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Citations sur Abimagique (8)

Quand elle réussit à obtenir ce qu’elle veut en te manipulant, affirmes-tu, tu ne te sens jamais exploité parce que tu en retires toujours un avantage, et aussi parce qu’elle agit avec une telle subtilité que c’est comme s’il était impossible de la critiquer.
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quand les gens meurent, tout ce qui arrive en apparence, c’est qu’ils sont exclus du rêve que nous faisons du monde.
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Bien entendu, personne n’aurait l’idée de baptiser sa fille Abimagique. C’est un nom qu’elle s’est choisi, un nom qui, la première fois que tu l’as entendu, t’a incité à avoir des pensées moqueuses, à l’imaginer comme une victime de quelque délire wiccan, et il semble que ce soit plus ou moins le cas. Les murs de sa maison sont ornés de représentations classiques d’anges ; de masques tibétains et amérindiens ; de curieux assemblages d’herbes séchées et de rubans de soie ; de croix, ordinaires ou ansées, de 7 tracés à l’envers et autres symboles moins aisément identifiables. De longs colliers de perles – ambre et argent, topaze et lapis-lazuli – drapent le miroir de la chambre, découpant les reflets en tranches ; des sachets d’herbes dégageant des odeurs bizarres traînent un peu partout ; des bouts de papier portant des inscriptions tracées à la main dans une écriture tolkiennienne sont planqués sous les oreillers, au fond des tiroirs, sous les plantes en pot, dans les boîtes et les bocaux, et on trouve souvent dessus un 7 à l’envers. Un mois après que vous vous êtes liés d’amitié (tu t’es insinué dans sa vie en tant que client, en quête d’un traitement pour le mal de dos dont tu souffres depuis des années suite à un accident de voiture), tu comprends que ces arcanes reflètent sa personnalité plutôt que de la proclamer à autrui ; ce sont des expressions naturelles, telles des branches feuillues émanant d’un tronc central. Quand elle parle de Dieu, des dieux, des esprits, des fantômes, des miracles, des monstres, de la magie animale ou végétale, des cercles de l’enfer, de la puissance des anges, de la plénitude de l’espace mystique où elle demeure, elle n’est ni agressive ni sur la défensive, s’exprime avec une certitude tranquille qui te pousse à argumenter avec elle. Si tu veux mettre à bas ses croyances, ce n’est pas parce que tu n’as pas dépassé le stade de geek lycéen porté sur la science, mais plutôt parce qu’une vague motivation mâle l’exige de toi. Refusant de discuter, elle se contente de suggérer qu’il existe peut-être certaines choses dont tu n’es pas encore conscient ; un argument que tu ne peux pas réfuter, même si tu essaies.
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Tu commences à comprendre que c’est ainsi que fonctionne votre relation, qu’elle fonctionnera probablement toujours ainsi: elle te cède le contrôle lorsque le contrôle cesse d’être un enjeu.
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Personne ne la drague et ça t’étonne. Certains mecs sont sûrement rebutés par son style (que tu soupçonnes d’être un déguisement plutôt qu’une manifestation de désaffection culturelle), et quelques-uns doivent supposer que c’est une brise-burnes et que toute tentative d’approche leur vaudra un feu roulant d’insultes. Mais il y en a sûrement d’autres qui ne se laisseraient pas dissuader aussi facilement. C’est une belle femme – non, une femme superbe ; le mot « superbe » évoque mieux sa qualité antique. Ses seins, toujours montrés à leur avantage, sont gros et laiteux, zaftig, comme ceux des femmes peintes par Raphaël et Le Titien, et le reste de son corps se conforme aux critères démodés de la volupté. Il doit y avoir une atmosphère spéciale autour d’elle, songes-tu. Une enveloppe de force qui rend son espace inviolable. D’une façon ou d’une autre, tu comprends qu’il ne doit pas être facile de la posséder. Pas question de se planter devant elle et de lui dire : « Ça vous dérange si je m’assois ici ? », ou : « Vous n’étiez pas au Crocodile Club samedi dernier ? », pour embrayer ensuite sur les groupes cools que vous avez vus sur scène puis lui demander son téléphone, et une fois là, passé le besoin d’échanger des banalités (en fait, rien d’autre qu’un préliminaire animal), vous finirez par vous retrouver dans le même lit – ou peut-être pas. Bien que tu désires la même chose que les crétins usant de ces stupides travaux d’approche, tu sais que si tu veux en arriver à cette nuit-là, à ce lit-là, tu devras d’abord désirer tout ce qui a trait à elle. Tu devras tomber amoureux d’elle, te jeter à ses pieds, de sorte que lorsque tu te présenteras, sans te montrer plus spirituel que le premier type de ton âge venu, ces présentations seront enrichies par la profondeur de ses sentiments, l’étendue de ses connaissances, et tu auras alors découvert que la conversation se réduit rarement pour elle à des banalités – une conviction morale souligne toujours ses propos -, tu auras appris qu’elle travaille comme massothérapeute avec des handicapés, qu’elle vit seule dans une maison en bois, dans une rue bordée de sapins du quartier de Fremont, que ses yeux ont la couleur du vert bouteille illuminé de soleil et qu’elle s’appelle Abi, le diminutif d’Abimagique.
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C’est la fille coiffée style Halloween. Coupe Morticia Addams, teinture noir de jais, mèches orangées asymétriques. Elle a vint-quatre ou vingt-cinq ans. Une femme-enfant, songes-tu, qui dévore des biographies d’empoisonneurs célèbres et s’est affublée des piercings les plus douloureux du marché. De la chair à goth typique. Pourtant, une fois passé les cheveux, les robes vintage, la bague-araignée au ventre de perle, les tatouages sur les mains (un crâne de vampire, un cœur humain) et le maquillage outrancier, tu remarques que son visage est empreint d’une douceur et d’une sensualité maternelles qui semblent trop vulnérables pour participer de ce monde moderne.
Durant la semaine, elle déjeune le plus souvent dans ce petit restau teriyaki, au carrefour de l’Ave et de la 45e, dans le quartier de l’Université de Seattle. En général, elle s’assied à la table où a jadis mangé Bill Gates, événement immortalisé par un polaroïd du grand homme encadré au mur, et elle commande toujours le Menu 3 (spécial végan) et une bouteille d’eau, puis elle mange en lisant (en général des livres brochés), sauf les jours de pluie – alors elle regarde par la fenêtre d’un air absent tout en piquant sa fourchette dans son plat. Cela suggère qu’elle est du coin, car les gens nés dans le Nord-Ouest n’ont pas coutume de considérer la pluie comme déprimante ; ils sont davantage enclins à voir en elle un voile consolateur tiré sur le monde, un voile qui encourage la contemplation.
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Au fil de l’été, tu renonces aux hamburgers. Tu t’es tellement habitué au régime d’Abi que la seule odeur d’un burger te donne la nausée. Ce n’est pas une grosse perte – tu n’as jamais été aussi heureux.
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il devrait y avoir des mémoriaux dans l’esprit, des autels avec des cierges, des mausolées regorgeant de visions et de saveurs, des cénotaphes et des statues colossales, et pas seulement ces lambeaux de souvenir vaporeux.
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