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472 pages
Alphonse Lemerre, Paris (01/07/1891)
5/5   1 notes
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"Mademoiselle Roche" narre l'histoire, aux alentours du lac d'Annecy, de la jeune et candide Germaine Roche, fille adultérine de Mauricette Roche, épouse bourgeoise délaissée par son mari, et de Pierre Magnier, avocat chargé de régler un différend de mur mitoyen entre la famille Roche et ses voisins.
Devenu progressivement un ami du couple, sur l'insistance de Simon Roche, entrepreneur très terre à terre et assez fermé à tout le reste, Pierre Magnier cède assez vite aux avances à peine voilées de Mauricette, et entame avec elle une relation secrète qui s'étale sur des années, et dont la jeune Germaine se révèle un accident involontaire. Heureusement, Simon Roche se persuade très facilement qu'il en est le père, bien qu'il ne couche plus guère avec sa femme.
La petite Germaine assiste, sans rien y comprendre, aux entrevues secrètes hebdomadaires entre Pierre et Mauricette. Pour occuper la petite fille et trouver un prétexte pour voir seul à seule la maîtresse de maison, Pierre ramène son neveu, enfant lui aussi, François de Trézuns, un gros garçon balourd toujours irrité de la niaiserie de sa camarade de jeu.
Mais un jour, Simon Roche, averti par une domestique, rejoint les deux tourtereaux, et les surprend en flagrant délit. Sous le choc de la révélation, il fait un AVC (à l'époque, on disait une "attaque"), et tombe au sol raide mort de saisissement.
Sa veuve ne le pleure que pour la forme : elle espère bien refaire sa vie au plus vite avec l'ami de la famille. Mais Pierre Magnier a d'autres plans. Cette mort subite et scandaleuse fait jaser dans la région, ce qui le gêne d'autant plus qu'il envisage une carrière politique. Il rompt brutalement avec Mauricette et part s'installer à Paris. Mauricette est bien plus atteinte par cette rupture que par son veuvage : elle se replie dans un égoïsme dévot, et rejette l'enfant du pêché qui lui rappelle constamment sa faute, sa culpabilité et son amour envolé.
C'est finalement une cousine à Simon Roche, Philiberte Destilleuls, vieille-fille desséchée mais au caractère bien trempé, qui prend l'éducation de Germaine, et qui en fait l'archétype de la vierge chrétienne, pure et noble, idéal de l'époque. Devenue adolescente, Germaine subit sans trop de tristesse la mort précoce de sa mère indigne, et découvre dans ses affaires les lettres d'amour envoyées à Pierre Magnier que celui-ci avait rendu à Mauricette lors de la rupture. L'une d'elles révèle à Germaine le secret honteux de sa naissance.
Se sentant indigne de l'héritage qu'elle vient de faire, la propriété familiale appelée par le défunt entrepreneur "La Commanderie", Germaine décide de renoncer à ses biens, et à entrer dans un couvent pour expier les fautes de ses parents.
Elle va cependant trouver sur sa route bien des obstacles : Philiberte, d'abord, qui s'oppose à ce projet avec un matérialisme inattendu. François de Trézuns, ensuite, devenu un bourgeois balourd et avide, qui compte épouser Germaine par intérêt et parce que ça lui semble facile.
Germaine, déterminée, ne s'en laisse point conter. Elle tient même à donner sa maison au dernier membre vivant de sa famille, Robert Bessonis, un jeune et sympathique cousin d'une branche pauvre de la famille, et qui n'est que paysan. Mais bien, évidemment, entre ces deux jeunes gens de condition différente mais au coeur semblablement pur, un tendre sentiment va naître, et va résoudre par un mariage tous les problèmes...
Comme on le voit, "Mademoiselle Roche" est un pur produit de la littérature romantique du XIXème siècle. La quasi intégralité de ses problématiques sont aujourd'hui complètement dépassées, et pourtant, impossible de s'ennuyer ou de lâcher la page en cours : narrateur habile, André Theuriet confère à cette intrique, empreinte pourtant de partis pris discutables ou désuets, une ambiance paisible et rustique au milieu de personnages peu originaux mais extrêmement fouillés.
Le talent d'André Theuriet est d'abord celui d'un homme qui prend son temps pour décrire un milieu provincial et en expliciter tous les tenants et aboutissants, même s'ils sont évidents. Ce soin littéraire nous permet de comprendre avec une grande clarté la mentalité d'un siècle lointain, avec tout ce qu'elle implique, comme scrupules ou comme sentiments parfaitement ringards, dans l'évolution de son intrigue. Ensuite, parce que tout cela permet à l'écrivain de s'attarder sur des ambiances, des atmosphères, des images qui donnent au roman une autre dimension, plus profonde, celle d'une véritable étude de moeurs dans un contexte et un endroit qui n'est pas prévisible ou éculé.
Enfin, parce que cet ensemble de choses permet aussi à ce livre de n'être ni un roman catholique étouffant par sa morale rigide, ni une énième histoire de clocher. Par une multitude de détails, et d'éléments annexes que je ne développe pas ici, André Theuriet parvient à raconter son histoire d'une manière très cinématographique, même s'il est un peu anachronique d'affirmer une chose pareille pour un roman de 1891. Tout est cependant ici très visuel, avec véritablement des "plans" qu'on visualise étonnamment bien, comme si l'auteur avait "vu" l'histoire dans son imagination avant de l'écrire et nous permettait de regarder dans sa lanterne magique.
Tout cela donne à ce récit désuet un parfum inexplicable de Nouvelle Vague, malgré les décennies qui séparent ce livre de ce style cinématographique. Bien qu'André Theuriet abuse parfois un peu trop des bons sentiments et des expiations déterminées quand il s'attarde sur Germaine et Philiberte, il sait contrebalancer les portraits un peu trop flatteurs de ses héroïnes - flatteurs parce que diplomatiques, car les jeunes filles et les vieilles filles représentaient le lectorat de base de Theuriet -, par une description toujours très pertinente et jamais convenue des personnages annexes quelque peu tourmentés - qui ne sont pas pour autant des "méchants" mais des personnages imparfaits, victimes de leurs veuleries, de leurs mesquineries ou de leurs égoïsmes. Germaine et Philiberte ne sont d'ailleurs pas dénuées non plus de traits de caractères déplaisants. En évitant les personnages trop lisses, André Theuriet ajoute une profondeur et un réalisme qui manquait souvent aux productions de ses confrères.
Tout cela fait de "Mademoiselle Roche" un roman parfaitement désuet et désuètement parfait : l'intrigue est certes surannée, mais le roman est rempli d'une vie fourmillante et passionnée, qui offre à tout curieux du XIXème siècle un voyage documentaire dans le passé, au sein d'une province morne de la Belle-Époque, à la découverte de personnages étonnamment réalistes, si lointains et si proches à la fois.

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