La Dernière allumette

Parce que la maman de Céline voulait me donner un sac doré et parfois, la gentillesse, je sais pas pourquoi, ça écrabouille le cœur encore plus fort que la méchanceté.
(P. 100)

Elle me raconte quelques anecdotes qu'il lui a confiées. Comment, par exemple, le jour de ses dix ans, il a vu son père attraper sa mère par les cheveux et lui écraser le visage dans son gâteau d'anniversaire alors que les bougies brûlaient. Le plat s'est brisé et elle a failli perdre un œil. À l'hôpital, elle a dit qu'elle était tombée dans l'escalier en portant le gâteau. Elle m'explique que ces confidences arrivent souvent dans les moments de remords qui suivent un accès de violence. Elle les interprète comme une marque de confiance sans voir qu'il s'en sert pour la manipuler et justifier son comportement inacceptable.
(P. 95)

« Largue ce con, trouve-toi plutôt un mec gentil, c'est la seule qualité qui compte chez un mec, qu'il soit gentil. »
(P. 87)

Personne ne se souviendra de moi.
Je ne changerai pas le monde.
Je suis comme les autres. Je ne suis qu’un tout petit maillon, ma vie n’est qu’une goutte d’eau dans l’océan qu’est l’histoire de l’humanité, aussi fragile et éphémère que la lumière fugitive d’une allumette qu’on craque et qui s’éteint.

Parfois, je ne sais plus où ça hurle le plus fort, dans ma maison ou dans ma tête.

Pardonner l’impardonnable, c’est juste donner l’autorisation de recommencer.

Ceux qui ne souffrent pas d’anxiété ne peuvent pas comprendre qu’il est bien plus complexe de dompter la terreur lovée à l’intérieur, celle qui vit en soi, que la frayeur banale et passagère d’un danger extérieur.

S’il y a une chose que j’en ai retenue, c’est que tout le monde souffre un jour ou l’autre, c’est inévitable. Les traumatismes font partie de la vie, mais un traumatisme n’est jamais une excuse valable pour mal se comporter.

Ce qui détermine si tu te souviens ou pas de quelque chose, c’est ta capacité à aller le chercher au bon endroit. Parfois, il suffit d’une odeur, d’une chanson, d’un mot, d’un infime détail qui va faire remonter à la surface d’un seul coup le souvenir que tu as occulté. Ce sera comme craquer une allumette, la lumière se fera. 

Nous avons tous une petite voix dans la tête qui nous avertit du danger. Une sorte de sixième sens, sédimenté au fil des millénaires, que nous avons appris, à tort, à faire taire. Et au moment où les yeux de Zoé se sont posés sur Gabriel, je suis certaine que cette petite voix lui a murmuré que mon frère, aussi fascinant soit-il, ne lui causerai jamais que des problèmes.