Depuis qu'elle a rejoint le musée du Louvre, la Joconde a rarement quitté sa cimaise. En 1963 pourtant, sur la demande insistante du ministre de la culture, elle fut expédiée à New-York pour être exposée au MoMA et, accessoirement, contribuer au réchauffement des relations diplomatiques entre l'Exagone et les States. Voilà donc Mona Lisa embarquée sur
Le France en compagnie du conservateur du Louvre, d'un service de sécurité étoffé et du ministre lui-même. Ce ministre c'est
André Malraux,et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il va lui voler la vedette.
L'histoire dévoile en effet certains aspects de la vie de l'illustre personnage. Elle s'attarde notamment sur ses zones d'ombres (les failles de son passé de résistant, ses activités de trafiquant d'art au Cambodge...) ainsi que sur ses addictions. Les auteurs forcent un peu le trait et c'est un
Malraux mégalomane et complètement déjanté qui s'offre à nous. Cela nous donne quelques scènes irrésistibles au cours desquelles l'homme politique sera contraint d'admettre que tout le monde ne partage pas la haute estime qu'il a de lui-même.
Il est en revanche bien dommage que l'intrigue autour de la Joconde soit si légère. Sa disparition momentanée et l'enquête qui s'ensuit auraient pu déboucher sur des scènes beaucoup plus amusantes et plus variées. Ici, à part une discrète allusion à la situation algérienne, elle reste centrée sur le personnage de
Malraux qui étouffe tous les autres. D'autres idées méritaient pourtant d'être étoffées : la rivalité entre le ministre et le chef d'orchestre Herbert von Karayan, sa mésentente avec la conservatrice du Louvre qui voit d'un mauvais oeil le précieux tableau servir de monnaie d'échange entre nations...
En revanche le décor est plutôt bien utilisé.
Le France fournit un cadre à la hauteur de l'histoire. du pont à la soute en passant par les cabines, les salons, la salle de concert... on visite tous les recoins de l'immense et luxueux paquebot à la rencontre de son petit peuple d'employés et de riches croisiéristes.
Quant aux dessins, ils m'ont rappelés ceux des caricaturistes que l'on trouvait dans les journaux, les dessins de
Jacques Faizant, ceux de
Cabu (le chef de la sécurité) et le personnage de
Malraux est superbement croqué. Son regard halluciné, son allure tantôt survoltée, tantôt déprimée, reflètent parfaitement son caractère et font de lui un personnage de BD particulièrement efficace. Une suite ?
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