Dans les environs de Loup, dans le Nébraska, trois ans après leur arrivée dans les grandes plaines de l'Ouest à conquérir, quatre femmes sont devenues folles, dépossédées elles mêmes par des conditions de vie qui les ont aliénées à une terre, un mari … Accablées, elles ont lâché prise.
A 43 ans, Théoline ne peut supporter d'être enceinte une nouvelle fois. Elle a eu quatre enfants, un de ses fils est parti en Californie chercher de l'or, loin des hivers interminables et de leur misère. La grêle, le vent ont ruiné leurs récoltes, les vers grouillent sous la peau du bétail. L'enfant qui vient n'est pour elle qu'une calamité de plus. Arabella, elle, s'est mariée à seize ans/ Pour l'amour de Garn, elle a quitté sa grande famille aimante, pour l'Ouest et le rêve du jeune homme. Trois ans plus tard, il n'a pas réussi à bâtir une vraie maison, et une diphtérie foudroyante a tué ses trois enfants en deux jours. Son visage est devenu celui d'une vieille femme et dans ses bras, reste une poupée à dorloter. Quant à Gro, elle a trente six ans, mariée à Thor. Eux sont venus de Norvège et ont réussi à installer une exploitation relativement prospère. Ils n'ont pas d'enfants, et l'homme besogne son corps en silence. Sa haine a fini par jaillir, incontrôlable. Et enfin, Hedda Petze s'est battue seule durant deux nuits contre les loups qui entraient dans sa demeure. Elle en a tué quatre. Maus lorsque son mari et ses fils sont revenus des deux jours de coupe de bois, ils ont l'extirper de son son lit. Rigide;, paralysée et muette.
Leur histoire, leur passé, est raconté alors qu'elle sont convoyées vers l'est dans une sorte de cariole bricolée et conduite par une autre femme, Mary Bee. C'est le pasteur qui a mis au point ce « rapatriement » vers l'est, aucune solution n'étant possible pour elles dans l'Ouest sauvage, sans asile ni soin possible. A travers les plaines, le convoi doit rejoindre Hebron, et de là, elles seront confiées à leur famille, du moins, on peut l'espérer.
Mary Bee est une forte femme, généreuse, croyante, elle a sa terre, une maison en pierres et on dit même que son édredon serait en plumes. Son seul problème est de trouver un mari … Par naïveté, et devant la lâcheté des hommes, elle se retrouve rapatrieuse, dépassée mais résolue à traverser les plaines, sans mourir de froid, sans que les femmes ne se tuent, ne s'entretuent, ne s'enfuient, ne soient capturées ou et violées … L'odyssée tient du naufrage dès le départ; alors elle embarque Briggs, un fruit pourri, un voleur de terre, un homme peu fiable, sans compassion et fort peu d'hygiène dont on se demande quand il va trahir.
Le récit de leur périple est ponctué d'anicroches entre ce couple mal assorti, un jeu de pouvoir opposant pragmatisme et bonnes intentions. On pourrait alors croire que l'intrigue rejouerait le duo type incarné par exemple par Humphrey Bodard et
Katharine Hepburn dans African Queen. D'autant plus que, à l'instar de
John Huston, l'auteur joue du puritanisme de l'une et de la figure virile de l'autre. Et si comme dans le film, la tonalité dominante est ironique, les différentes péripéties que rencontre le convoi sont des rappels du réel, de la folie qui rôde, du moment où la lucidité peut basculer parce que les repères deviennent flous et l'air manque.
Homesman est davantage un roman de la désillusion que de la conquête, le mythe de la frontière en prend un sacré coup, loin des clichés des bonnets empesés des pionnières des grandes prairies. Les personnages se révèlent aussi beaucoup plus denses que les rôles assignés au départ pouvaient le laisser penser, sans violons mais avec une émotion percutante.
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