C'est une chose curieuse, que la mémoire. D'ailleurs, quand je suis arrivée au deux tiers du livre, une péripétie m'a rappelé, confusément, un autre livre lu, dans le courant de l'année, un livre dans lequel l'héroïne cherche aussi une personne qu'elle a perdu de vue. Ce souvenir m'a effleuré, puis je l'ai laissé retourner dans les méandres de la mémoire, parce que je me suis souvenue aussi que ce récit avait été très décevant, et il vaut mieux se concentrer sur les bons souvenirs littéraires que sur les romans décevants.
Jeanne fête le nouvel an, depuis quarante ans, dans sa famille de coeur, ce cercle d'amis très restreint qu'elle connaît depuis très longtemps. Elle a vu les mariages, les naissances, les remariages, les re-remariages aussi. Elle leur a interdit de lui parler de Suzor, l'homme qui a été le grand amour de sa vie, son compagnon, son complice. Elle a tout fait pour ne plus penser à lui. Seulement, aujourd'hui, par la grâce d'un enfant qui n'a pas encore les barrières des adultes, elle apprend que Suzor est atteint d'Alhzeimer. le retrouver avant qu'il ne l'oublie, avant qu'il n'oublie leurs souvenirs communs, devient pour elle un impératif.
Si je devais trouver deux adjectifs pour qualifier ce roman, je dirai « lumineux et apaisé ». Et pourtant, les souvenirs sont souvent douloureux, comme ceux de ce voyage en Russie, cet acte de coopération entre le Canada et l'ex-URSS qui brisa quelque chose en eux, entre eux. Et si, finalement, c'était mieux si Suzor ne s'en souvenait pas ?
Auprès de Jeanne apparaît très vite Fourmi, adolescente de quinze ans qu'elle n'a pas vu depuis presque une décennie – parce que ses parents ne trouvaient pas convenables que leur fille, dont pourtant ils ne s'occupaient qu'à dose homéopathique, fréquente une vieille dame qui a des soucis de santé. Fourmi, c'est le drame invisible de quelques enfants second nés, pas aussi beaux, pas aussi brillants, pas aussi satisfaisants aux yeux de leurs parents que leurs aînés. Non, ils ne sont pas négligés, rien qui ne permette d'alerter les services sociaux, non, ils sont simplement moins aimés, au point que les parents ne perçoivent pas nécessairement certains appels au secours.
Entre l'adolescente qui aimait raconter des histoires, qui aurait aimé lire le carnet qui lui était interdit, et la vieille femme se noue une alliance pour retrouver Suzor et aussi pour savoir ce qu'il a fait pendant ses quarante années. Puis, c'est l'occasion de dire, enfin, ce qui s'est passé en Russie, de dire ce froid qui ne la saisit à l'apparition des premières neiges, parce qu'elles lui rappellent d'autres neiges, meurtrières, mystérieuses. de dire ce qu'elle sait, elle, ce qu'elle a vu, ce qui l'a bouleversée : Suzor en a su plus qu'elle et n'a jamais rien voulu lui dire.
C'est un livre qui nous questionne, forcément, sur l'autre, sur ce qu'il veut bien livrer de lui-même, sur notre capacité à oublier, à pardonner, à se pardonner. C'est un livre qui nous questionne sur les souvenirs : qu'advient-il d'eux, quand on n'a plus personne avec qui les partager ? Que reste-t-il de nous quand on ne se souvient plus ? Malgré ses questions qui semblent douloureuses, c'est un livre délicat et tendre que nous avons entre les mains.
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Lu d'une traite avec beaucoup de plaisir. L'histoire est belle, les personnages attachants, jeunes et plus vieux, au travers de toute une vie, il y a de l'amour, de la tendresse, de la tristesse et beaucoup de souvenirs. Il y a en fait une histoire de vie, de maladie, une histoire d'aventure, une histoire d'amour, de chagrin et de regret. J'ai ressenti beaucoup d'émotions et ai bien aimé le côté parfois poétique de l'écriture, les jolies phrases. Belle découverte, j'ai beaucoup aimé.
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Un roman qui aborde des thématiques difficiles comme la maladie, l'oubli et la séparation, porté par une écriture magnifique, toute en tendresse, poésie et douceur. Une très belle découverte et un roman marquant, qui prend aux tripes. Un coup de coeur!
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Je ne vais pas savoir raconter l'histoire de ce livre. Il faut le lire, s'y plonger et se laisser happer par sa poésie, par son histoire décousue car raconté par Jeanne qui se souvient de son amour etde sa vie avec son amoureux qu'elle a perdu, qu'elle a laissé s'en aller et qu'elle va maintenant retrouver avant qu'il ne l'oublie , avant qu'il ne soit trop tard. C'est très beau comme histoire, elle m'a émue!
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Trop souvent, on représente la vieillesse et la perte de souvenirs dans des films, livres ainsi que des pièces de théâtre. Chaque fois que je rencontre une pièce de média artistique traitant de ce sujet je me dis que ce n'est pas original et je plains intérieurement le choix de sujet. Par contre, à chaque fois que je m'aventure dans une de ces histoires, j'ai toujours apprécié. C'est un sujet vu et revu, oui, mais c'est aussi un thème universel qui touche tout le monde, particulièrement les gens comme moi qui ont vécu autour d'un membre qui perdait la mémoire. Certes, ce livre tombe parfois dans le cliché, surtout lorsque Fourmi et Jeanne devienne des compagnes et qu'elles vivent leurs aventures ensemble, mais on ne peut pas enlever le côté touchant d'un amour qui avait autrefois existé et de la vieillesse qui détruit plus de gens qu'on ne le pense. C'est un livre parsemé d'une belle écriture et d'un beau message malgré son côté un peu "déjà-vu".
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C'est le permier livre de Mathieu Simard que je lis et je suis certaine que ce ne sera pas le dernier. À mon avis ce livre mérite un neuf étoile sur dix, car c'est un hymne à l'amour malgré la dureté de la chose. Les retours dans le temps effectuer l'aide du cahier donne un rythme croisière agréable. L'histoire inventé pas Fourmi lorsqu'elle était enfant rendre les moments difficiles de la vie actuelle de Jeanne plus doux. Je trouve que c'est passage sont comme une couverture chaude qui nous protège du froid mordant de l'hiver.
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C'est ma première lecture de celui-ci et sûrement pas la dernière. Quelle plume savante et aiguisée! Exactement comme j'aime: complexe, pleine de sens et de significations. Je suis entrée tout doucement, sur la pointe des pieds, presqu'à tâtons dans ce roman, d'abord sans voir ou comprendre le sens de cette histoire. J'avançais petit à petit dans cet univers avec une suite d'expressions imagées singulières.
Et puis, dans les derniers chapitres, tous les morceaux du casse-tête savamment dispersés à travers l'histoire se mettent soudainement en place pour nous faire mieux comprendre l'étendue du chemin parfois sinueux et imprévisible de l'amour. Tout comme l'océan, la vie ou le pardon.
J'ai adoré l'écriture limpide et finement ficelée qui porte à réfléchir, le tout enrobé d'une ambiance tellement spéciale, indescriptible. C'est une expérience en soi. Bref, je terminerais avec un seul mot: encore!
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