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sur 4286 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
C'est un classique de la littérature d'horreur! Il faut avoir lu cette oeuvre, ne serait-ce que pour toutes les références ultérieures dans la littérature et au cinéma. C'est une oeuvre qui demeure très efficace, même encore aujourd'hui puisqu'elle fait appel à la fois à des craintes et à des espoirs propres aux hommes de toutes les époques.
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Cela fait un long moment que j'envisageais de lire cet ouvrage mais il a fallu cette semaine de vacances pour que je m'y mette et que je termine ce projet.
Je reste agréablement surprise par ce récit, qui ne ressemble en rien aux multiples adaptations cinématographiques. Je croyais tomber dans un roman gothique et plein d'horreur comme celui de Matthew Gregory Lewis (cf. l'article le moine) et je découvre au contraire une apologie des valeurs morales du XIXème siècle.
Victor Frankenstein, féru de sciences, se plonge dans des expériences obscures qui va créer un être difforme et gigantesque, un monstre doté de langage et de pensée. Horrifié par sa création, ce dernier rejette cette créature qui s'enfuit. Il va errer de village en village, chassé par les gens effrayés par sa laideur. Petit à petit, ce monstre va acquérir la parole et certaines valeurs morales en observant longuement une famille française exilée en Suisse. C'est par ce biais et par un ultime rejet qu'il réclame à son créateur la réparation de ses malheurs.
Si vous cherchez une histoire qui fait peur, passez votre chemin. Victor Frankenstein n'est pas le savant fou décrit dans les films ; au contraire il est dépassé par son oeuvre qui partait d'une bonne intention et tout au long de sa vie, il essaiera de détruire ce qu'il a malencontreusement créé. Ce roman est pétri d'observations morales : les limites de la science et donc la responsabilité qui en découle, le besoin de vivre en société pour toute créature humaine aussi difforme soit-elle, l'éducation morale et religieuse dont le socle est la famille qui est personnifié ici par les de Lacey, les origines de la violence et du mal. Pour moi, ce monstre (qui n'a pas de nom) n'est pas violent par plaisir mais par désespoir engendré par sa solitude et sa haine. L'auteur insiste sur le fait qu'il a besoin d'une compagne qui partagerait son existence et ses peines, qu'il souffre du rejet des autres particulièrement de son créateur et que ces actes sont dictés par l'abandon et l'absence d'amour.
Je risque de me répéter mais je le souligne encore: il y a beaucoup de considérations philosophiques et morales, un condensé des valeurs rigides du XIXème siècle naissant qui rendent cette lecture ardue et un peu vieillotte.
Le style d'écriture est riche bien que trop lourd et trop ampoulé sur plusieurs chapitres, avec un démarrage un peu lent pour les cent premières pages. Je m'y suis habituée progressivement et vers la fin, la succession des évènements depuis plus tragique et plus intéressante.
Bon, c'est un classique à découvrir et qui intéressera particulièrement les férus de littérature anglaise classique.
Lien : http://leslecturesdehanta.co..
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Mon avis :
Belle et grande surprise pour moi. J'ai beaucoup aimé ma lecture pourtant remplie de détails. Nous connaissons tous et toutes Frankenstein, certains ont lu l'histoire et d'autres connaissent de nom ou d'un film. C'est long mais c'est intéressant à suivre puisqu'au début nous avons des lettres (d'ailleurs je pensais que le roman était ainsi fait mais non) après quelques pages nous tombons dans un roman / une histoire.

J'ai toujours été intriguée par l'histoire et les connaissances en terme de classique. Je dois dire que je ne suis pas déçue ! le monstre qu'on pense et qu'on dit n'est pas réellement celui qu'on peut croire.

Je trouve cette lecture assez bouleversante.

Ce n'est pas un coup de coeur mais c'était vraiment une belle lecture.
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Si Frankenstein est considéré comme un récit horrifique lors de sa première publication, le 1er janvier 1818, il est surtout connu pour être précurseur du genre de la science-fiction. Mary Shelley signe un récit différent de ce qui existe dans le genre tant dans la construction que dans les codes du genre qu'elle redéfinit. Ainsi la narration épistolaire se construit sur la forme de récits-enchâssés dont le cadre ne sert qu'à recueillir le récit de Victor Frankenstein qui comprend également la narration faite à ce dernier par la créature qu'il a créé. Et quelle créature! A peine née, rejetée par son créateur, elle se retrouve livrée à elle-même et à la cruauté des hommes qui ne voient pas plus loin que l'apparence: un monstre répugnant fait de l'assemblage de pièces provenant de différents corps. La description reste assez sommaire, l'auteure reste aussi évasive sur l'aspect réel de la créature que sur sa construction, laissant ainsi toute liberté au lecteur d'imaginer sa propre représentation. Bien sûr on aurait tôt fait de se figurer Boris Karloff qui fut la créature en 1933 dans le film de James Whale, pourtant la peur qu'elle suscite nous laisse entrapercevoir toute l'horreur de son apparence. Rapidement la créature fascine par sa curiosité, son intelligence et ses émotions très humaines. Rejetée de tous, elle n'aura de cesse de chercher à se venger de ce créateur qui l'a cruellement abandonné, devenant le monstre que tous voient en elle. Et la question tombe tout naturellement: qui est le monstre de la créature ou de son créateur?

Frankenstein n'est peut-être pas le classique qui a le mieux vieilli, souffrant notamment de quelques longueurs, mais il n'en reste pas moins captivant dans son cheminement sur la création de la vie, et son questionnement des limites (entre le monstre et l'homme, le bien et le mal, la vie et la mort…).
Lien : https://sirthisandladythat.c..
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"Tu m'a donné des émotions sans me dire comment m'en servir".

La science contient deux composants, l'ordre et le désordre.

L'ordre traverse le temps à vitesse constante, en reproduisant ses règles récurrentes, à de jeunes esprits formatés pour l'entretien d'une seule pensée.

Rien ne bouge, rien ne change.

Le désordre intolérant et novateur, conteste la formation de ses maîtres en bouillonnant d'une imagination euphorique et intuitive.

Frankenstein, Phaéton solitaire et débordant d'enthousiasme, se laisse emporter par des théories ne maitrisant plus le moindre impact rationnel.

On ne voit que son concept, sans s'apercevoir que celui-ci n'est qu'un boomerang programmé pour percuter en retour un nouveau penseur galopant comme un cheval fou sur des luminosités trompeuses.

La fougue et l'état second d'un savant devenu hors contrôle, ne donne naissance qu'à un aggloméré de chair et de sang, ne correspondant pas aux critères de la vie.

Le faciès est repoussant, le geste brusque, l'environnement découvert ne possède aucune similitude avec un être constitué de toute la désespérance humaine.

Inapte aux rencontres, sa finalité ne lui montre que son atroce différence conduisant vers la vengeance, une créature carbonisée par la souffrance, laminant de reproches son créateur.
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Le Frankenstein de Mary Shelley fait certainement partie des romans qui, dans l'histoire littéraire, ont véhiculé le plus d'images, de fantasmes, nourri le plus l'imagination des lecteurs et inspiré celle des auteurs. Pourtant, aujourd'hui, ce livre fondamental, dans le sens propre du terme, est très peu lu. Raison la plus souvent invoquée ? C'est un bouquin d'horreur désuet, au style démodé. Rien n'est plus faux.

Sans Frankenstein de Shelley, sans Dracula de Bram Stoker, et sans les Nouvelles d'Edgar Poe, la littérature contemporaine ne serait pas la même. Ces auteurs ont, à eux trois, créé des mythes, inventé un genre, défini des règles. Frankenstein, c'est l'invention de la créature qui échappe à son démiurge et c'est le déni de la mort, qui devient réversible.

A la (re, re, re) lecture de ce roman, j'ai été frappé par la complexité et la modernité de sa construction, agencement subtil de roman épistolaire et de récit à plusieurs voix qui en inspirera plus d'un par la suite. Tout le monde oublie que Mary Shelley l'a écrit en 1818, vingt ans après Dracula, alors que le roman moderne commençait à peine à prendre son essor !

Lire la suite de ma critique sur le site le Tourne Page
Lien : http://www.letournepage.com/..
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Cela faisait un moment que je voulais lire ce classique de la littérature. Ce fut une lecture plaisante, même si le style est un peu "brut", sans trop de subtilité dans l'expression des sentiments des personnages, direct. Mais finalement tant mieux car l'essentiel reste les questions que posent ce récit sur ce que signifie être un être humain. Qui est le plus humain des deux: l'homme ou le monstre? En tant que lecteur, je trouve qu'on hésite à prendre parti pour l'un ou l'autre. Et c'est finalement assez troublant. On arrive alternativement à avoir de l'empathie pour l'un et l'autre. Et c'est ce qui est intéressant dans ce livre.
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Ce récit s'est avéré bien différent de l'idée que je m'en faisais ! M'étais restée la scène du film incroyable : le savant dans son labo, tout encombré d'instruments et de câbles, captant avec des paratonnerres la précieuse énergie nécessaire à insuffler la vie dans le corps rapiécé de l'horrible créature... Mais rien de tout cela dans le roman !

Je suis tout de même satisfaite de ma lecture et d'avoir découvert ce récit classique de la littérature fantastique.
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Un classique de la littérature générale que je n'avais pas encore lu mais dont je connaissais un bout de l'horrible histoire.
Une jolie édition avec cette couverture blanche et ses éclairs verts. Une pagination aérée aussi, ce qui rend agréable le livre à toucher et à lire.
Une écriture dont transparaît le romantisme.
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En 1816, dite « l'année sans été », la pluie ne s'interrompt pas. Un groupe d'amis écrivains se retrouve cloîtré dans le manoir de lord Byron. Ce dernier propose le défi d'écrire une histoire d'épouvante pour passer le temps.
Byron rédige un début de scénario, que Polidori complète en quelques jours pour aboutir au roman court le Vampire, donnant naissance à tout un genre qui inspirera Dracula.
De son côté, Mary Godwin (plus tard épousera Shelley, lui aussi dans ce même groupe d'amis) a du mal à se lancer. Mais elle s'inspire de son vécu et des paysages sublimes et gothiques alentours pour écrire, à 19 ans, Frankenstein ou le Prométhée moderne. Voilà la génèse de ce qui deviendra le roman gothique par excellence et le précurseur du genre de la science-fiction.

Voici le plan de cet avis bien trop long (quand on aime, on ne compte pas) :
0/ Résumé détaillé
1/ le monstre Frankenstein
2/ Walton et nous
3/ Quelques citations commentées relatives à la Science
4/ La créature
5/ La structure de l'intrigue apporte aussi en sens et en narration
6/ le symbolisme des pays
7/ le féminisme de Mary Shelley
8/ Précurseur de la science-fiction
9/ Conclusion sur mon expérience de lecture


>>> Attention, cet avis va divulguer beaucoup d'éléments importants de l'intrigue. Je n'ai masqué que le résumé !



0/ Résumé détaillé :



1/ le monstre Frankenstein
Pendant tout le début du récit du point de vue de Victor, j'ai véritablement détesté ce roman.

Victor est insupportable au dernier degré, je n'ai eu aucune sympathie pour lui.
Il est d'une arrogance incroyable, possessif envers sa cousine / soeur adoptive / « possession » (selon son propre mot).
Il insiste lourdement sur le fait qu'il est brillant et admiré par tous, il dénigre le professeur qui l'a contredit et couvre d'éloges un autre qui n'a pas entièrement rejeté ses lectures ésotériques inutiles.
Il ignore complètement sa famille endeuillée, trop occupé qu'il est à poursuivre ses rêves égoïstes de grandeur, sans prendre de recul un seul instant...

« J'allais donner la vie à des multiples créatures bonnes et généreuses, et nul père n'allait plus que moi mériter la gratitude de ses enfants. »
Spoiler :

De plus, il passe son temps à se plaindre, en ponctuant son récit d'énormément de phrases telles que « La destinée était trop puissante et ses lois immuables avaient décrété ma terrible et totale destruction. »
Ce n'est jamais de sa faute s'il commet des choses atroces, c'est toujours le Destin ou « l'Ange fatal de la destruction » ! Il ne se remet jamais en question tant qu'il n'est pas devant les conséquences terribles de ses actes (et même là encore, il met un certain temps...).
Alors même qu'une innocente se fait condamner à mort à cause de lui, la réaction de Victor est encore de se lamenter et de minimiser le mal causé à la victime : « Les tortures de l'accusée n'égalaient pas les miennes. »

Bref, complètement irresponsable et égocentré ce Victor Frankenstein.




Puis...




C'est là que j'ai compris le génie du roman.




J'ai arrêté d'essayer d'entrer en empathie avec Victor. Et l'histoire s'en est retrouvée fondamentalement changée.
D'habitude, en tant que lecteur, on s'attend à être au moins en partie en accord avec le personnage principal / narrateur, ou au moins trouver des points d'accroche en commun pour se sentir connecté.
Mais ici, tous les autres personnages — y compris la créature avant de se faire briser — débordent d'humanité, de bonté et d'ouverture aux autres... Par contraste, Victor paraît encore plus monstrueux. le message du roman est précisément celui-ci : ne suivons pas l'exemple de Victor Frankenstein.

« Un être humain qui veut se perfectionner doit toujours rester lucide et serein, sans donner l'occasion à une passion ou à un désir momentané de troubler sa quiétude. Je ne pense pas que la poursuite du savoir constitue une exception à cette règle. Si l'étude à laquelle vous vous appliquez a tendance à mettre en péril vos sentiments et votre goût des plaisirs simples, c'est que cette étude est certainement méprisable, c'est-à-dire impropre à la nature humaine. »

Pour moi, le véritable monstre de l'histoire est Frankenstein. Il faut juste se rappeler qu'il s'agit du nom de Victor, et non celui de la créature (qui n'est jamais nommée).



2/ Walton et nous
Il est facile de blâmer Victor, mais il faut ensuite prendre soi-même du recul sur ses actions (quelles qu'elles soient), assumer les conséquences et se remettre en question.

Le récit commence et se termine avec Walton, spectateur tout comme nous du récit de Victor.
Ce qui est flagrant, c'est le parallèle entre lui et Victor concernant leur envie brûlante de découvrir des secrets inexplorés. En le rencontrant, Walton admire énormément Victor et dit de lui-même qu'ils se ressemblent beaucoup.

La différence est que Walton a su rebrousser chemin face à son ambition démesurée, pour ne pas risquer la vie de son équipage. Et ce n'est à aucun moment un choix facile pour lui.
Victor au contraire — qui décidément aime bien donner des leçons de vie aux autres mais pas les appliquer à lui-même — traite les marins de « couards » et les exhorte de continuer l'expédition vers le nord, avec pour seul but d'assouvir sa vengeance personnelle.



3/ Quelques citations commentées relatives à la Science

« Dans un tel état d'esprit, je me tournai vers les mathématiques et les branches annexes, lesquelles me semblaient érigées sur des bases solides et qui à ce titre méritaient ma considération. »

Mais oui Victor, les autres sciences ne te méritent pas.


« Je méprisais les concepts de l'actuelle philosophie naturelle qui se désintéressait des secrets de l'immortalité et de la puissance. Quelques points de vue, bien que futiles, paraissaient sublimes mais à présent les choses avaient changé. L'ambition des chercheurs semblait se limiter à annihiler ces visions sur lesquelles reposait au premier chef mon intérêt pour la science. Et l'on me demandait d'échanger des chimères d'une infinie grandeur contre des réalités de petite valeur ! »

Et plus tard, dans un cours de chimie :

« Les anciens maîtres de cette science, dit-il, promettaient des choses impossibles et n'accomplissaient rien. Les maîtres modernes, eux, ne promettent rien: ils savent que les métaux ne peuvent pas se transmuter et que l'élixir de vie est une chimère. Mais ces philosophes dont les mains ne semblent faites que pour remuer la boue et dont les yeux ne servent qu'à observer à travers un microscope ou un creuset ont néanmoins accompli des miracles. Ils dévoilent les secrets de la nature et en montrent tous les détails. Ils ont accédé au firmament. Ils ont découvert la circulation sanguine et analysé l'air que nous respirons. Ils ont acquis des pouvoirs, nouveaux et presque illimités, ils ont dompté la foudre, imité les séismes et bravé les ombres du monde invisible.

Telles furent les paroles du professeur — ou plutôt laissez-moi dire, telles furent les paroles du Destin, prononcées pour me détruire. »

(Oublions ce tout dernier paragraphe, c'est juste qu'il me fait rire.)

Ces deux citations font pour moi écho à certaines manières d'appréhender la Science encore présentes aujourd'hui, qu'on retrouve dans de nombreuses pseudo-sciences à la mode.

Victor dit chercher la vérité et la compréhension du monde, mais ce n'est pas tout à fait exact. Il est davantage en recherche d'une vision du monde agréable qui lui promettrait ce qu'il a envie d'entendre (gloire et puissance dans son cas).
Il aime l'idée de science mais en rejette dans un premier temps les méthodes, trop rigoureuses et l'empêchant de prendre ses illusions pour la réalité.

Évidemment, la Science « moderne » fait moins rêver. Elle brise nos idées reçues confortables et est une perpétuelle remise en question. Pourtant, c'est bien elle qui permet de mettre en évidence les forces de la Nature et de créer des choses fantastiques dans le vrai monde.



4/ La créature

« Partout je vois le bonheur et moi, moi seul, j'en suis irrévocablement exclu. J'étais généreux et bon, c'est le malheur qui a fait de moi un monstre. »

À chaque fois que la créature fait preuve de bonté ou de générosité, elle se fait rejeter et en souffre terriblement.
On retrouve ce thème plusieurs fois dans le roman : la famille de Felix et Agatha se fait exiler et perd toutes ses richesses à cause d'une bonne action, à savoir sauver un innocent jeté en prison à cause de sa religion différente. de même, Caroline, la mère de Victor, meurt de s'être occupée d'Élizabeth qui avait attrapé la scarlatine.

Ils partagent leurs malheurs et leurs sentiments, et cela les rapproche et renforce leurs liens.
La créature n'a pas cette possibilité. La solitude forcée devient une souffrance, dont naît la rancune, la haine, le mal, puis les remords.

Les représentations de la créature au cinéma me semblent bien en deça de la monstruosité décrite dans le livre. Son apparence provoque de l'effroi, de l'horreur, ses traits affichent malgré elle des expressions que les humains interprètent comme agressives, viles, sournoises, démoniaques...
Il n'est juste pas possible pour un humain non aveugle de voir au delà de son apparence.

Walton est le seul à avoir éprouvé de la compassion sincère pour la créature. Ce qui le distingue de tous les autres, c'est qu'il a connu la créature avant de voir sa monstruosité. Son réflexe de fermer les yeux est paradoxalement ce qui lui permet de voir plus clairement.



5/ La structure de l'intrigue apporte aussi en sens et en narration

Les récits qui constituent l'histoire s'imbriquent les uns dans les autres.
On commence avec le style épistolaire de Walton, puis la prise de notes avec les mots exagérés de Victor, puis le monologue attristé de la créature, puis de nouveau Victor, et enfin Walton.

Cependant, tout n'est pas si carré. Les narrateurs luttent les uns contre les autres pour raconter l'histoire de leur point de vue personnel : Victor corrige et rédige des passages entiers de la prise de notes de Walton, de nombreuses lettres d'Élizabeth, d'Henry ou du père interrompent le récit de Victor, et la créature s'immisce dans la dernière partie à en faire perdre le style épistolaire propre à Walton.

Ce combat pour narrer l'histoire de son point de vue est à mettre en parallèle avec le thème de l'histoire : le besoin vital de partager ses sentiments. Les trois personnages vivent dans la solitude. En effet, Walton a des centres d'intérêts trop différents de son équipage pour se sentir intégré, Victor ne peut pas parler de ce qu'il ressent car personne ne le croirait ou alors le jugerait en mal, et la créature évidemment est sans cesse rejetée. Chacun trouve une personne qui veut enfin bien l'écouter, et ils luttent entre eux pour prolonger cette attention qui leur est accordée. Car dès qu'elle sera finie, ils retourneront à la torture de leur solitude.

D'autre part, la structure de l'intrigue a une autre particularité intéressante. Les narrateurs s'enchaînent de cette façon : Walton, Victor, la créature, Victor, Walton. Cette structure miroir s'observe sur la forme mais aussi sur le fond. Les thèmes se répondent, par en reflets opposés avant et après le moment central : création et destruction, naissance et mort, motivation et abandon, espoir et désillusion, poursuivi et poursuiveur, subir le mal et accomplir le mal...

Ce moment central où tout s'inverse est le moment où la créature se fait rejeter par la famille française en exil en Allemagne, alors que tout était réuni pour que la rencontre se passe bien. Cet ultime rejet est le point de bascule qui le déchire. C'est cela qui change sa volonté d'aimer et d'être aimé... en volonté d'haïr, et même d'être haï, car c'est le seul lien qui peut encore le maintenir connecté à une personne.


(La suite ci-dessous en commentaire.)
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