Citations sur Le Pays des autres (416)
La sollicitude de Mouilala, sa tendresse écrasait Selma et s'apparentaient, pour elle, à une forme de violence. Parfois, la jeune fille avait envie de hurler au visage de Mouilala et aussi de Yasmine, la servante, et elle considérait que les deux femmes étaient également esclaves, peu importait que l'une ait acheté l'autre au marché. L'adolescente aurait tout donné pour une serrure et une clé, pour une porte fermée sur ses rêves et ses secrets. Elle priait pour que le destin lui soit favorable et qu'un jour elle puisse s'enfuir pour Casablanca et se réinventer. Comme les hommes qui criaient "Liberté ! Indépendance !", elle criait "Liberté ! Indépendance !", elle criait "Liberté ! Indépendance ! ", mais personne ne l'entendait.
A cet instant,ils n'étaient pas dans deux camps opposés.Ils ne se réjouissaient pas du malheur de l'autre.Ils n'attendaient pas que l'autre pleure ou se félicite pour pour lui tomber dessus et l'accabler de reproches.Non, à cet instant, ils appartenaient tous deux à un camp qui n'existait pas,un camp où se mêlaient de manière égale,et donc étrange,une indulgence pour la violence et une compassion pour les assassins et les assassinés.Ils étaient à la fois victimes et bourreaux,compagnons et adversaires,deux êtres hybrides incapables de donner un nom à leur loyauté.Ils étaient deux excommuniésqui ne peuvent plus prier dans aucune église et dont le dieu est un dieu secret,intime,dont ils ignorent jusqu'au nom
Il y a des hommes bons don’t les femmes sont brûlées et des salauds qui échappent à tout. Dans les guerres, il n`y a plus des gentils, plus des méchants, plus de justice.
Elle pensa que c`était la doute qui était néfaste, que c`était le choix qui créait de la douleur et qui rongeait les âmes. Maintenant qu`elle était décidée, à présent qu`aucun retour en arrière n`était pas possible, elle se sentait forte. Forte de ne pas être libre.
Le ciel était triste et froissé, comme un drap après une nuit de cauchemar
Tandis qu'elle pénétrait dans la maison, qu'elle traversait le salon baigné par le soleil d'hiver, qu'elle faisait porter sa valise dans sa chambre, elle pensa que c'était le doute qui était néfaste, que c'était le choix qui créait de la douleur et qui rongeait les âmes. Maintenant qu'elle était décidée, à présent qu'aucun retour en arrière n'était possible, elle se sentait forte. Forte de ne pas être libre
"Mais tu es complètement folle ! Jamais ma soeur n'épousera un Français !"
Il attrapa Mathilde par la manche et la tira de son fauteuil. Il la traina vers le couloir plongé dans l'obscurité.
" Tu m'as humilié ! " Il lui cracha au visage et du revers de la main, il la gifla....
On n'a pas fini, lui dit il en la cognant du poing....
Je vais toutes vous tuer...
Dans sa main il tenait un revolver....
Il raconta le calvaire des milliers d'hommes " On en dénombre près de deux mille à la fin du XVIIème siècle" que Moulay Ismaïl avait fait enfermer ici, et il insista sur le génie de sultan bâtisseur qui avait fait construire des kilomètres de tunnels souterrains dans lesquels ces esclaves se traînaient, mourants, aveugles, pris au piège....
Pour Mouilala, le monde était traversé par des frontières infranchissables.
Entre les hommes et les femmes, entre les musulmans, les juifs et les chrétiens, et elle pensait que pour bien s'entendre il valait mieux ne pas trop souvent se rencontrer.
La paix demeurait si chacun restait à sa place.
Il portait sur son visage cette fatigue qui est propre aux bons médecins. Sur leurs traits on voit, comme en transparence, les douleurs de leurs patients, on devine que ce sont les confidences de leurs malades qui courbent leurs épaules et que c’est le poids de leur secret et de leur impuissance qui ralentit leur démarche et leur élocution.