Gunnar Kampen, un jeune homme ordinaire ?
Le mal n'a rien de banal comme le démontrait
Hannah Arendt.
Qui était Gunnar, retrouvé mort à seulement 24 ans dans le wagon d'un train en Angleterre. Il est arrivé à la destination qu'il avait prévu mais mort.
Ce premier chapitre, nous fait découvrir les investigations de deux policiers qui analysent la scène. Gunnar Kampen né à Reykjavik Islande il y a 24 ans et mort en gare de Cheltenham Angleterre.
Entre ces deux dates, l'auteur nous fait vivre sa vie à rebours.
« Il était au milieu, entre ses deux soeurs chargées de veiller à ce qu'il reste à sa place. Cela ne l'empêchait pas de se mettre debout, mais les filles ne le grondaient pas. Par la vitre arrière, il voyait leur maison s'éloigner. Son estomac se contractait tant il était angoissé. En quelques instants, leur domicile était devenu un point minuscule, beaucoup trop petit pour qu'il puisse à nouveau réussir à y entrer. »
C'est un roman court et sa puissance réside dans sa forme épurée, en mots simples
Sjón nous trace la vie d'un jeune homme ordinaire. Dès les premières lignes, la lecture nous étreint, nous étouffe comme si nous étions pris en étau, et la mort de Gunnar dans ce wagon n'y est pour rien.
A 24 ans il est là sans vie affublé d'un imperméable sur un pyjama d'hôpital.
C'est un triptyque, le premier volet nous dévoile sa coute vie, né au prémices de la seconde guerre mondiale, il a été élevé par une mère aimante, et deux soeurs qui savent l'entourer, plus tard viendra le petit dernier.
C'est un fils et un frère attentionné.
Cette partie se dévoile par bribes qui mêlent, passé et présent.
Le trouble monte, à l'adolescence Gunnar se passionne pour l'histoire de sa nation.
« Je peux affirmer que je suis un jeune homme travailleur et attentif qui se passionne pour l'histoire de l'humanité et celle de ma nation. »
A vingt ans, il créée son parti nationaliste, c'est ce que découvre le lecteur dans le deuxième volet, celui d'une correspondance où ses idées sont étalées et partagées à travers le monde. C'est glaçant de constater ces ramifications et comment le mal se propage et s'organise, je dirais presque en toute quiétude.
Le troisième volet est l'approfondissement des deux précédents, toujours par bribes et c'est au lecteur à faire les liens et de constater « la banalité du mal » comme l'écrivait
Hannah Arendt.
Un sujet qui montre combien subsiste ses idées nauséabondes, et illustre parfaitement que « sans les masses le chef n'existe pas ».
C'est glaçant jusqu'à la moelle, de voir combien ces idées qui semblent dépassées sont d'actualité.
Où en est-on du : plus jamais ça ?
Au départ je me suis dit trop court, manque de chair et au contraire l'auteur sait nous impliquer, nous lecteurs, dans ce travail de détection du mal ordinaire, car cela exacerbe notre attention et remarquons des détails qui en disent long.
Troublant, glaçant, prégnant et très actuel.
©Chantal Lafon
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