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sur 390 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
James Salter, un grand écrivain américain méconnu car peu prolifique, fait parler de lui en cette rentrée 2014 avec son dernier roman "Et rien d'autre", mais tous s'accordent à reconnaître que son chef-d'oeuvre fut, en 1975, "Lights years", curieusement traduit en français "Un bonheur parfait", où déjà le passage du temps, tel qu'il laisse ses traces dans la mémoire des survivants, reste le thème principal du livre.
On pourrait l'intituler aussi "Vie et mort d'un mariage", si ce n'était pauvre et réducteur. Viri et Nedra ont fondé une famille heureuse, et vivent avec leurs deux filles, Franca et Danny, encore enfants au début du récit, au bord de l'Hudson, non loin de New York où le père de famille travaille comme architecte. Mais la maison au bord de l'eau, c'est le foyer, le refuge, le cadre où s'épanouit le bonheur d'être ensemble, sans bien sûr qu'on en ait parfaitement conscience, même si des instants de grâce s'inscrivent pour jamais dans les esprits. Certes ni Viri, ni Nedra ne sont très fidèles, au vu et au su de leur conjoint, mais ils forment cependant une alliance solide et épanouissante dans l'amour commun de leurs filles et de leur mode de vie confortable d'intellectuels protégés. le couple reçoit amis et proches, sa vie sociale est pleine et enrichissante.
Les failles dans cette stabilité ne se feront sentir que peu à peu, au fil d'une vie commune qui subira le passage du temps : les enfants s'acheminent vers l'âge adulte, l'insatisfaction de Nedra va progressivement s'exprimer davantage, les signes imperceptibles du vieillissement altèrent la surface lisse des jours et des visages, quand finalement le couple se défait pour ne plus jamais retrouver l'harmonie perdue.
Roman d'une vie, avec son bonheur pleinement vécu mais méconnu, avec l'usure des êtres, avec le contraste insaisissable entre les jours heureux et la nostalgie mélancolique de l'âge mûr et des chances perdues, "Light years" est écrit sans continuité narrative. Salter s'inquiète peu de créer des situations dramatiques ou de construire une intrigue, il peut laisser en plan un personnage, changeant souvent de point de vue et valsant avec les identités et les interlocuteurs. Mais loin d'être une gêne pour la lecture, ce puzzle de notations diverses crée une impression d'ensemble, qui livre la vérité de ces êtres dans une élégie élégante et discrète.
Une belle lecture, un moment de plaisir et d'émotion, surtout en V.O.
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Nedra et Viri forment un couple parfait. Lorsqu'on les découvre à l'automne 1958, avec leurs deux petites filles, Franca et Danny, ils vivent dans une maison dans la campagne des environs de New York. Viri est architecte, c'est un homme élégant et un formidable raconteur d'histoires. Nedra est une femme au foyer aussi belle que vive. le couple reçoit beaucoup et sort aussi avec la bonne société new-yorkaise. Ici, on boit des grands vins, on mange de bons fromages, on rêve d'Europe, on parle de littérature et de théâtre. Nedra et Viri ne sont pas riches mais vivent bien et se nourrissent l'un de l'autre, de leurs filles, de leurs amis. « C'est une vie intelligente. Elle est harmonieuse. » leur dit leur ami Arnaud.

Pourtant, ainsi que le dit Viri « En réalité, il existe deux sortes de vie […] : celle que les gens croient que vous menez, et l'autre. Et c'est l'autre qui pose des problèmes, et que nous désirons ardemment voir. »

C'est cette autre vie que dévoile James Salter à travers le parcours de Nedra et Viri, de cet automne 1958 jusqu'à quelques décennies plus tard. En pénétrant l'intimité du couple, il dévoile les accrocs sur cette toile qui semble si parfaite, vue de loin. C'est le regard de Kaya dont Viri tombe amoureux, le charme de Jivan avec lequel Nedra entretient une relation. Ce sont aussi les aspirations de l'un et de l'autre. L'attachement de Viri à Nedra et à leur vie ; peut-être un bonheur imparfait mais dont il choisit de s'accommoder. le désir de liberté de Nedra, ses rêves d'ailleurs et d'une autre vie. Les accrocs laissent place à des déchirures et la toile se délite, usée autant par ces anicroches que par le temps qui passe et qui même file, s'échappe.

Ce sont donc ces vies que raconte James Salter en mettant en scène les actes et en fouillant les pensées de ses personnages. Cela pourrait apparaître comme une longue litanie de renoncements, de blessures, de bonheurs plus ou moins fugaces, mais Salter, par la grâce d'une prose lumineuse, leur donne une portée bien plus grande. Plus que les vies de Nedra et Viri, c'est l'usure du temps, qui marque les corps, émousse les sentiments, qu'il décortique ici avec la cruelle acuité de celui qui sait que nul n'y échappera.

Terriblement mélancolique, Un bonheur parfait est certainement, à sa manière une oeuvre pessimiste tendue vers l'idée que tout finit par disparaître de nos vies et de ce qui les constitue. C'est pourtant, pour ce qu'il dit des satisfactions que l'on peut trouver dans la recherche du bonheur, des sentiments ambivalents que suscitent les échappées à un quotidien vécu à la fois comme un carcan et un cocon, un roman lumineux et, surtout, d'une grande justesse. Quelque chose que résument à la perfection ses premières lignes, comme une allégorie de l'histoire à venir et de la vie :

« Nous filons sur le fleuve noir, aux bas-fonds lisses telle la pierre. Pas un bateau, pas un canot, pas le moindre éclat blanc. La surface se craquelle, traversée par le vent. L'estuaire est vaste, infini, les eaux saumâtres, bleuies par le froid. le flot se trouble. Les oiseaux de mer planent, et tournoient avant de disparaître. Rêve du passé, franchi en un éclair. Après les hauts-fonds, l'eau s'éclaircit, moins profonde, sur notre passage : barques tirées au sec pour l'hiver, embarcadères déserts. Ailés comme les mouettes, nous nous élançons dans les airs, faisons volte-face. »
Lien : http://www.encoredunoir.com/..
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Je ne suis pas fan des critiques journalistiques sur les couvertures de livre mais celle du Point est assez juste en ce cas : "James Salter est un maître".
L'écriture de cet auteur est merveilleuse, ce n'est pas tant le récit_ qui est tout de même un tour de force de résumer deux vies dans leur presque intégralité en 400 pages_ que le style de caractérisation de chaque détail des pièces, des actions, des souvenirs, des sensations des personnages.
C'est très fort et plein de maestria, encore une fois.
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Lu et relu. Très très grand livre. Un de ceux que j'emmenerais sur une île déserte. Roman qui prouve que la littérature, c'est d'abord les mots (pas les histoires).
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Une écriture d'une netteté confondante. Précise comme les touches d'un Vermeer. Ce n'est pas un roman sur la vie, c'est la vie elle-même qui défile sous les yeux du lecteur.
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J'ai lu ce livre il y a longtemps et je ne me souviens pas précisément de l'intrigue (une famille américaine idéale, la femme adultère, la décomposition du foyer...) donc je ne m'aventurerai pas plus avant puisque j'ai tant de choses à lire avant de relire cette merveille. Ce qui m'en reste en revanche, c'est une sensation d'éblouissement. le style de l'auteur, simple et beau comme une évidence (génuflexion pour le traducteur itou), son installation sensuelle dans la psyché d'une femme, son observation acide de l'american way of life, beaucoup de noirceur sous les apparences idéales, et au final une appréhension de la vie de couple qui donne à méditer et, si on aime malgré tout l'idée de passer sa vie avec quelqu'un, à lâcher prise.
Et quelle écriture mon dieu! je ne sais pas ce que j'attends pour me taper les autres livres de Salter. il y a tant de livres géniaux à lire dans nos toutes petites vies que c'en est désespérant.
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Un ouvrage formidable sur le passage du temps, ses effets, ses ravages bien souvent sur un couple en apparence idéal dont l'enthousiasme faiblit peu à peu. Les grandes aspirations disparaissent, les mesquineries se font jour, les corps lâchent peu à peu et pas un personnage n'y échappe, les animaux mêmes sont frappés de ce phénomène. Un récit qui résonne longtemps dans l'esprit du lecteur.
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J'avais beaucoup aimé "Un sport et un passe-temps". Ici, la profondeur de champ est plus importante, puisqu'on voit se dérouler, se déliter, se renouveler la vie d'une famille, depuis l'enfance des petites jusqu'à la tentative de fuite de l'épouse.

Une écriture éblouissant, des notations fulgurantes. Parfois, on se demande (en tout cas moi) si Salter "voit" comme il écrit, ou si son style magnifique est un peu fabriqué... qu'importe, le résultat, même traduit, est sidérant. Les atmosphères et les personnages demeurent présents, longtemps.
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Un couple, l'amour qui s'en va tout doucement, malgré que ce soit triste c'est beau, et que c'est vrai. Une ecriture magnifique on ne le lache pas et quand on le referme on voudrait revivre ce moment..
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Un homme, Viri, sa femme, Nédra, leurs deux filles, France et Danny. Il est architecte, elle est belle, puissante, capricieuse. Elle le trompe avec un jeune libanais, il en fait autant avec une de ses collègues. Il aime sa femme, elle s'ennuie, elle veut être libre. Ils reçoivent des amis dans leur vaste maison à distance de New York au bord de l'Hudson. Ils préparent des plats raffinés, boivent de grands vins français. James Salter rend des personnages mystérieux, ils nous paraissent profonds mais nous n'avons que quelques pièces de leur puzzle. Les histoires ne sont pas continues, les éléments que JS nous donnent ne collent pas avec ce qu'il advient. le lecteur est surpris mais ferré, soucieux de comprendre. Un livre à relire pour mieux assembler le puzzle et jouir de l'atmosphère voluptueuse, perverse créée par JS. Poétique, magnifique, chef d'oeuvre.
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