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Citations sur Mémoires, tome 1 (91)

Mme Panache était une petite et fort vieille créature avec des lippes et des yeux éraillés à y faire mal à ceux qui la regardaient, une espèce de gueuse, qui s'était introduite à la cour sur le pied d'une manière de folle, qui était tantôt au souper du roi, tantôt au dîner de Monseigneur et de Mme la Dauphine, ou à celui de Monsieur, à Versailles ou à Paris, où chacun se divertissait à la mettre en colère, et qui chantait pouille aux gens à ces dîners-là pour faire rire, mais quelquefois fort sérieusement, et avec des injures qui embarrassaient et qui divertissaient encore plus ces princes et ces princesses, qui lui emplissaient ses poches de viande et de ragoûts, dont la sauce découlait tout du long de ses jupes, et que les uns lui donnaient une pistole ou un écu, et les autres des chiquenaudes et des croquignoles, dont elle entrait en furie, parce qu'avec ses yeux pleins de chassie, elle ne voyait pas au bout de son nez, ni qui l'avait frappée, et que c'était le passe-temps de la cour.
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"[...] ... Le Roi à Trianon mangeait avec les dames (1) et donnait assez souvent aux Princesses l'agrément d'en nommer deux chacune. Il leur avait donné l'étrange distinction de faire manger leurs dames d'honneur, ce qui continua toujours à être refusé à celles des princesses du sang, c'est-à-dire [aux dames] de Mme la Princesse(2) et de madame la princesse de Conti, sa fille. (3)

A Trianon, Mme la princesse de Conti, fille du Roi, lui fit trouver bon qu'elle nommât ses deux filles d'honneur pour manger, et elles furent admises ; elle était la seule qui en eût ... [...]"
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Marège, qui étoit à M. le prince de Conti, Gentilhomme gascon, et que son esprit et ses saillies avoient fort mêlé avec tout le monde, relevoit à peine d’une grande maladie
Lorsqu’il s’embarqua avec son maître. Il étoit à ce repas où on but à la polonoise. Il en fut fort pressé, et se défendoit du mieux qu’il pouvoit. M. le prince de Conti vint à son secours, et l’excusa sur ce qu’il étoit malade ; mais ces Polonois, qui, pour se faire entendre, parloient tous latin, et fort mauvais latin, ne se payèrent point de cette excuse, et, le forçant à boire, s’écrièrent en furie : Bibat et moriatur.
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M. de Barbezieux finit l’année par un éclat dont il se serait pu passer. Il avait, comme on l’a vu, épousé Mlle d’Alègre. Il la traitait comme un enfant, et ne se contraignait pas de ses galanteries et de sa vie accoutumée. M. d’Elboeuf, comme on l’a vu encore, en fit l’amoureux à grand bruit pour insulter Barbezieux. La jeune femme, piquée de la conduite de son mari à son égard, crut de mauvais conseils et rendit son mari jaloux. Il s’abandonna à cette passion, tout lui grossit, il crut voir ce qu’il ne voyait point et il lui arriva ce qui n’est jamais arrivé à personne, de se déclarer publiquement cocu, d’en vouloir donner les preuves, de ne le pouvoir, et de n’en être cru de qui que ce soit. On n’a jamais vu homme si enragé que celui-là, de ne pouvoir passer pour cocu.
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"[...] ... La Vienne, baigneur à Paris fort à la mode, était devenu [celui du Roi] du temps de ses amours. Il lui avait plu par des drogues qui l'avaient mis en état plus d'une fois de se satisfaire davantage, et ce chemin l'avait conduit à devenir l'un des quatre premiers valets de chambre. C'était un fort honnête homme, mais rustre, brutal et franc, et cette franchise, dans un homme d'ailleurs vrai, avait accoutumé le Roi à lui demander ce qu'il n'espérait pas pouvoir tirer d'ailleurs, quand c'étaient des choses qui ne passaient point à sa portée. Tout cela conduisit jusqu'à un voyage à Marly, et ce fut là où il questionna La Vienne. Celui-ci montra son embarras, parce que, dans la surprise, il n'eut pas la présence d'esprit de le cacher. Cet embarras redoubla la curiosité du Roi et enfin ses commandements. La Vienne n'osa pousser plus loin la résistance : il apprit au Roi ce qu'il eût voulu pouvoir ignorer toute sa vie, et qui le mit au désespoir.

Il n'avait eu tant d'embarras, tant d'envie, tant de joie de mettre M. de Vendôme* à la tête d'une armée que pour y porter M. du Maine [Vendôme était très lié avec le duc du Maine] ; tout son application était d'en abréger les moyens en se débarrassant des princes du sang par leur concurrence entre eux. Le comte de Toulouse, étant amiral, avait sa destination toute faite ; c'était donc pour M. du Maine qu'étaient tous ses soins. En ce moment, il les vit échouer, et la douleur lui en fut insupportable. Il sentit pour ce cher fils tout le poids du spectacle de son armée, et des railleries que les gazettes lui apprenaient qu'en faisaient les étrangers, et son dépit en fut inconcevable. ... [...]
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Un soir que [Racine] était entre le Roi et Mme de Maintenon, chez elle, la conversation tomba sur les théâtres de Paris. Après avoir épuisé l'Opéra, on tomba sur la comédie. Le Roi s'informa des pièces et des acteurs, et demanda à Racine pourquoi, à ce qu'il entendait dire, la comédie était si fort tombée de ce qu'il l'avait vue autrefois. Racine lui en donna plusieurs raisons, et conclut par celle qui, à son avis, y avait le plus de part, qui était que faute d'auteurs et de bonnes pièces nouvelles, les comédiens en donnaient d'anciennes, et , entre autres, ces pièces de Scarron qui ne valaient rien et qui rebutaient tout le monde. A ce mot la pauvre veuve rougit, non pas de la réputation du cul-de-jatte attaqué, mais d'entendre prononcer son nom, et devant le successeur. Le Roi s’embarrassa ; le silence qui se fit tout d'un coup réveilla le malheureux Racine, qui sentit le puits dans lequel sa funeste distraction le venait de précipiter.
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Emplois de Cheverny et son aventure à Vienne.
Cheverny était menin de Monseigneur : il avait été envoyé à Vienne, et ambassadeur après en Danemark, où lui et sa femme avaient gagné le scorbut et laissé leur santé et leurs dents. La femme, avec plus d’esprit et de mesure, ne tenait pas mal de son frère. À Vienne il arriva à Cheverny une aventure singulière. Il devait avoir, un soir d’hiver, sa première audience de l’Empereur : il alla au palais ; un chambellan l’y reçut, le conduisit deux ou trois pièces, ouvrit la dernière, l’y fit entrer, se retira de la porte même, et la ferma. Entré là, il se trouve dans une pièce plus longue que large, mal meublée avec une table tout au bout, sur laquelle, pour toute lumière dans la chambre, il y avait deux bougies jaunes, et un homme vêtu de noir, le dos appuyé contre la table. Cheverny, assez mal édifié du lieu, se croit dans une pièce destinée à attendre d’être introduit plus loin, et se met à regarder à droit, à gauche, et à se promener d’un bout à l’autre. Ce passe-temps dura près d’une demi-heure. À la fin, comme un des tours de sa promenade l’approchait assez près de cette table et de cet homme noir qui y était appuyé, et qu’à son air et à son habit il prit pour un valet de chambre qui était là de garde, cet homme, qui jusqu’alors l’avait laissé en toute liberté sans remuer ni dire un mot, se prit à lui demander civilement ce qu’il faisait là. Cheverny lui répondit qu’il devait avoir audience de l’Empereur, qu’on l’avait fait entrer, et qu’il attendait là d’être introduit pour avoir l’honneur de lui faire la révérence. « C’est moi, lui répliqua cet homme, qui suis l’Empereur. » Cheverny, à ce mot, pensa tomber à la renverse, et fut plusieurs moments à se remettre, à ce que je lui ai ouï conter. Il se jeta aux pardons, à l’obscurité, et à tout ce qu’il put trouver d’excuses ; je pense après que son compliment fut mal arrangé. Un autre que l’Empereur en eût ri ; mais Léopold, incapable de perdre sa gravité, demeura dans le même sens froid, qui acheva de démonter le pauvre Cheverny. Il contait bien, et cette histoire était excellente à entendre de lui.
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"[...] ... Rien de plus adroit, de plus insinuant, de plus flatteur que la lettre [au Pape] de M. de Cambray. L'art, la délicatesse, l'esprit, le tour y brillaient, et, tout en ménageant certains termes, trop grossiers pour l'honneur de l'épiscopat et des maximes du Royaume, il y fit litière de l'un et de l'autre sous prétexte de modestie et d'humilité personnelle. Elle ne laissa pas, par cela même, de faire pour lui un bon effet dans le monde. En général, on est envieux et on n'aime pas l'air d'oppression. Tout était déclaré contre lui : ses parties, devenues ses juges par le renvoi de son livre à leur examen ; elles* venaient de profiter des vacances** de M. de Metz. On lui passa donc les flatteries de sa lettre en faveur du tour et de la nécessité, et il vit une lueur de retour du public. ... [...]"
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"[...] ... [Le cardinal de Bouillon] avait l'obligation [à Fénelon et à ses amis] d'avoir vaincu la répugnance du Roi pour l'envoyer relever le cardinal de Janson, et celle encore de lui avoir obtenu l'agrément et la protection du Roi pour faire élire l'abbé d'Auvergne, son neveu, coadjuteur de son abbaye de Cluny. C'était avoir pris l'orgueil qui gouvernait uniquement le cardinal par l'endroit le plus sensible. Il ne se démentit donc point à leur égard lorsqu'il vit leur crédit en désarroi , et il espéra les remettre en selle par le jugement qu'il se promettait de faire rendre à Rome. Tout l'animait en ce dessein, le fruit d'un si grand service, et on prétendit que le marché entre eux* était fait, mais à l'insu des ducs, que le crédit de l'un ferait l'autre cardinal en lui faisant gagner sa cause, et que le crédit de celui-ci, relevé par sa victoire et sa pourpre, serait tel en soi et sur les deux ducs, à qui il serait alors temps de parler et sur lesquels il pouvait tout, qu'ils feraient entrer le cardinal de Bouillon dans le Conseil, d'où Bouillon ne se promettait pas moins que de s'élever à la place de premier ministre. ... [...]"
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"[...] ... Les Princesses n'étaient que très-légèrement racommodées, comme on l'a vu plus haut, et Mme la princesse de Conti intérieurement de fort mauvaise humeur du goût de Monseigneur [le Grand Dauphin, son demi-frère, qui l'écoutait fort] pour la Choin [favorite de Monseigneur], qu'elle ne pouvait ignorer, et dont elle n'osait donner aucun signe.

A un dîner pendant lequel Monseigneur était à la chasse, et où sa table était tenue par Mme la princesse de Conti, le Roi s'amusa à badiner avec Mme la Duchesse [de Condé, fille aînée de Mme de Montespan] et sortit de cette gravité qu'il ne quittait jamais, pour, à la surprise de la compagnie, jouer avec elle aux olives. Cela fit boire quelques coups à Mme la Duchesse ; le Roi fit semblant d'en boire un ou deux, et cet amusement dura jusqu'aux fruits et à la sortie de table. Le Roi, passant devant Mme la princesse de Conti pour aller chez Mme de Maintenon, choqué peut-être du sérieux qu'il lui remarqua, lui dit assez sèchement que sa gravité ne s'accommodait pas de leur ivrognerie. La princesse, piquée, laissa passer le Roi ; puis, se tournant à Mme de Châtillon, dans ce moment de chaos où chacun se lavait la bouche, lui dit qu'elle aimait mieux être grave que sac à vin, entendant quelques repas un peu allongés que ses soeurs [les deux filles de Mme de Montespan] avaient fait depuis peu ensemble.

Ce mot fut entendu de Mme la duchesse de Chartres, qui répondit assez haut, de sa voix lente et tremblante, qu'elle aimait mieux être sac à vin que sac à guenilles ; par où elle entendait Clermont* et des officiers des gardes du corps qui avaient été les uns chassés, les autres éloignés, à cause de [Mme la princesse de Conti.] Ce mot fut si cruel qu'il ne reçut point de repartie, et qu'il courut sur le champ par Marly, et de là à Paris et partout.

Mme la Duchesse qui, avec bien de la grâce et de l'esprit, a l'art des chansons salées, en fit d'étranges sur ce même ton. Mme la princesse de Conti, au désespoir et qui n'avait pas les mêmes armes, ne sut que devenir. Monsieur [Philippe d'Orléans, leur oncle à toutes trois], le roi des tracasseries, entra dans celle-ci qu'il trouva de part et d'autre trop fortes [= c'est-à-dire que, d'un côté comme de l'autre, les adversaires sont allées trop loin dans la méchanceté.] Monseigneur s'en mêla aussi : il leur donna un dîner à Meudon, où Mme la princesse de Conti alla seule, et y arriva la première ; les deux autres y furent menées par Monsieur. Elles se parlèrent peu, tout fut aride, et elles revinrent de tous points comme elles étaient allées. ... [...]
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