Toujours le drame à portée de la main. Ça doit être ça, vieillir. Avoir peur de son ombre. Frapper un mur et ne plus être en mesure de trouver la seule issue possible. Avoir dans les mains la clé et refuser de s’en servir sous prétexte qu’on ne voit plus très bien et que tout nous échappe. Se mentir effrontément… Et se retrouver seul. Tout seul !
Après, il lui faisait l’amour sur le divan du salon pendant que le baseball se poursuivait à la télévision. Betty dénouait ses longs cheveux qui effleuraient ses seins, ses seins qu’il dévorait comme des framboises écrasées dans de la crème fraîche, de la tarte au sirop d’érable chaude, des brownies qui brûlent les lèvres au sortir du four, et tous les délices qu’il se fourrait goulûment dans la bouche avec tant de plaisir. Il jouissait trop vite, incapable de se retenir, et, pendant que Betty rangeait la cuisine, il s’endormait avant la huitième manche. Si ce n’était pas ça, le BONHEUR, qu’est-ce que c’était ?
Tous les voleurs du coin savaient très bien qu’ils avaient peu de risques d’être pris sur le fait. Entre le moment où un honnête citoyen victime de quelque larcin se décidait à appeler les policiers et celui où il les voyait enfin aboutir dans son entrée de garage, de nombreuses heures pouvaient avoir passé, pour ne pas dire des jours complets. Quand les voleurs finissaient par se faire prendre, ils avaient écoulé le gros de leur matériel et, de toute façon, personne ne souhaitait récupérer la vieille télé que les assurances avaient déjà promis de remplacer par une neuve.
Toujours alerte et vive, un peu plus rondelette qu’à ses débuts comme serveuse, Denise était la personnification même de la joie de vivre qui contaminait tous ceux qui l’approchaient. À part quelques chaleurs qui la forçaient à travailler les bras nus et le corsage aussi ouvert que la décence le lui permettait, Denise vivait sa ménopause avec la même fougue que toutes les étapes précédentes de son existence. C’est pas les maudites hormones qui vont contrôler ma vie ! Non, certain !
Maudite école ! C’est ça que ça fait aux enfants. Si t’entres pas dans le moule, il y a pas de place pour toi. Pis si tu rentres dans le moule, tu finis par travailler dans un bureau pour le reste de tes jours. Je connais rien de pire que ça ! Moi, mes enfants, je vais les encourager à pas penser comme tout le monde. Il faut être rebelle pour faire avancer les choses. Le Che, ça, c’était un homme !