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EAN : 9782882503190
258 pages
Les Editions Noir Sur Blanc (29/08/2013)
4/5   16 notes
Résumé :
"Si la vue de la terre noire et nue, des arbres pareils à des squelettes, n’avait rien de réjouissant, ils se sentirent encore plus mal à l’arrivée de la neige."

Les Eltychev, roman de la province russe, raconte la déchéance et la chute d’une famille ordinaire. Il est vrai qu’ils ne tombent pas de très haut… Le père, Nikolaï, est policier dans le chef-lieu de la province ; sa femme, Valentina, a péniblement réussi à s’extraire de son hameau perdu. Un ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
On est dans la première décennie de l'an 2000, à l'ère Poutine, dans un chef-lieu de la province russe. Nikolaï Mikhaiovitch Eltychev est parvenu, à la fin d'une longue liste d'attente, et après une lutte sérieuse, à obtenir un poste considéré comme un bon filon: officier dans un dessoûloir. Même là, plumant les ivrognes, il fait des affaires, bien que dérisoires comparées aux grosses, qui si réussit auraient pu changer son destin. Mais lui ce tournant il l'a raté, et à cinquante ans, il n'est guère satisfait de sa situation. Il s'ennuie au boulot, sa femme empâtée ne lui plaît plus, un de ses fils est en taule, l'autre bon à rien . Mais le pire reste à venir. Commettant une faute professionnel burlesque il va même finir par perdre son boulot ennuyeux et devoir quitter son appartement de fonction......
Eltychev n'ayant nul part où aller, condamné en sursis, emménage avec fils et femme chez la tante de cette dernière, dans le village où celle-ci a grandi. Une vie des plus difficiles les y attend. Accumulant les erreurs, débute alors pour eux un lent processus de dégradation.
A travers l'histoire de cette famille ordinaire, Sentchine né en 1971 dans la république de Touva, et sa famille ayant dû quitté la ville pour une situation précaire dans un village près de Krasnoiarsk en 1993, raconte la vie misérable post-soviétique en province. Une vie minée par l'alcool, la pauvreté et l'absence de travaille, dans un monde sans foi ni loi, qui semble loin d'être de la fiction.

Les personnages de Sentchine sont peu sympathiques, sauf la formidable vieille tante Tania, qui non seulement les accueille mais aussi à son âge avancé leur rend service. Est-ce la misère qui les rendant si vulnérables, les obligent à oublier tout moral, tout respect pour soi et les autres, annihilant le moindre sentiment humain ?
La prose de Sentchine accentue encore plus cette perte d'humanité, en décalant la suite ou résultat des événements graves, comme si ce qui vient de se passer était tout à fait normal. J'ai trouvé le processus excellent.

Considéré comme l'un des représentants du nouveau réalisme russe, Sentchine dont je viens de lire son deuxième roman nous livre une fresque très noire de la province russe contemporaine. Et à ce qu'il parait ce livre ayant rencontré un très grand succès en Russie, les Eltychev sont en voie de devenir des emblèmes de ces habitants des villes et des villages éloignés de la capitale. Un livre intéressant qui se lit facilement , que je conseille à tout ceux ou celles qui s'intéressent à la Russie de Poutine.

“De nombreux écrivains ont envie de raconter ce qui se passe dans leur ville, dans leur village et ces documents artistiques font parfois découvrir aux lecteurs des réalités inconnues de leur propre pays.” (R.Sentchine)
 
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Au début des années 2000, dans un chef-lieu de province russe, les Eltychev mènent leur petite vie. Une vie monotone, sans grand train, luxe ou relief, mais ils s'en tirent à bon compte, avec un toit et du travail, de quoi se chauffer et se nourrir. Ils n'en demandent guère plus, ou alors il aurait fallu faire des choix plus audacieux, mais pour cela il est trop tard. Nikolaï, le père, est officier de police dans un dessoûloir (un commissariat où sont amenés les poivrots raflés dans les rues, pour les faire dégriser et, tant qu'à faire, leur faire les poches ni vu ni connu). Une bonne planque, donc. Valentina, sa femme, travaille à la bibliothèque municipale. Certes, leur fils aîné est en prison et le plus jeune est un fainéant de classe mondiale, mais il ne faudrait pas trop se plaindre.
Et puis un jour cette stabilité vole en éclats, et la vie des Eltychev s'effondre. Une bavure au commissariat, et Nikolaï perd son emploi et leur appartement de fonction. Pour ne pas se retrouver à la rue, la seule solution est d'aller s'installer à une cinquantaine de kilomètres de la ville, au village natal de Valentina, dans la misérable isba de sa vieille tante. C'est le début d'une longue et lente chute, d'un hiver à l'autre, dans une région sinistrée par le chômage et la pauvreté, ravagée par l'alcool. Les bonnes intentions (trouver du travail, retaper la maison) ne font pas long feu face à la précarité et à la médiocrité ambiantes. Arnaques, coups bas, jalousie, vols, violence, aucune morale, aucune solidarité, aucune amitié, aucune compassion entre les habitants, dont l'alcoolisme semble le seul point commun. Les Eltychev n'échappent pas à ce processus de déshumanisation implacable. L'alcool aidant, le moindre sursaut de volonté se transforme en inertie et en fatalisme, face au vide et à l'ennui abyssaux qui écrasent tout espoir.
"Roman de la province russe" post-soviétique, "Les Eltychev" raconte la glissade d'une vie ordinaire assez médiocre vers une vie misérable et ignoble. Un roman peu réjouissant, donc, à ne pas lire si on n'a pas trop le moral. C'est d'autant plus effarant qu'il est très réaliste, et décrit parfaitement la dégringolade morale des personnages, qui peu à peu finissent par accepter des choses qui leur étaient pourtant inacceptables auparavant, et par perdre tout respect pour eux-mêmes. le style est limpide, entre réflexions, descriptions et dialogues, les chapitres sont courts et alternent les points de vue des personnages. Un très bon roman sur la Russie d'aujourd'hui, et je remercie chaleureusement Bookycooky de me l'avoir envoyé :-).
Lien : https://voyagesaufildespages..
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Un récit sombre, d'un réalisme inexorable, pour nous conter l'histoire d'une famille et de sa descente aux enfers, de la perte d'emploi, puis de logement jusqu'à la déchéance finale. Je n'ai pas trouvé le moindre lien entre l'histoire et la couverture du livre : dans la première édition française et dans les différentes éditions russes la couverture suggère la campagne, le monde rural, mais là … mystère total ! le style de Roman Sentchine est agréable, limpide, l'auteur alterne les points de vue des différents protagonistes de manière bien équilibrée. Mais c'est une lecture éprouvante, un peu comme les livres de Joyce Carol Oates ou comme Betty ou bien Là où chantent les écrevisses, mais sans la moindre note d'espoir, sans happy end ou tout au moins une fin un peu ouverte !
Les Eltychev se retrouvent acculés d'impasse en impasse : le père perd son emploi pour faute grave (la faute en question est assez cocasse) et donc son logement de fonction. La mère, originaire d'un village à une cinquantaine de kilomètres de là, propose d'aller habiter dans l'isba de sa vieille tante. Ce qu'ils font, accompagnés de leur fils aîné adulte. Il n'y a pas beaucoup de place dans cette maison. le cadet les rejoindra plus tard, quand il sortira de prison. Dans la famille Eltychev, il n'y a pas un personnage pour rattraper l'autre, impossible d'éprouver vraiment de l'empathie pour l'un deux, c'est tout juste si l'on a envie de plaindre un peu plus les deux femmes, la vieille tante ainsi que la mère. Leur retour à la nature est tout sauf une partie de plaisir, impossible de trouver un travail, les hivers sont terribles et surtout l'été, seul moment où il est possible de construire une nouvelle maison, est très court et que c'est aussi le moment de faire toutes sortes de provisions pour l'hiver… Sans compter qu'il n'y a aucune solidarité villageoise. Nous sommes au début des années 2000, une période de transition où les russes ont le droit de bâtir eux-même leur maison, mais où il n'y a guère de moyens légaux d'acheter les matériaux, où l'on pose des compteurs d'eau et interdit de se brancher sur les bornes fontaines, alors que dans le fin fond de la campagne aucune maison n'a l'eau courante. Des villages comme celui-là il y en a énormément en Russie, même s'il est faux de dire qu'à la campagne c'est toujours comme ça. On peut noter que dans le village aussi tout se dégrade à toute vitesse : accès à la télé, accès à l'eau, club de loisirs, ... le père, contrairement au fils aîné, a des projets mais on a l'impression que chaque espoir n'est là que pour qu'il se prenne une claque, et cela, saison après saison, jusqu'à la fin ! le fils aîné est une vraie tête à claques qui manque totalement de personnalité et de caractère, quand aux autres villageois on n'aimerait pas les croiser en rentrant chez soi le soir. Il faut dire qu'il y a aussi beaucoup d'alcoolisme, et cela accompagne bien sûr la dégringolade des Eltychev. C'est sordide, mais les scènes les plus sordides ne sont que suggérées.
Cet oeuvre est un peu dans l'esprit de la littérature villageoise soviétique des années 70-80, mais sans l'image idéalisée du village (encore que personnellement je n'ai jamais trouvé que cette littérature idéalisait tant que cela la campagne, en tout cas, pour les oeuvres que j'ai lu : La maison de Matriona, Les adieux à Matiora, Chronique de Pékachino) Il y a très longtemps que je voulais lire Les Eltychev qui a eu un grand succès en Russie, et je ne regrette pas de l'avoir lu quasi en même temps que Dans les forêts de Sibérie de Sylvain Tesson qui rééquilibre un peu les choses et évite de sombrer dans la dépression.
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Le récit
J'avais envie de lire de la littérature russe contemporaine.
"Les Eltychev" dépeint cette société laissée de côté par les grands changements survenus.
Il n'est pas question de gens importants, ni gens s'étant enrichis grâce au passage au système capitaliste, ni même de gens habitant en ville.
Passé les premiers chapitres, les Eltychev sont contraints de partir à la campagne.

Ce n'est pas un retour à la nature ! C'est au contraire subit et sans issue.
Les hivers sont rudes, les printemps et automnes sont pluvieux. Seul l'été est bénéfique. Mais ce bref intermède laisse de moins en moins d'empreintes dans le récit.

Le village est loin de la ville. Aucun travail. Tous les villageois sont en mode survie.
Peu de solidarité entre villageois : on se méfie, on se jalouse, on se vole, on se tue, mais on boit ensemble.
L'alcool est un des thèmes récurrents du roman. Elle fait des ravages.

La famille n'est pas d'un grand secours : pas de proches. Les relations entre le père, la mère et les deux enfants sont entachées de reproches. Chacun reprochant aux autres de les avoir conduits dans cette impasse.

Les Eltychev sont comme prisonniers de leur propre sort.

C'est une lecture éprouvante. Non pas par un manque qualité du récit, mais par cette lente, mais inexorable descente vers une fin.
Ce n'est pas forcément un livre à lire en automne lorsque l'hiver approche !

Le fond

Le roman alterne la narration des différents membres de la famille Eltychev.
Le style est limpide. Il alterne descriptions, dialogues et réflexions avec le bon dosage.
Pas d'envolées poétiques dans ce récit (nous ne sommes pas dans un Zola qui prend lui des libertés avec le réalisme).
Le réalisme de Roman Sentchine est implacable.
Quelques blancs arrivent à point nommé pour ne pas tomber dans le sordide.

Proximité

Ce roman est assez proche de "La route" de Cormac Mc Carthy. Les rapports humains sont durs. le quotidien, la nourriture, le froid prennent beaucoup de place dans la vie des protagonistes. À l'inverse de la route cependant les Eltychev se sentent beaucoup plus moralement que physiquement acculés.

Je peux aussi faire un parallèle avec "Le tombeau des lucioles".
Le roman est d'un style d'écriture trop différent, mais film et roman racontent aussi cette descente vers la mort. Dans le tombeau des lucioles, il reste encore cet amour entre frère et soeur.
Lien : http://travels-notes.blogspo..
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Point de folles aventures ni de rebondissements haletants dans Les Eltychev : rien que la description de l'effondrement d'une famille, suite à une faute professionnelle commise par le père. Il s'agit d'une famille moyenne, ordinaire, provinciale, qui tente de suivre les évolutions d'une société qui a tendance à oublier les gens comme eux.
Tout au long de ce "roman de la province russe", l'auteur décrit non sans humour la réalité de la vie à la campagne, les jalousies, les coups bas, l'espoir qui surgit parfois - mais guère longtemps.
Si le récit peut parfois sembler traîner en longueur, on s'aperçoit vite qu'il ne fait qu'adopter le rythme de la vie des personnages, souvent longue et monotone.
En bref, il s'agit d'un roman indubitablement réaliste, à ne pas mettre entre les mains d'un lecteur dont le moral ne serait pas au beau fixe !
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
A une époque, Eltychev s’etait posé beaucoup de questions sur la mort. Comment pouvait-on marcher, voir, entendre, penser, être ( semble-t-il) capable de tout faire, et soudain cesser d’exister ? Et hop, les ténèbres , un vide absolu.On n’a plus rien, on n’est plus rien. Rien qu’un morceau de chair avec des os, qu’il faut se dépêcher d’enterrer.
P.231
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Le carfard rôdait autour d'eux et, à la première occasion, dès qu'ils rêvassaient, se laissaient aller à leurs souvenirs, il fondait sur eux, les étouffait, les vidait du peu d'énergie qui leur restait
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Impossible de comprendre à quel moment la jeune fille à laquelle il restait littéralement scotché avait été remplacée par cet être ordinaire, indispensable, mais inintéressant. Sa femme
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Artiom l'avait invitée à danser, elle s'était étonnée un instant, mais cet étonnement contenait déjà son consentement, et son consentement à plus encore
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[.] la journée passait, inutile, superflue, fatigante. Chaque mouvement provoquait, non de la douleur, mais, pire encore, une '''nausée'''. [.] Pas la maladie, pas la faiblesse du corps, mais cette '''nausée'''. page 232.
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