En digne amateur de Swamp Thing et Animal Man, il était écrit que ma modeste expérience du comics soit un jour amenée à croiser le chemin de Gideon Falls. Halloween approchant à grands pas, je trouvai le prétexte idéal pour enfin entamer ce premier tome dont j'avais tant ouï les louanges. Après une journée harassante de boulot (vous savez cette bonne vieille loi des séries), un bol de chips et un bon petit - bon okay peut-être légèrement plus - verre de délectable Fitou plus tard, l'affaire était pliée. Verdict ? le résultat est franchement plaisant, même si perfectible.
Débutons avec l'aspect graphique qui va sûrement en rebuter plus d'un dès les premières pages tournées, tant la patte d'
Andrea Sorrentino se veut des plus singulières. du coup de crayon convexe à la limite du brouillon, aux planches atypiques aux tons psychédéliques parfois très prononcées et défiant les lois de la gravité à vous donner le tournis, le dessinateur compte bien marquer les esprits. Même si de prime abord j'ai personnellement eu un peu de mal à m'accoutumer au style, je dois reconnaitre que j'ai fini par y trouver un charme fou, notamment grâce aux coloriages bien pensés de Dave Stewart qui mettent parfaitement en valeur l'oeuvre du graphiste.
De son côté, le très prometteur
Jeff Lemire livre une intrigue à la fois nébuleuse et lugubre, qui ne manquera pas de vous ravir à coup sûr tant les inspirations télévisuelles auprès des ambiances de True Detective, de la Black Lodge de Twin Peaks ou encore des ténors de l'horreur sur grand écran imprègnent habilement l'histoire. Des tréfonds de l'Amérique profonde crasseuse aux meurtres sanguinolents arpentant le récit en passant par de (hélas trop rares) glaçants passages teintés de fantastique, l'auteur signe un envoûtant, même si imparfait, conte horrifique aux multiples facettes.
Si les amorces de notes philosophiques, réflexions sur la religion et psychologie des personnages sont intéressantes, elles sont malheureusement trop lisses, tout comme les enjeux qui semblent non seulement à peine effleurés, mais également fluets. Ce premier tome pâtit donc de son statut introductif et ne parvient pas à suffisamment susciter l'intérêt malgré des prémices alléchantes et pleines de promesses. Cependant, l'exercice reste louable et mérite que l'on s'y attarde, que vous soyez adeptes de comics en-dehors des sentiers battus du mainstream ou non. Bienvenue dans l'antre du mal.