Thibaud,
La résidante du palaisVoici un véritable bijou de la collection, dont la lecture m'a fortement impressionné. C'est sur la piste des champignons, qu'un été extraordinaire a fait pousser à foison, que le narrateur nous fait pénétrer dans les forêts cévenoles où :
« les bois regorgeaient de trompettes-des-morts, de girolles, de trompettes-chanterelles, de cèpes, de lactaires, de tricholomes équestres, de cortinaires, d'armillaires couleur de miel… »
Derrière la muraille verdoyante des arbres, le narrateur mène la vie retirée d'un forestier, bien à l'abri de la civilisation et des – femmes. le lecteur sait déjà que c'est une configuration assez particulière de son corps qui lui a fait choisir cette vie aux allures monacales, qui sera pourtant perturbée par l'apparition de la belle et sensuelle Cynthia.
Celle-ci, attiré tout d'abord par les champignons que le narrateur vend au marché, se révèle bientôt être une digne rivale de la divine chasseresse et se met aux trousses de notre ermite qu'elle arrive à débusquer dans son terrier. L'inévitable se produit, et l'histoire à la « boy meets girl » se termine évidemment, fidèle aux préceptes du genre, dans la couche du solitaire finalement pas si farouche que ça, et le couple s'enfonce dans une nuit torride où il se transformera dans la légendaire bête à deux dos, métamorphose que n'aurait pas désavouée le célèbre exilé de la Mer Noire.
Le charme de ce texte réside principalement dans l'évocation des interminables bois des Cévennes, avec leur nature luxuriante et son caractère sauvage qui déteint sur les rencontres humaines et leur restitue la force et la beauté primitives d'une nature à l'abandon. le récit est ponctué d'instants inoubliables, comme celui de la douche improvisée avec sa belle poésie rustique, ou la tendre passion du narrateur pour les champignons. Passion amplement récompensée parce que ce sont eux finalement qui ont établi le contact entre le forestier et sa belle citadine.
Dommage seulement que l'auteur ait choisi une construction assez compliquée pour un texte finalement très court, avec plusieurs cadres dont le dernier, complètement étranger au récit, n'apporte strictement rien à l'intrigue. Il aurait mieux valu faire confiance au bistouri du médecin, interlocuteur du narrateur, pour s'en débarrasser. Mais ce petit bémol n'enlève rien à la beauté de l'histoire de la « Résidante du palais », dont je recommande très fortement la lecture.
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