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On est dans la première décennie de l'an 2000, à l'ère Poutine, dans un chef-lieu de la province russe. Nikolaï Mikhaiovitch Eltychev est parvenu, à la fin d'une longue liste d'attente, et après une lutte sérieuse, à obtenir un poste considéré comme un bon filon: officier dans un dessoûloir. Même là, plumant les ivrognes, il fait des affaires, bien que dérisoires comparées aux grosses, qui si réussit auraient pu changer son destin. Mais lui ce tournant il l'a raté, et à cinquante ans, il n'est guère satisfait de sa situation. Il s'ennuie au boulot, sa femme empâtée ne lui plaît plus, un de ses fils est en taule, l'autre bon à rien . Mais le pire reste à venir. Commettant une faute professionnel burlesque il va même finir par perdre son boulot ennuyeux et devoir quitter son appartement de fonction......
Eltychev n'ayant nul part où aller, condamné en sursis, emménage avec fils et femme chez la tante de cette dernière, dans le village où celle-ci a grandi. Une vie des plus difficiles les y attend. Accumulant les erreurs, débute alors pour eux un lent processus de dégradation.
A travers l'histoire de cette famille ordinaire, Sentchine né en 1971 dans la république de Touva, et sa famille ayant dû quitté la ville pour une situation précaire dans un village près de Krasnoiarsk en 1993, raconte la vie misérable post-soviétique en province. Une vie minée par l'alcool, la pauvreté et l'absence de travaille, dans un monde sans foi ni loi, qui semble loin d'être de la fiction.

Les personnages de Sentchine sont peu sympathiques, sauf la formidable vieille tante Tania, qui non seulement les accueille mais aussi à son âge avancé leur rend service. Est-ce la misère qui les rendant si vulnérables, les obligent à oublier tout moral, tout respect pour soi et les autres, annihilant le moindre sentiment humain ?
La prose de Sentchine accentue encore plus cette perte d'humanité, en décalant la suite ou résultat des événements graves, comme si ce qui vient de se passer était tout à fait normal. J'ai trouvé le processus excellent.

Considéré comme l'un des représentants du nouveau réalisme russe, Sentchine dont je viens de lire son deuxième roman nous livre une fresque très noire de la province russe contemporaine. Et à ce qu'il parait ce livre ayant rencontré un très grand succès en Russie, les Eltychev sont en voie de devenir des emblèmes de ces habitants des villes et des villages éloignés de la capitale. Un livre intéressant qui se lit facilement , que je conseille à tout ceux ou celles qui s'intéressent à la Russie de Poutine.

“De nombreux écrivains ont envie de raconter ce qui se passe dans leur ville, dans leur village et ces documents artistiques font parfois découvrir aux lecteurs des réalités inconnues de leur propre pays.” (R.Sentchine)
 
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Au début des années 2000, dans un chef-lieu de province russe, les Eltychev mènent leur petite vie. Une vie monotone, sans grand train, luxe ou relief, mais ils s'en tirent à bon compte, avec un toit et du travail, de quoi se chauffer et se nourrir. Ils n'en demandent guère plus, ou alors il aurait fallu faire des choix plus audacieux, mais pour cela il est trop tard. Nikolaï, le père, est officier de police dans un dessoûloir (un commissariat où sont amenés les poivrots raflés dans les rues, pour les faire dégriser et, tant qu'à faire, leur faire les poches ni vu ni connu). Une bonne planque, donc. Valentina, sa femme, travaille à la bibliothèque municipale. Certes, leur fils aîné est en prison et le plus jeune est un fainéant de classe mondiale, mais il ne faudrait pas trop se plaindre.
Et puis un jour cette stabilité vole en éclats, et la vie des Eltychev s'effondre. Une bavure au commissariat, et Nikolaï perd son emploi et leur appartement de fonction. Pour ne pas se retrouver à la rue, la seule solution est d'aller s'installer à une cinquantaine de kilomètres de la ville, au village natal de Valentina, dans la misérable isba de sa vieille tante. C'est le début d'une longue et lente chute, d'un hiver à l'autre, dans une région sinistrée par le chômage et la pauvreté, ravagée par l'alcool. Les bonnes intentions (trouver du travail, retaper la maison) ne font pas long feu face à la précarité et à la médiocrité ambiantes. Arnaques, coups bas, jalousie, vols, violence, aucune morale, aucune solidarité, aucune amitié, aucune compassion entre les habitants, dont l'alcoolisme semble le seul point commun. Les Eltychev n'échappent pas à ce processus de déshumanisation implacable. L'alcool aidant, le moindre sursaut de volonté se transforme en inertie et en fatalisme, face au vide et à l'ennui abyssaux qui écrasent tout espoir.
"Roman de la province russe" post-soviétique, "Les Eltychev" raconte la glissade d'une vie ordinaire assez médiocre vers une vie misérable et ignoble. Un roman peu réjouissant, donc, à ne pas lire si on n'a pas trop le moral. C'est d'autant plus effarant qu'il est très réaliste, et décrit parfaitement la dégringolade morale des personnages, qui peu à peu finissent par accepter des choses qui leur étaient pourtant inacceptables auparavant, et par perdre tout respect pour eux-mêmes. le style est limpide, entre réflexions, descriptions et dialogues, les chapitres sont courts et alternent les points de vue des personnages. Un très bon roman sur la Russie d'aujourd'hui, et je remercie chaleureusement Bookycooky de me l'avoir envoyé :-).
Lien : https://voyagesaufildespages..
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Le récit
J'avais envie de lire de la littérature russe contemporaine.
"Les Eltychev" dépeint cette société laissée de côté par les grands changements survenus.
Il n'est pas question de gens importants, ni gens s'étant enrichis grâce au passage au système capitaliste, ni même de gens habitant en ville.
Passé les premiers chapitres, les Eltychev sont contraints de partir à la campagne.

Ce n'est pas un retour à la nature ! C'est au contraire subit et sans issue.
Les hivers sont rudes, les printemps et automnes sont pluvieux. Seul l'été est bénéfique. Mais ce bref intermède laisse de moins en moins d'empreintes dans le récit.

Le village est loin de la ville. Aucun travail. Tous les villageois sont en mode survie.
Peu de solidarité entre villageois : on se méfie, on se jalouse, on se vole, on se tue, mais on boit ensemble.
L'alcool est un des thèmes récurrents du roman. Elle fait des ravages.

La famille n'est pas d'un grand secours : pas de proches. Les relations entre le père, la mère et les deux enfants sont entachées de reproches. Chacun reprochant aux autres de les avoir conduits dans cette impasse.

Les Eltychev sont comme prisonniers de leur propre sort.

C'est une lecture éprouvante. Non pas par un manque qualité du récit, mais par cette lente, mais inexorable descente vers une fin.
Ce n'est pas forcément un livre à lire en automne lorsque l'hiver approche !

Le fond

Le roman alterne la narration des différents membres de la famille Eltychev.
Le style est limpide. Il alterne descriptions, dialogues et réflexions avec le bon dosage.
Pas d'envolées poétiques dans ce récit (nous ne sommes pas dans un Zola qui prend lui des libertés avec le réalisme).
Le réalisme de Roman Sentchine est implacable.
Quelques blancs arrivent à point nommé pour ne pas tomber dans le sordide.

Proximité

Ce roman est assez proche de "La route" de Cormac Mc Carthy. Les rapports humains sont durs. le quotidien, la nourriture, le froid prennent beaucoup de place dans la vie des protagonistes. À l'inverse de la route cependant les Eltychev se sentent beaucoup plus moralement que physiquement acculés.

Je peux aussi faire un parallèle avec "Le tombeau des lucioles".
Le roman est d'un style d'écriture trop différent, mais film et roman racontent aussi cette descente vers la mort. Dans le tombeau des lucioles, il reste encore cet amour entre frère et soeur.
Lien : http://travels-notes.blogspo..
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Un récit sombre, d'un réalisme inexorable, pour nous conter l'histoire d'une famille et de sa descente aux enfers, de la perte d'emploi, puis de logement jusqu'à la déchéance finale. Je n'ai pas trouvé le moindre lien entre l'histoire et la couverture du livre : dans la première édition française et dans les différentes éditions russes la couverture suggère la campagne, le monde rural, mais là … mystère total ! le style de Roman Sentchine est agréable, limpide, l'auteur alterne les points de vue des différents protagonistes de manière bien équilibrée. Mais c'est une lecture éprouvante, un peu comme les livres de Joyce Carol Oates ou comme Betty ou bien Là où chantent les écrevisses, mais sans la moindre note d'espoir, sans happy end ou tout au moins une fin un peu ouverte !
Les Eltychev se retrouvent acculés d'impasse en impasse : le père perd son emploi pour faute grave (la faute en question est assez cocasse) et donc son logement de fonction. La mère, originaire d'un village à une cinquantaine de kilomètres de là, propose d'aller habiter dans l'isba de sa vieille tante. Ce qu'ils font, accompagnés de leur fils aîné adulte. Il n'y a pas beaucoup de place dans cette maison. le cadet les rejoindra plus tard, quand il sortira de prison. Dans la famille Eltychev, il n'y a pas un personnage pour rattraper l'autre, impossible d'éprouver vraiment de l'empathie pour l'un deux, c'est tout juste si l'on a envie de plaindre un peu plus les deux femmes, la vieille tante ainsi que la mère. Leur retour à la nature est tout sauf une partie de plaisir, impossible de trouver un travail, les hivers sont terribles et surtout l'été, seul moment où il est possible de construire une nouvelle maison, est très court et que c'est aussi le moment de faire toutes sortes de provisions pour l'hiver… Sans compter qu'il n'y a aucune solidarité villageoise. Nous sommes au début des années 2000, une période de transition où les russes ont le droit de bâtir eux-même leur maison, mais où il n'y a guère de moyens légaux d'acheter les matériaux, où l'on pose des compteurs d'eau et interdit de se brancher sur les bornes fontaines, alors que dans le fin fond de la campagne aucune maison n'a l'eau courante. Des villages comme celui-là il y en a énormément en Russie, même s'il est faux de dire qu'à la campagne c'est toujours comme ça. On peut noter que dans le village aussi tout se dégrade à toute vitesse : accès à la télé, accès à l'eau, club de loisirs, ... le père, contrairement au fils aîné, a des projets mais on a l'impression que chaque espoir n'est là que pour qu'il se prenne une claque, et cela, saison après saison, jusqu'à la fin ! le fils aîné est une vraie tête à claques qui manque totalement de personnalité et de caractère, quand aux autres villageois on n'aimerait pas les croiser en rentrant chez soi le soir. Il faut dire qu'il y a aussi beaucoup d'alcoolisme, et cela accompagne bien sûr la dégringolade des Eltychev. C'est sordide, mais les scènes les plus sordides ne sont que suggérées.
Cet oeuvre est un peu dans l'esprit de la littérature villageoise soviétique des années 70-80, mais sans l'image idéalisée du village (encore que personnellement je n'ai jamais trouvé que cette littérature idéalisait tant que cela la campagne, en tout cas, pour les oeuvres que j'ai lu : La maison de Matriona, Les adieux à Matiora, Chronique de Pékachino) Il y a très longtemps que je voulais lire Les Eltychev qui a eu un grand succès en Russie, et je ne regrette pas de l'avoir lu quasi en même temps que Dans les forêts de Sibérie de Sylvain Tesson qui rééquilibre un peu les choses et évite de sombrer dans la dépression.
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Un livre qui nous plonge au coeur de la vie des habitants de "province profonde" de la Russie et qui n'est pas sans rappeler tout à la fois "La fin de l'homme rouge" et, moins connu hélas, "Ma province" d'Ossipov: un livre donc noir voire empli de désespérance, d'un ennui, d'un vide tels qu'ils sont noyés dans un alcoolisme morbide, ce "fléau national" qu'évoque Ossipov en sa qualité de médecin.

L'auteur ici souligne, accentue toutes ces plaies, tous ces drames, toutes ces réalités auxquels tous ces habitants sont confrontés au quotidien.

Il se dégage, au final, de ce roman on ne peut plus réaliste une quasi-acceptation de cette vie par ces gens tel un fatalisme.
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Point de folles aventures ni de rebondissements haletants dans Les Eltychev : rien que la description de l'effondrement d'une famille, suite à une faute professionnelle commise par le père. Il s'agit d'une famille moyenne, ordinaire, provinciale, qui tente de suivre les évolutions d'une société qui a tendance à oublier les gens comme eux.
Tout au long de ce "roman de la province russe", l'auteur décrit non sans humour la réalité de la vie à la campagne, les jalousies, les coups bas, l'espoir qui surgit parfois - mais guère longtemps.
Si le récit peut parfois sembler traîner en longueur, on s'aperçoit vite qu'il ne fait qu'adopter le rythme de la vie des personnages, souvent longue et monotone.
En bref, il s'agit d'un roman indubitablement réaliste, à ne pas mettre entre les mains d'un lecteur dont le moral ne serait pas au beau fixe !
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Certes il s'agit d'un ouvrage écrit par un russe, qui décrit l'évolution régressive d'une famille russe, en Russie contemporaine... Mais, ce livre doit être lu comme l'histoire universelle de toute personne, toute famille qui n'a pas anticipé quoi que ce soit, et qui, une fois dans la mouise, attend que la société (et/ou les addictions !!!) vienne à son secours (ou lui permette d'oublier !!!)... Savoir Bricoler et Jardiner, savoir tout optimiser en fonction de la situation et du contexte, Savoir se Mobiliser, (s')Entraider... seraient des gestes qui sauvent ??? Ah bon...!!! Tiens donc ! Mais alors, il faudrait peut-être "Allumer le cerveau qui regarde le présent en fonction du futur et à la lumière de l'expérience passée" plutôt que croire, espérer et attendre solution de la pensée magique... Ce serait meilleur ?!? Sachant que : Réfléchir, décider, Faire, agir, enclencher le système vertueux : le résultat n'est pas garanti... Mais ce qui est sûr !, c'est qu'attendre est mortifère... Victor Hugo nous disait : Ce qui vivent ce sont ceux qui luttent !!! Remontons les manches, ensemble on va plus loin...
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La famille Eltychev en voit de toutes les couleurs… entre gris clair et gris foncé !
Le père, policier dans le chef-lieu d'une province russe, se retrouve mis à la porte du jour au lendemain suite à une terrible bavure. Cet accident de vie est le point de départ d'un funeste engrenage : puisque Eltychev doit quitter son appartement de fonction, toute la famille se voit dans l'obligation de déménager à une cinquantaine de kilomètres de là, dans le hameau perdu dans lequel a grandi sa femme Valentina. S'installant dans la maison décrépie occupée par la vielle tante de Valentina, le couple tente en vain de trouver un emploi. le désoeuvrement, la pauvreté, les dégâts dus à une surconsommation de vodka constituent désormais le quotidien des Eltychev. Avec un fils ainé croupissant en prison et un cadet vivant aux crochets de ses parents, l'ambiance devient rapidement pesante. La descente aux enfers n'en est pourtant qu'à son commencement…

Traitant d'un sujet quelque peu déprimant mais néanmoins réaliste - il suffit de bien peu de choses pour qu'une vie bascule totalement ! - ce livre n'est pas totalement sombre pour autant. L'auteur pose en effet un regard un tantinet cynique sur ses personnages et sur la situation dans laquelle ils se trouvent. Aussi, sans aller jusqu'à prétendre que l'on rit à la lecture des 258 pages de cet ouvrage, il reste malgré tout une pointe d'ironie bien présente tout au long de ce roman très représentatif du réalisme russe : si la situation est désespérée, il est pourtant possible de s'en amuser. Alors sombrons, mais que ce soit avec le sourire !
Lien : http://cyclepoetique.over-bl..
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