AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,52

sur 59 notes
5
2 avis
4
4 avis
3
9 avis
2
1 avis
1
1 avis

Critiques filtrées sur 3 étoiles  
C'est un ouvrage fort complexe centré sur les tragédies de l'exil, une réflexion, un aller et retour,une recherche sur l'importance des signes, des hasards, des échos qui constituent notre filiation et notre héritage, comme une marque que chacun porte au plus profond de soi.
Line, la narratrice, découvre , au hasard de ses déambulations new-yorkaises l'existence d'Albert Dadas, premier cas au XIX° siécle de " tourisme pathologique", un fugueur maladif, sans cesse jeté sur les routes par son inextinguible soif d'ailleurs, un homme aux errances perpétuelles, répertoriées pendant plus de vingt ans par le docteur Tissié qui deviendra célèbre en exposant son cas...sur lequel on avancera deux thèses : l'une , l'hystérie, l'autre l'épilepsie. Cette soif de mouvement qui animait Albert Dadas, " un aliéné voyageur",est restée une énigme....
Qu'est-ce qui nous sépare les uns des autres?
Qu'est ce qui nous lie?
Minh Tran Huy donne à entendre nombre de voix, nombre de souvenirs, liés aux voyageurs malgré eux de sa propre famille : Thinh, son oncle, un homme inaperçu, prisonnier de son exil géographique et mental, si mystérieux..'l'histoire bouleversante de Hoai, sa cousine dont la disparition n'a laissé aucune trace,sauf dans les mots de son pére, dont l'ombre s'évanouira bientôt....et surtout son pére, cet homme né pendant la guerre d'Indochine, cet immigré aux multiples vies, trop silencieux, " J'avais peut- étre fini par te transmettre l'instinct du silence" lui confie t- il. Grâce à Line, il va enfin partager les secrets de son enfance..
L'auteure, sensible aux sons et aux enregistrements pour garder la mémoire de ce qui fut, de ce qui frémit, de ce qui se tut, entrecroise mémoire familiale et mémoire collective et rend un hommage vibrant à quelques exilés que la guerre, la folie des hommes ou la misère ont conduit à errer entre deux rives, de la coureuse de fond Éthiopienne :Samia Ysuf Omar au destin d'Albert Dadas, aux centaines de silence de son pére quand à son enfance dans une ferme du nord Vietnam, avant que la guerre ne commence à emporter les hommes du village...
Comme une étrange nostalgie confondue avec l'enfance de ce pére, si lointaine au Vietnam jusqu'à l'acquisition d'un pavillon coquet en région parisienne et l'intégration! Une publicité vivante pour la méritocratie républicaine !
C'est un bel ouvrage, plus un témoignage qu'un roman, à mon sens,où les récits distanciés s'enchâssent, fruits sans doute de longues recherches méticuleuses, le disputent en parallèle, de maniére harmonieuse, à la mémoire familiale, un hommage ultime et doux, profond,des traces indélébiles et des secrets de ses origines, pour conserver vivante la mémoire de ce pére tant aimé, ce déraciné silencieux aux douleurs secrètes !
Commenter  J’apprécie          320
Comme dans tous ses romans, Minh Tran Huy déroule des portraits et des histoires qui nous sont racontés par Line. Ouvrant la première partie du roman « Allers », le premier personnage est Albert Dadas, un « fou voyageur » atteint d'automatisme ambulatoire qui se levait un matin et marchait à travers la France, allant parfois jusqu'en Algérie ou en Russie. Elle nous parle ensuite de Samia Yusuf Omar, l'athlète somalienne qui courait pour s'en sortir, pour accéder à une autre vie, une autre réalité. C'est à travers eux qu'elle fait le lien avec sa famille d'origine vietnamienne. Combien de personnes obligées de quitter leur foyer, leur famille, voire leur pays, à cause de la guerre, pour suivre des études, pour offrir à leurs enfants une vie meilleure. Thinh, Hoai, Sun, Yuân Lan, Tâm, Bao… Des parcours singuliers et en même temps semblables à ceux de tant de Vietnamiens.

On retrouve les thèmes chers à Minh Tran Huy, ceux qui parcourent toute son oeuvre. Elle raconte les guerres qui ont marqué et transformé l'Indochine et le Vietnam, la dictature communiste, l'exil, les longues études et le travail acharné pour acquérir une situation. Mais elle parle aussi de la mémoire, des souvenirs et de l'identité. le père de Line incarne ses trois sujets. Etranger dans son pays d'origine, en parlant parfaitement la langue, a-t-il réellement trouvé sa place dans son pays d'adoption ?

La forme du texte est également typique de Minh Tran Huy. Comme dans La double vie d'Anna Song ou La princesse et le pêcheur, la seconde partie du roman « Retours » est construit avec une alternance de deux voix : celle de Line et celle de son père. Tous deux se complètent, apportent des détails pour finalement présenter au lecteur une grande histoire familiale, une saga tragique à travers l'Histoire récente du Vietnam.

Peut-être peut-on reprocher à Minh Tran Huy une certaine redondance dans ses thématiques, mais elle conte le Vietnam en combinant tant de réalisme et de poésie, trace des portraits d'une telle finesse que se plonger dans ses romans reste toujours un moment magique malgré les drames et les larmes des personnages.
Commenter  J’apprécie          120
Deux mois après la mort de son père, lorsque Line se retrouve pour son travail à New-York, elle flâne dans de nombreux musées et découvre l'histoire d'Albert Dadas, un homme ayant souffert de dromomanie (la maladie du fugueur).
Le voyage peut résulter d'une maladie ou du besoin de quitter un pays en guerre. Maladie ou nécessité, l'exil, comme celui vécu par les émigrés d'Ellis Island reste toujours un traumatisme. Certains n'arrivent jamais à destination, d'autres vivent avec le silence des absents, sans jamais savoir à quel pays ils appartiennent.

Dans une première partie, Minh Tran Huy évoque les étranges voyages d'Albert Dadas, puis ceux plus entravés de Samia, jeune athlète somalienne qui voit en la gloire olympique la possibilité de quitter un pays de famine et de guerre. Elle fait le parallèle avec son père, petit campagnard vietnamien qui n'avait pour objectif que l'excellence scolaire afin de partir étudier dans un école d'ingénieurs parisienne. Son cousin, Linh est parti avec lui pour la France dans la même école. L'accueil aux Etats-Unis pour le frère de Linh, Thinh, fut plus difficile avec le début de la guerre du Vietnam, entraînant irrémédiablement le jeune homme vers l'exil mental et la folie.
" Mais là où Albert avait traversé les frontières les unes après les autres suivant une route à la fois chaotique et fluide, Samia s'était heurtée à toutes celles qu'elle avait tenté de franchir, encore et encore. Elle s'était vue opposer des barrières physiques, financières, administratives, sociales, et malgré son souffle et son énergie, elle en était restée captive. Prisonnière, comme Thinh l'avait été de son exil géographique et mental."

La seconde partie intitulée Retours, se concentre sur le témoignage inattendu de Huong, le père de Line. "Le silence était son élément naturel" mais il finit par se confier à sa fille qui cherche à connaître le passé. La confession est complète et poignante de sa naissance en 1954, au début de la guerre d'Indochine jusqu' à sa mort. Son père et son grand-père appartenaient aux rares Viêt-minhs non communistes. Huong et sa mère ont dû s'enfuir à Saïgon en 1954 chez le juge Tan, oncle maternel qui finira tristement dans un camp de rééducation. Tant de proches disparus hantent la mémoire de Huong qui ne pourra voyager en son pays (mais l'est-il encore?) qu'en 1972.

Minh Tran Huy rend hommage à son père et à tous ceux qui ont disparu dans l'exode ou dans les camps. Tant de meurtres et d'assassinats dont il ne fallait parler qu'à demi- mots en évoquant des disparitions, des absences. Se taire devient un automatisme alors qu'il faudrait laisser des traces de toutes ces vies perdues, de tous ces voyages involontaires.

Si le lien entre les histoires d'Albert Dadas et de Samia de la première partie intitulée Allers et celle du père de Line n'est pas évident, il permet toutefois d'éviter de se focaliser sur une évocation classique et romanesque de l'histoire familiale en élargissant l'exil à d'autres sources, d'autres pays, d'autres voyages.
Lien : http://surlaroutedejostein.w..
Commenter  J’apprécie          30
Un roman ? Pas tout à fait, à mon sens. La narratrice, Line, qu'on devine très proche de l'auteur, retrace les destins de divers personnages, reliés par un fil rouge quelque peu ténu : tous sont des voyageurs malgré eux. le premier d'entre eux, ouvrier gazier du 19e siècle est atteint d'une maladie psychiatrique qui le pousse à traverser l'Europe à pied, sous l'impulsion d'une manie du départ. La seconde, athlète somalienne, court et s'exile pour sa liberté. Les autres personnages, dont l'histoire s'intercale à celle des premiers, sont de la famille du père de la narratrice, vietnamien immigré en France. Cousins, cousine, oncles... Tous sont partis, pour fuir le régime vietnamien, trouver un meilleur destin, retrouver quelqu'un. Et tous ces récits convergent pour dresser le portrait du père de la narratrice, récemment décédé.

Le tout ressemble davantage à une rêverie intime, composée de glissements et rapprochements tout personnels, mosaïque de personnages sans rapports les uns avec les autres. Chacune des histoires à son charme, et une force certaine. J'ai été un peu moins convaincue par le lien entre ces différents éléments...

Un livre intéressant et très personnel, voire un peu trop personnel à mon goût.
Commenter  J’apprécie          20
Un livre "hommage" à tous ceux qui ont quitté leur pays à cause des conflits, des guerres, de la famine, de l'intolérance et qui vivotent tant bien que mal dans un pays d'accueil où ils ne sentent pas totalement chez eux.
Linh est née française de parents vietnamiens, universitaires, exilés en France au moment de la guerre avec les américains. Elle réclame, depuis sa petite enfance, les souvenirs de son père sur sa vie d'enfant au Viet-Nam mais celui-ci se dérobe à chaque fois. Un voyage à New-York la renvoie, suite à une exposition sur Albert Dada et " les fous voyageurs" à ses souvenirs personnels d'avec son père "voyageur malgré lui" et elle donne un bel hommage à tous ces déracinés du monde malgré eux.
Un livre facile à lire, parfois poignant qui parle à tous même aux plus enracinés.
Commenter  J’apprécie          10
Minh Tran Huy, française d'origine vietnamienne, avait remporté de vrais succès avec La Princesse et le pêcheur ainsi qu'avec La double vie d'Anna Song.
Le récit commence par l'histoire véridique de deux personnages qui ont en commun de ressentir la nécessité de partir.
L'un, Albert Dabas, est un ouvrier gazier du XIXe siècle. Sans comprendre ni pourquoi ni comment, il s'éveillait dans des pays de plus en plus lointains sans argent et sans biens matériels d'aucune sorte. Il était seul responsable de cet état de fait et cette pathologie a été étudiée minutieusement par un médecin.
L'autre, Samia Yusuf Omar, est une athlète éthiopienne qui dans le but de sortir de la misère, est parvenue sans aucun moyen et sans presque s'entraîner, à participer aux Jeux Olympiques en 2008 où elle est arrivée dernière mais ovationnée par tout un stade. Elle a disparu en voulant rejoindre l'Italie clandestinement sur un bateau de fortune en 2012.
Line, l'héroïne du roman, en arrive à l'histoire de plusieurs proches de sa famille qui tous ont dramatiquement subi guerre et même guerre civile puis exil : oncles, cousins, amis et surtout son père, modèle d'intégration réussie malgré son passé. Cet homme, un taiseux, fou de travail qui, après avoir été contraint à l'exil doit toute sa vie continuer à voyager pour les besoins de son entreprise. Heureusement, sa fille réussit à le faire parler avant que la maladie d'Alzheimer ne lui enlève définitivement cette mémoire et cette identité tellement mises à mal par les événements.
C'est là le coeur de ce roman qui paraît très autobiographique. Même ceux qui ont réussi à assurer une vie confortable à leurs enfants ont dû affronter de terribles difficultés. Quant aux autres, leur destin est tragique.
Un roman intéressant, attachant, sans pathos, plein de sensibilité et très vrai même si pour moi les deux personnages mentionnés en début de roman n'auraient mérité que quelques pages car la construction du livre en aurait sans doute été plus cohérente.

Marie-Christine (Croissy-sur-Seine)
Commenter  J’apprécie          10
Minh Tran Huy rend hommage à son père et à tous ceux qui ont disparu dans l'exode ou dans les camps. Tant de meurtres et d'assassinats dont il ne fallait parler qu'à demi- mots en évoquant des disparitions, des absences. Se taire devient un automatisme alors qu'il faudrait laisser des traces de toutes ces vies perdues, de tous ces voyages involontaires.
Si le lien entre les histoires d'Albert Dadas et de Samia de la première partie intitulée Allers et celle du père de Line n'est pas évident, il permet toutefois d'éviter de se focaliser sur une évocation classique et romanesque de l'histoire familiale en élargissant l'exil à d'autres sources, d'autres pays, d'autres voyages.
Commenter  J’apprécie          00
Line est à New-York, alors qu'elle visite un musée, elle découvre l'existence d'Albert Dadas. Au 19ème siècle, il est le premier cas de touriste pathologique. Il a ce besoin compulsif de courir les routes sans jamais se souvenir des lieux et ce qu'il a fait pendant ces longues absences. Line fait rapidement le lien avec d'autres voyageurs malgré eux tels que son oncle Thinh, un homme étrange qui peu à peu perdu l'esprit ; Hoai, cette cousine disparue ; et surtout son père, il a quitté son Vietnam natal pour parcourir la France et le monde grâce à son travail. En parallèle, son père se livre, il écrit son histoire à sa fille avant de perdre complètement la mémoire.

Je ressors assez mitigée de cette lecture. L'auteur navigue entre mémoire familiale et mémoire collective, elle nous livre un peu de sa vie, de son père, cet homme pudique et mystérieux. C'est aussi un roman qui instruit, finement, sans bourrage de crâne, les infos se sont faufilées dans mon esprit sans que je ne m'en rende compte. Et pourtant j'ai parfois eu l'impression que certains passages étaient inutiles, soit car pas assez approfondis, soit par manque de cohérence avec le reste du roman. J'ai aimé ce bel hommage aux expatriés de tous horizons, qui cachent une partie de leur vie pour ne pas devenir un fardeau pour celui qui écoute. Gros coup de coeur pour le personnage du père, qui est très attachant. Lecture mitigée mais positive quand même !
Lien : https://lesmotschocolat.word..
Commenter  J’apprécie          00
Joli roman qui nous fait découvrir, grâce à Albert Dadas, une maladie originale, la dromomanie ou folie du fugueur. L'auteur se plaît à nous narrer de front le destin de cet homme ainsi que ceux de son oncle, d'une coureuse olympique et également celui de son père. Tant de personnages qui ont à coeur de parcourir le monde et/ou de fuir leur contrée d'origine, et ce de manière incessante.
Il est touchant de lire comment le destin d'Albert Dadas et celui du père de Minh Tran Huy se rejoindront dans un parallélisme touchant et émouvant en fin de roman.
Ce livre m'a donc plu mais j'espère, sincèrement, que Minh Tran Huy saura trouver une nouvelle source d'inspiration à l'avenir car la trame de ce livre-ci ressemblait déjà énormément à celle de "La Princesse et le Pêcheur".
Commenter  J’apprécie          00


Lecteurs (112) Voir plus



Quiz Voir plus

Les écrivains et le suicide

En 1941, cette immense écrivaine, pensant devenir folle, va se jeter dans une rivière les poches pleine de pierres. Avant de mourir, elle écrit à son mari une lettre où elle dit prendre la meilleure décision qui soit.

Virginia Woolf
Marguerite Duras
Sylvia Plath
Victoria Ocampo

8 questions
1721 lecteurs ont répondu
Thèmes : suicide , biographie , littératureCréer un quiz sur ce livre

{* *}