Varenne, c'est pas un tocard ! "Il Capitano" est le plus riche trotteur de l'histoire ! Et son homonyme écrivain est tout comme lui : c'est pas un tocard, c'est aussi un champion, mais dans l'écriture, lui.
Les deux peuvent se targuer de m'avoir fait vibrer quelques fois, même si l'auteur n'a pas encore gagné le Grand Prix d'Amérique.
Comment pourrait-on qualifier le roman
Battues ? Presque de rural noir, même si on est plus dans du Forestier Noir, vu qu'on va arpenter les forêts.
Un Roman Policier Noir ? Oui, il l'est aussi un peu car le déclin d'une ville, passée de la prospérité à la dégringolade, cette dernière étant inversement proportionnelle à la montée de son taux de chômage et de misère commerciale puisque tous les commerces sont vides, à remettre, périclites, sauf les bistrots, tiens.
Battues ne se lit pas comme un thriller, on en est loin, l'auteur prenant le temps de poser ses jalons, de planter son décor, ses personnages, tout en mélangeant l'ordre de ses chapitres, nous donnant la version lors de la déposition devant le commissaire avant de nous montrer ce qu'il s'est vraiment passé.
Les titres des chapitres sont originaux, bien trouvés, comme je vous le montre en exemple : "20 ans après l'accident, 9 jours après la découverte du premier cadavre, 12 heures après la fusillade".
On pourrait croire, vu ainsi, que ce genre d'agencement des chapitres pourrait embrouiller la tête et nous faire perdre l'ordre du récit, mais que nenni ! Pas besoin de café fort, d'aspirines ou de GPS pour s'y retrouver, tout coule de source.
Niveaux décors, ils sont grandioses, que ce soit la petite ville de R. qui s'asphyxie toute seule, les forêts majestueuses et rasées sur certains versants par les bûcherons de la scierie, on a l'impression d'y être et d'avoir réellement croisé cette harde de sangliers.
Les personnages sont bien campés, torturés, avec leurs défauts et leurs qualités, certains étant plus têtus que d'autres, ce qui est le cas de Remi Parrot, le garde-chasse qui n'a pas dû voir les épisodes des Experts et oublié qu'il ne faut pas corrompre une scène qui pourrait être rattachée celle d'un crime !
Locard l'a toujours dit : toute personne qui intervient sur une scène de crime y laisse des traces de sa présence et emporte avec elle des traces de cette scène ! Mais Remi n'écoute pas la voix de la raison et fonce à tout va.
Quand à la petit ville, sa description du départ est bien faite, aussi précise qu'un rapport d'autopsie, sans oublier qu'elle est gangrenée et sous la coupe des deux familles les plus riches et les plus puissantes du coin : les Messenet et les Courbier.
Mon seul bémol sera pour le manque de précision lors des dialogues. Je les ai trouvé "pauvres" dans le sens où j'aurais aimé que l'auteur précise plus l'état d'esprit du personnage à ce moment là, ou tout simplement qui disait quelle phrase car il m'est arrivé de devoir lire plusieurs lignes avant de remettre chaque paroles dans la bonne bouche.
Un roman noir aux relents de tourbe, de poils de sanglier, de
battues, de poudre à fusil, de sang de cochon sauvage, de remugle de cadavres, d'alcool, de médocs et d'entourloupes en tout genre car les puissants aiment se vautrer dans les magouilles qui rapportent du fric ou du pouvoir.
Un roman forestier noir profond, qu'on déguste avec sagesse car écrit avec passion.
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