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L'édition de la Pléiade sur laquelle nous nous sommes appuyés comporte sept tomes d'épaisseur inégale et couvrant la période historique allant de la dernière décennie du XVIIème siècle jusqu'en 1723, date à laquelle, avec la mort de Philippe d'Orléans, le Régent, Saint-Simon décide de se retirer en ses terres.

Le premier tome évoque une décennie toute entière, de 1691, année où Saint-Simon prend son premier commandement dans l'armée, sous le maréchal D Humières, jusqu'en 1701 qui vit, selon le mémorialiste, finir "tout le bonheur du Roy." L'ensemble comporte pas mal de scènes militaires mais c'est la vie à Versailles, avec les intermèdes de Marly et de Fontainebleau, qui tient la vedette. En un cortège incroyable de vie, Saint-Simon ressuscite ce qu'il connaît du Grand Siècle, à savoir les années Maintenon, dont Louis XIV demeure toujours le centre. Mais ce n'est plus le Louis XIV fringant des grandes amours avec Melle de la Vallière, puis avec Mme de Montespan : le monarque n'a pas seulement mûri, l'homme aussi a vieilli - et pas en bien.

Très vite, le lecteur prend conscience des sentiments ambivalents que porte à ce roi si absolument royal un Saint-Simon qui l'admire pour son faste, son panache, son amour du grand et du beau mais ne peut en même temps lui pardonner d'avoir introduit la bourgeoisie aux conseils en "faisant" un Colbert et un Louvois et encore moins d'avoir tout fait pour placer ses enfants bâtards au-dessus, ou à tout le moins au même niveau, que les Princes du sang. Ce premier volume s'ouvre d'ailleurs pratiquement sur le mariage de Melle de Nantes, la dernière des filles que Louis XIV avait eues de Mme de Montespan, avec le duc de Chartres, fils de Monsieur, le duc d'Orléans, frère du roi, et d'Elizabeth-Charlotte, princesse palatine.

A partir de cet épisode, Saint-Simon prend son envol - et son style avec lui. Car ce premier tome, c'est aussi une prise de contact avec une manière d'écrire qui fait voisiner, avec une superbe indifférence, un langage archaïque, encore fixé au milieu du siècle, et un art proprement extraordinaire et des plus modernes de restituer des scènes d'un point de vue non pas historique (Saint-Simon me pardonne ! Wink ) mais indéniablement subjectif et littéraire.

Avec une humilité qui lui était plus habituelle qu'on ne le croit, Saint-Simon avouait lui-même "ne pas savoir écrire." Il est vrai que, si l'orthographe chez lui est relativement respectée, tout ce qui est accord, des verbes, des adjectifs, des pronoms, etc ..., se présente dans une débandade aussi somptueuse que fantaisiste. Pour résumer le style de son illustre prédécesseur, Chateaubriand dira : "Il écrivait à la diable pour la postérité." Et le lecteur ne peut qu'acquiescer tant l'image rend bien cette impression que l'on a très tôt d'être emporté en croupe par un Saint-Simon lancé au grand galop parmi les phrases qui n'en finissent plus de tourbillonner et les images saisissantes que l'on prend en pleine figure comme on prendrait des rafales de grand vent frais.

Saint-Simon ne savait peut-être pas écrire mais une chose est certaine : il aimait écrire et cet amour lui donne du génie. Il est d'ailleurs l'un des rares mémorialistes au monde qu'on lit aussi pour son style.

Comment rappeler tous les moments forts, tous les portraits incroyables que contient ce premier tome ? Vous en trouverez l'essentiel dans notre rubrique : "Ce Pays-Ci ou A La Découverte de Saint-Simon." Signalons cependant quelques passages qui peuvent interloquer, voire ennuyer le lecteur moderne : tous concernent soit les complexités de la généalogie, soit les distinctions du protocole, comme par exemple, presque à la fin du volume, l'explication en long et en large des différents degrés de grandesse en Espagne. A part cela, Saint-Simon reste un auteur incontournable, à lire absolument, au même titre qu'un Balzac ou un Proust, pour ne citer que ces deux grands noms de notre littérature. ;o)
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Pour entrer dans l'univers de Saint-Simon, il n'est peut-être pas conseillé de s'acheter le premier volume de la Pléiade, et de l'ouvrir à la première page en espérant aller jusqu'à la dernière du dernier volume. Nous, lecteurs contemporains, nous n'avons peut-être plus les mêmes capacités d'attention soutenue que nos ancêtres, et le zapping est devenu une seconde nature. Il vaut mieux, pour ceux que cela concerne, se procurer un ou deux volumes d'extraits et de morceaux choisis, tels que les excellents publiés par Folio (Yves Coirault l'a composé) ou Garnier Flammarion, prendre le goût de la prose du mémorialiste, s'amuser aux anecdotes pour lesquelles il n'a pas son égal, et quand la température est prise, se lancer dans la lecture au long cours. Cette lecture n'est en rien un ennui, car si parfois la matière nous semble étrange, la langue, le souffle, le phrasé de l'auteur sont inimitables et c'est un parfait bonheur de s'entendre raconter par lui telle usurpation des bâtards du roi, telle intrigue ou telle cérémonie dont l'intérêt propre n'est pas toujours certain. le charme opère, il suffit de le laisser opérer.
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Lire Saint-Simon, ça permet de voir la Macronie autrement.
Pourquoi je dis ça moi ? Parce que j'ai parfois l'impression de vivre dans une Monarchie absolue. Pas vous ? Bruno le Maire, Ministre de l'Economie et des Finances (tout de même) a la même impression que moi. Ecoutez-le donc parler ce cher (il est forcément cher le Ministre des Finances) Ministre  sur le plateau de Public Sénat : https://www.youtube.com/watch?v=8LXTbIesqlU&t=664s Je résume un peu. Bruno le Maire voit une certaine continuité entre la Monarchie Absolue et la Vème République. Il compare le fonctionnement politique de la Cour du Roi Louis XIV et notre fonctionnement actuel. Il relève des traits culturels français, toujours présents « Chaque modèle politique a ses propres traits culturels » Il parle de la Cour et des courtisans … et il compare la colère du Roi à la colère du Président, mais il compare surtout les courtisans du Roi aux courtisans du Président. Et il nous fait comprendre qu'en France, actuellement, c'est toujours, non pas la Monarchie, certes, mais un Pouvoir Absolu. Bruno le Maire se compare ensuite à Saint-Simon et se pose comme observateur de la Cour d'Emmanuel Macron, alors même qu'il est, comme Saint-Simon, un homme de Cour. Je ne peux m'empêcher de me dire qu'il est tout de même orgueilleux de se comparer à Saint-Simon. Mais il m'est revenu en mémoire qu'il est toujours affaire d'orgueil dans les Mémoires de Saint-Simon et que Saint-Simon lui-même n'est pas exempt d'orgueil ( bien qu'il s'agisse d'un orgueil blessé).

Si vous n'êtes toujours pas convaincu par ma comparaison entre la Monarchie Absolue et la Macronie ( ce n'est pourtant pas pour rien qu'on l'appelle la Macronie, et qu'on surnomme Macron Jupiter, lui-même s'étant présenté comme un Président, je cite « Jupitérien »), vous apprécierez sans doute tous ces journalistes qui comparent cette fois-ci Macron à un autre Saint-Simon.

Ces journalistes qui lisent Saint-Simon avec le filtre des penseurs de la politique, comme Marx par exemple, qui a lu, lui, Saint-Simon, et en Français, et qui a qualifié le saint-simonisme de socialisme utopique. le saint-simonisme comme doctrine donc … On lit dans Le Figaro, je cite, que
« cette doctrine qui n'en est pas une, pourrait se résumer ( bien que Saint-Simon n'emploie pas ces termes) en une combinaison de socialisme et de libéralisme ; ou mieux encore, en la qualifiant de progressisme : un progressisme qui voit dans le développement de la science, de la technique, du commerce et de l'industrie, le moteur déterminant de l'émancipation et du bien-être universels. »
Selon les adeptes fervents de cette doctrine et selon les défenseurs du progrès (qui n'ont toujours pas compris ce qu'est le progrès, mais passons), Macron serait donc celui qui abolit l'ancien monde, au nom du progrès, justement. Mais quel ancien monde ? Quel monde ( ou quel pays, soyons modeste) cherche-t-il à détruire ? C'est la question que je poserais bien volontiers au journaliste du Figaro. Ne désirant pas particulièrement m'adresser directement à Macron.
Allez je cite encore des journalistes – au sujet du saint-simonisme et toujours de Macron – des journalistes du Figaro ou du Monde cette fois-ci, je ne sais plus, pour la forme :
« Les saint-simoniens vont être en effet les principaux acteurs de l'industrialisation de la France, de l'essor du machinisme et du développement des réseaux, réseaux de transports (canaux, chemins de fer), réseaux financiers (grande banque, crédit) et réseaux humains (urbanisation, etc ): bref, ils seront les initiateurs d'une modernisation à marche forcée poursuivie avec d'autant plus d'énergie qu'ils lui donnent une valeur à la fois économique, politique, sociale et morale (le travail est sanctifié, car lui seul permet à l'homme de s'accomplir et de se libérer). Et ce, justement, parce que le saint-simonisme ne constitue pas une doctrine au sens strict, rigide, complète et donc forcément datée et obsolète, mais bien plutôt une façon de voir, une orientation, une sensibilité. Pour Emmanuel Macron, le saint-simonisme n'est pas un modèle qu'il faudrait reproduire tel quel, en le plaquant sur le réel, mais plutôt une sorte de matrice - de la même manière que le marxisme en constituait une pour François Mitterrand dans les années 1970-1980. Dans le cas d'Emmanuel Macron, il s'agit d'une matrice peut-être inconsciente: comme Monsieur Jourdain faisait de la prose, lui fait du saint-simonisme sans le savoir, ou du moins sans avoir besoin de le dire. Il ne s'agit pas d'un vernis, qui est là pour être vu tout en restant superficiel, mais au contraire d'une sorte de colonne vertébrale idéologique invisible au premier regard, mais qui éclaire de l'intérieur le «Macron profond»: celui qui se présente, avec une sincérité dont on n'a pas de raison de douter [… là je lève les yeux au ciel, mais pardon je me tais … ], comme le héraut du progressisme, le chantre du monde nouveau et de l'Europe souveraine. Ainsi est-ce en héritier du saint-simonisme qu'il opposait, le 14 septembre dernier, le camp du bien à celui du mal : l'implantation de la 5G, associée au Progrès et aux Lumières, au «modèle Amish» de la lampe à huile et aux écologistes conservateurs qui prétendent faire prévaloir la nature sur le développement économique et technologique. »

Que dire ? Sommes-nous toujours à l'ère de l'industrialisation ? Sommes-nous restés coincés au XIXème siècle ? N'avons-nous rien appris du XX ème siècle ? Pourquoi faire du travail la valeur clé de notre civilisation ? Sommes-nous marxistes en France ? Pourquoi ai-je l'impression que nous n'avons pas évolué alors même qu'il s'agirait d'évolution (technologique ou que sais-je encore?) ? Nous présenter Macron comme l'héritier de la doctrine saint-simonienne, c'est aussi, quelque part, le présenter comme l'héritier du socialisme utopique, pour reprendre les termes de Marx, et cela ne choque personne ? Enfin, n'y-a-t-il pas une certaine contradiction entre Macron, digne héritier de la doctrine saint-simonienne et Macron, Président Absolu ? La contradiction ne serait-elle qu'apparente ?

En vérité, je me demande ce que c'est, la politique. S'agit-il vraiment de la « polis », de la cité, de son organisation voire de son autogestion comme chez les Grecs Antiques ? Ou s'agit-il de l'exercice du pouvoir et de la fascination qu'ont les hommes (et les femmes) pour le pouvoir ?

PS : Oui, je note très mal Saint-Simon parce qu'à l'époque où je l'ai lu, j'ai énormément souffert de cette lecture, parce que je devais absolument tout lire. Mais je recommande tout de même cette lecture, ne serait-ce, comme je le disais au début, que pour comprendre un peu mieux la Macronie.
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Des mémoires qui n'en sont pas réellement. Si vous espérez pénétrer les pensées les plus enfouies et découvrir la vie personnelle de Saint-Simon, vous serez partiellement déçus.
Ici, le mémorialiste arpente les couloirs de Versailles sous Louis XIV et nous en livre ses secrets : il se fait le témoin historique et le rapporteur méticuleux de tout ce qu'il s'y passe pour nous livrer, avec une pointe d'humour parfois et avec talent toujours, les anecdotes de la cour et des commentaires personnels sur les événements majeurs de l'époque.
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Monsieur de Saint-Simon était un jeune homme bien fait de petite taille, ayant fort tôt embrassé une carrière militaire, son regard était doux, noir, pénétrant, un visage agréable que déparait à peine un nez tordu. Il avait de l'ambition, beaucoup d'esprit, des saillies plaisantes, sans toujours maîtriser son désir d'exhaustivité et, confus, il s'engageait parfois dans de longues dissertations qui, sans lui faire perdre le fil, l'emmenait loin de son sujet principal. Il lui arrivait aussi de radoter sur d'anciens faits d'armes ennuyeux. Son sens aigu de l'observation lui permettait de pénétrer toutes les arcanes de l'étiquette et les règles minutieuses de bienséance qui prévalaient à la cour. Doué d'une mémoire prodigieuse, il connaissait toutes les généalogies complexes des grandes familles européennes où se mêlaient consanguinité et bâtardise (Saint-Simon reprochait souvent à Louis XIV de favoriser ses enfants illégitimes), il avait lui-même un grand amour pour sa maison et ses parents. le souvenir de son père, fait duc par Louis XIII, lui était particulièrement cher. Il était l'unique héritier mâle de ce père qui le conçut fort âgé d'un second lit. Il fut choyé par sa mère qui prit grand soin de son éducation mais se retrouvait après la mort de son mari sans appui dans le monde. Soucieuse de l'avenir, elle craignait plus que tout une mésalliance de son fils. Heureusement, le désormais duc de Saint-Simon n'était point galant et ressentait trop la fierté de son nom pour se laisser entraîner dans une passion amoureuse qui eût été une impasse à sa carrière. Une anecdote mérite d'être relevée à ce sujet sur le prétendant un peu présomptueux qu'il fût. A la recherche du meilleur parti, il ambitionna dans un premier temps de s'introduire dans la famille du duc de Beauvilliers, s'adressa à lui pour courtiser l'une de ses filles, tenta tout pour le convaincre et, en désespoir de cause, lui avoua qu'il ne se sentait « point capable de vivre heureux avec une autre qu'avec sa fille », fille qu'il ne connaissait pas et n'avait jamais vu ! le duc de Beauvilliers, dont il resta proche, déclina poliment, et Saint-Simon se tourna alors vers la famille de Lorges et ses filles, l'aînée plutôt que la cadette, avec qui il se maria et réussit à vivre heureux, malgré tout.
Au reste, le duc de Saint-Simon n'était pas trop bavard sur sa vie intime, préférant relater celle des autres. Dans cet étrange petit monde qu'était la cour de Versailles, où tout était réglé dans les moindres détails et où la vie intime se limitait au strict minimum, les ragots allaient bon train et Saint-Simon en était friand, il les rapportait sans toujours bien les distinguer des faits. D'ailleurs, il n'était pas qu'un observateur de ce petit monde mais aussi un acteur, avec son tempérament, ses affinités et ses dégoûts, et il ne cherchait pas du tout à atteindre une impossible objectivité. Avec sa manière très particulière de brosser les portraits et les caractères, lapidairement, défauts et qualités enchevêtrés, il cherchait surtout à dévoiler les mesquineries et les petites intrigues des courtisans.
Imprégné de morale, il restait discret sur la religion, ne s'immisçant jamais dans les querelles qui agitaient la fin du dix-septième siècle, et elles étaient nombreuses, entre la petite crise religieuse de Louis XIV sous l'influence de Mme de Maintenon et du père de la Chaise son confesseur, la révocation de l'édit de Nantes, l'accession au pouvoir des protestants en Angleterre, les jansénistes, les quiétistes, les polémiques et les affrontements ne manquaient pas. Toutefois, sans bigoterie ni ostentation, il ne cachait pas sa profonde admiration pour Armand-Jean de Rancé, l'abbé de la Trappe, qui était pour lui une sorte de directeur de conscience, un homme intègre jusqu'à l'austérité. Aussi, contrairement à Louis XIV, Saint-Simon semblait éprouver de la sympathie pour les jansénistes et n'hésitait pas à dénoncer les manigances et les intrigues des jésuites.
Au niveau de la politique extérieure, cette fin de siècle était dominée par la grande rivalité de la France et du Saint-Empire. Entre la guerre de la ligue d'Augsbourg et la guerre de succession d'Espagne qui se dessinait, la paix signée par le traité de Ryswick ressemblait plutôt à une longue mais fragile trêve.
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Le premier tome des Mémoires du duc de Saint-Simon fut une excellente découverte ! Un spectacle jubilatoire de la vie de cour, avec l'impression vertigineuse d'être aujourd'hui au sein d'une entreprise farcie de chefs et de courtisans. Tel ou tel personnage pourra vous évoquer telle ou telle connaissance et ses agissements serviles pour plaire en haut lieu. L'auteur, figure discrète et sensible dont l'oeil capte toutes les manoeuvres, les attitudes, nous dresse avec la passion du détail (vestimentaire notamment) un tableau historique éblouissant.
Tel diner où la mode était aux perruques hautes comme des buildings qui s'enflamment malencontreusement en frôlant la flamme des bougies. le contexte historique est difficile à appréhender mais les notes aident énormément le lecteur.
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La plus belle des langues, pour un texte vertigineux
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Le jeu était de chercher chez Saint-Simon (Folio tome 1) les personnages cités dans L'Echange des Princesses de Chantal Thomas. J'avais une idée toute faite de Saint-Simon, celle d'un aristocrate grincheux, envieux, d'un courtisan souffrant d'être évincé et se réfugiant dans une adoration continuelle du passé : tout était mieux avant. En fait c'est un vrai plaisir de lecture et pas seulement parce qu'on se plonge dans les potins de la Cour. La description des événements (sa mission en Espagne lorsqu'il va chercher les deux princesses), les portraits des contemporains sont d'une précision étonnante, l'analyse psychologique est très fine, la satire redoutable (c'est vrai que l'on pense à Proust qui admirait beaucoup Saint-Simon). Il est capable d'amitié et même de fidélité. C'est ce que l'on voit quand il parle du Régent, victime du pouvoir et de ceux qui l'entourent. « On a peine a comprendre à quel point ce prince était incapable de se rassembler du monde, je dis avant que l'art infernal de Mme de Maintenon et du Duc du Maine l'en eut totalement séparé, combien peu il était en lui de tenir une cour, combien avec un air désinvolte il se trouvait embarrassé et importuné du grand monde, et combien dans son particulier, et depuis dans sa solitude au milieu de la cour, quand tout le monde l'eut déserté, il se trouva destitué de toute sorte de ressource avec tant de talents qui devaient être une inépuisable d'amusements pour lui ». L'oeuvre est immense. Difficile d'en faire le tour. Il s'agit pour lui de tout raconter, de tout décrire de ce monde de déréliction destiné à passer. Tout est dit dans l'Avant-propos.
« Ecrire l'histoire de son pays et de son temps, c'est repasser dans son esprit avec beaucoup de réflexion tout ce qu'on a vu, manié, ou su d'original sans reproche, qui s'est passé sur le théâtre du monde (…) ; c'est se montrer à soi-même pied à pied le néant du monde, de ses craintes, de ses désirs, de ses espérances (…) ; c'est se convaincre du rien de tout par la courte et rapide durée de toutes ces choses, et de la vie des hommes ; c'est se rappeler un vif souvenir que nul des heureux du monde ne l'a été et que la félicité ni même la tranquillité ne peut se trouver ici-bas (…) ».
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C'est un auteur et un livre dont j'avais tellement entendu parler que j'ai voulu savoir de quoi il s'agissait exactement. En fait, le duc de Saint-Simon est un fin observateur (en plus d'en être l'acteur) de le vie à Versailles, au temps de Louis XIV et de sa cour. Les rituels, les évènements, petits ou grands, les manigances des uns et les turpitudes des autres n'ont pas de secret pour lui, et c'est un régal. Bien sûr, il aborde l'histoire de personnages parfois peu illustres, mais c'est avec une telle acuité qu'on ne peut que se prendre au jeu. Il convint également d'ajouter que tout cela est rédigé dans un français parfait, en tous cas celui de l'époque bien que, il est vrai, pas toujours compréhensible 250 ans plus tard.
A lire absolument, au moins le premier tome.
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L'indispensable livre de chevet.
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