à qui tout nous oppose. Dans d’autres circonstances, à une autre époque, cet être aurait pu nous combattre. Mais à présent, loin du bruit du monde, dans cette cache où nous avons échoué et qui est en réalité le centre même du monde, il nous ramène à la vie. Peut-être même nous ramenons-nous l’un l’autre à la vie. Nous nous rencontrons en ce point exact qui relie les humains à l’univers entier, à un instant particulier, à un endroit particulier, à la façon d’une éclipse solaire, ou d’une pluie d’étoiles filantes. À cet instant, nous nous souvenons qu’en notre cœur existe un lieu irréductible, fait d’eau et de lumière, un lac cerné de montagnes bleues, traces d’un temps géologique. Nous nous souvenons alors que ce lieu existe dans le cœur de tous les hommes. Absolument tous.
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Je viens d’un lieu de ténèbres. Un lieu auquel j’ai essayé d’échapper durant mon existence entière, mais où je me rends simplement en fermant les yeux. Il est creusé dans la roche, c’est une galerie humide et froide que j’arpente dans l’obscurité. Les parois suintent une matière visqueuse qui me recouvre, moi aussi. C’est une prison familière, dans laquelle je marche sans jamais voir le jour, et qui se déploie sous la surface de la terre, à la façon d’un réseau de spéléologie, ou de catacombes. Et même si je réussis parfois à m’évader, que j’ai quelquefois muré son entrée, croyant la rendre impraticable pour toujours, même si je frotte sans relâche pour nettoyer ma peau, la vérité est que je retourne là-bas, encore et encore, aimantée par une force invisible. L’attraction de ce lieu est celle, dissimulée, fourbe, qui m’a conduite à écrire ce livre, celle qui m’a emmenée jusqu’ici, auprès de ces êtres qui se promènent eux aussi dans les souterrains du monde. Mais je sais désormais que ce lieu n’est pas le mien. Il m’appelle, prétend que je suis sa chose, qu’il m’a enfantée, nourrie, façonnée, mais c’est un mensonge, un piège, le chant de sirènes maléfiques.
J’en ai fini avec le caché, et avec le silence. Je ne veux plus creuser d’une main, et ensevelir de l’autre. Je ne veux plus être coupable, ni avoir honte. J’ai fini de croire que cette matière qui colle à ma peau est celle dont sont faits mon âme et mon cœur. J’ai fini de me taire, comme tous ceux qui savaient, et se sont tus, comme tous ceux qui m’ont fait croire que parler était une faute plus grave encore que toutes les fautes qui avaient été commises. Je regarde Hellyette, Régis, La Galère, je pense à Claude, à Nathalie. Je suis ici, et ailleurs, je suis à ma place, auprès d’eux, et je suis une infiltrée. Mais je ne suis pas un traître. Je ne suis pas un traître.
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Dans cette histoire, j’ai rencontré des individus détenant chacun leur vérité. Chacun est sincère, sensible, et pourtant, leurs vérités se percutent, ils racontent des histoires qui s’infirment ou s’annulent. Forcément, quelqu’un se trompe, ou quelqu’un ment. Mais peut-être pas. Les vérités se côtoient à la façon d’univers parallèles, légèrement dissemblables, séparées par des parois aussi minces que du papier à cigarette, des parois au travers desquelles nous pourrions voir, si nous nous approchions, que nous pourrions déchirer juste en y passant la main. Mais nous ne le faisons pas.
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Pour ma part, j’ai l’impression d’avoir trouvé ce que je cherche, sans le savoir, depuis toujours. Un homme qui puisse s’asseoir devant moi, et admettre l’existence de la souffrance qu’il a causée. Des êtres qui acceptent de se livrer et comblent le vide dans mon cœur. J’apprendrai ensuite que l’un des convives a fait part de son inquiétude : ce soir-là, en ma présence, tout le monde parlait trop. Beaucoup trop. Hellyette et Régis lui ont rétorqué qu’ils savaient très bien ce qu’ils faisaient. J’étais libre d’utiliser leurs propos, dans cet obscur projet qui n’était même pas politique mais semblait nécessaire pour réparer une mystérieuse blessure. Dès le départ, ils savaient qu’ils ne reviendraient pas dessus. Ils avaient décidé de me faire confiance. Venant de maîtres du silence, aussi prisonniers du secret que moi, ce genre d’allégation est à mes yeux à la fois un exploit, un cadeau dont on n’a pas les moyens, et un saut dans le vide.
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