Monna Lisa vous regarde, elle vous fixe de façon énigmatique, même quand vous lui tournez le dos, vous sentez qu'elle est toujours là, son léger sourire aux lèvres.
Malheureusement pour elle, comme nous le confie
Vincent Delieuvin, conservateur en chef du musée du Louvre, « La
Joconde est condamnée à ne plus jamais être observée comme elle devrait être observée, c'est-à-dire dans un tête-à-tête ».
Lisa Gherardini est le sujet central de
L'allègement des vernis.
Le Louvre a besoin d'une opération marketing d'envergure pour refaire parler de lui et faire revenir une foule moins nombreuse post covid.
Une agence marketing propose alors un remède choc, un sujet maintes fois abordé puis repoussé, la restauration de la
Joconde, en supprimant les couches de vernis successives qui l'assombrissent.
Au milieu de la tourmente, le transparent Aurélien, directeur du département des Peintures, entre deux âges, le cul toujours entre deux chaises, laisse les autres et les événements décider du cours de sa vie, prompt à s'effacer, soulagé de laisser les autres prendre la lumière des flashs.
Avec beaucoup d'intelligence, une plume acérée,
Paul Saint Bris nous emmène dans le monde de l'art et des musées à travers une incursion passionnante dans les couloirs du Louvre, les changements induits par l'évolution de notre société noyée sous un flot ininterrompu d'images. Comment convaincre les nouvelles générations de continuer à acheter leurs billets dans un musée tout ce qu'il y a de plus classique, à l'heure des réalités virtuelles ?
La finesse de l'analyse interroge le lecteur sur les enjeux de notre époque entre respect des oeuvres et marketing, le passage du temps sur les oeuvres et les êtres.
Faut-il alléger les vernis qui nous emprisonnent dans un autre temps, les technologies nous éloignent-elles ou peuvent-elles nous rapprocher des artistes ? Qu'est-ce qu'un artiste au demeurant, en quoi se distingue-t-il d'un artisan ?
J'ai apprécié découvrir toutes les connaissances que l'auteur nous transmet avec une apparente facilité sur l'histoire de l'art, la restauration des tableaux, les enjeux de l'organisation d'une exposition, les liens avec le monde politique pour ceux qui dirigent un établissement public aussi prestigieux que
Le Louvre.
J'émettrai cependant deux réserves concernant le début et la fin du roman. Si les sujets évoqués ci-dessus sont très maîtrisés, j'ai eu un peu de mal à rentrer dans l'histoire, le personnage fade d'Aurélien ne le rendant pas très attachant ni intéressant. La fin est également très peu crédible, un peu bâclée, ce que j'ai regretté.
Un premier roman intéressant et prometteur, suivez mon regard …