Elle [musulmane] a dit qu'avant la guerre, elle aurait tout fait avec ses voisins serbes. Ils les invitaient pour le café, fêtaient la Noël orthodoxe avec eux, allaient à leurs mariages. Elle a dit qu'elle pourrait de nouveau vivre avec eux, qu'ils pouvaient revenir s'ils le voulaient, que chacun rentre chez soi... mais que ce ne serait plus jamais pareil. Jamais. (p. 77)
Dix ans à peine après la mort de Tito en 1980, la Yougoslavie commence à tomber en lambeaux. L'instigateur de la séparation et des tragédies qui s'ensuivent est le futur président de la Serbie, Slobodan Milosevic, qui encourage et exploite le nationalisme des Serbes et leur sens du martyre pour consolider son pouvoir en Serbie et étendre son influence sur les Serbes des autres républiques. (p. 36)
Tito entretenait sa politique de "fraternité et unité" en supprimant les signes manifestes de nationalisme ethnique au sein des différents peuples yougoslaves.
Si Tito avait réussi à créer un semblant d'unité yougoslave, il l'avait fait sans désamorcer les griefs des nationalités. Ces griefs allaient être exploités par les politiciens briguant le pouvoir après la mort du président à vie Tito.
De l'avis d'un grand nombre de gens, la période correspondant à la politique de Tito était très agréable, mais elle est bien révolue. La plupart des gens regrettent ce temps-là.
Et pourtant, la loi de Tito était autoritaire. (...)
(p. 20)
Des six républiques yougoslaves créées par Tito, la Bosnie était la plus diverse du point de vue ethnique. D'importantes populations croates, serbes et musulmanes s'y côtoyaient. Ces groupes ethniques, qui possèdent chacun une histoire et un passé culturels distincts, sont tous des Slaves du Sud, qui parlent essentiellement la même langue. Leur principale distinction est religieuse. Les Croates sont catholiques, les Serbes orthodoxes et les Musulmans descendent pour la plupart de ces Slaves convertis à l'Islam au cours de 500 ans d'occupation ottomane.
Dans certaines grandes villes de Bosnie, comme Sarajevo, les populations étaient particulièrement mêlées et faisaient preuve d'une tolérance exemplaire.
(p. 19)