Sentiment étrange que procure cette lecture. Emballé par le fond et impressionné par le style très châtié (gardez le Littré à portée de main pour revoir les définitions de : amphigourique, aboucher, térébrant, mutique, irréfragable, etc), je n'ai pourtant jamais été totalement transporté par ce récit qui gagnerait beaucoup à se conclure plus rapidement : c'est dans les dernières pages que les questions trouvent des réponses, que les hypothèses sont vérifiées, que le style devenu moins diffus permet enfin à l'histoire moins confuse de donner vie aux personnages. Et jusqu'à ce dénouement, on se demande bien où l'auteur veut nous amener et si ce ne sont pas là que les élucubrations plus ou moins métaphysiques d'un djédi (un grand-père). le contexte politique, important dans cette histoire de "Mafiosa" transposée à Alger, est supposé connu, ce qui peut laisser le lecteur novice sur le sujet (Alger avant et après la guerre) un peu incrédule et renforce ce sentiment d'imprécision, d'un récit flou et vague. Restent tout de même quelques belles pages, comme celles-ci : "De ton Islam tout blanc, très vénérable et festif, ils ont tiré un breuvage de sang et d'amertume et s'en soûlent comme jamais mécréant ne l'a fait avec son impiété" (page 35) ou "C'est peut-être une loi essentielle de la vie qui veut que l'homme efface son histoire première et la reconstitue de mémoire comme un puzzle impossible, dans le secret, à l'aune de son expérience et après bien des questionnements et des luttes, ainsi et seulement ainsi il peut faire le procès du bien et du mal, ces forces qui le portent dans la vie sur le chemin de son origine" (page 225).
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Un pan de l'histoire algérienne révélé dans la dignité par un fils de. à l'identité éclatée dans tous les sens du terme. Une charge sans concession qui réhabilite l'homme en condamnant un système. Sansal soulève le couvercle au dessus de la marmite dans laquelle mijote la fabrique à mythes dans les coulisses des histoires familiales ou nationales. ça grouille de mille mensonges et de non-dits qui étouffent l'individu. Au final, du miasme et des diktats, le salut vient de la littérature grâce à ces êtres qui affrontent la vérité avec des mots. le fils de P. acquière alors le statut d'homme à part entière, le seul doté d'une conscience alors que les autres se contraignent ou se soumettent à jouer un rôle pour échapper au regard de leur conscience.
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Ce roman m'avait été présenté comme le récit d'enfance d'un petit gars, entre la protection d'une richissime matrone, tenancière de bordel,et les quartiers populaires d'Alger... Je m'attendais à quelque chose de plus "truculent", genre "la vie devant soi"... Finalement c'est un texte intéressant, j'ai beaucoup appris sur l'Algérie de la seconde moitié du 20ème siècle et le thème de l'émigration et des racines est bien traité, mais qui manque d'énergie, de passion. Avec tout ce qu'il a vécu, le narrateur pourrait nous entraîner dans une véritable tornade émotionnelle, mais non... Il pose un regard presque froid sur cette histoire assez démentielle. Alors on poursuit sa lecture parce que l'histoire est intéressante et le style pas désagréable (malgré l'emploi assez régulier de termes un peu "capillotractés") mais on n'est pas transporté, dommage.
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