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Critique de Charybde2


Entre Parme et Pô, le commissaire Soneri entrechoque avec mélancolie et acuité le passé qui ne veut pas mourir et le présent qui voudrait tout broyer.

Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2024/03/20/note-de-lecture-la-maison-du-commandant-valerio-varesi/

Alors qu'il entamait dans la bassa, ce bout de plaine en partie inondable située entre Parme et le Pô, une enquête sans trop de conviction, à propos d'armes de contrebande qui circuleraient parmi les nouveaux pêcheurs de silure du coin, souvent anciens militaires slovènes ou slovaques, le commissaire Soneri est brutalement ramené à l'ordinaire de la violence urbaine, lorsqu'il se retrouve presque par hasard en première ligne pour poursuivre, à toute allure sur les petites routes inconfortables de ces lieux, une bande de braqueurs de distributeurs bancaires en pleine récidive.

Mais comme souvent dans les enquêtes auxquelles il est confronté (en tout cas celles que Valerio Varesi daigne nous raconter), quelque chose attise vite son instinct sachant assembler intuition et rêverie (celle qui fait parfois de Soneri un cousin pas si éloigné de l'Adamsberg de Fred Vargas) : une accumulation de faits apparemment disjoints, tels que des cadavres mystérieux retrouvés dans le Pô, du sable qui disparaît ou un héros de la Résistance devenu toujours davantage ermite, met en branle une machine détective qui, pour n'être pas pleinement orthodoxe, sans doute, se révèle en général extrêmement efficace, connectant les points irrationnels de la carte avec ceux issus directement du calcul des intérêts.

Publiée en 2008, traduite en français en 2021 par Florence Rigollet chez Agullo, la neuvième enquête (la sixième chez nous) du commissaire parmesan Soneri nous ramène, en une étrange boucle mélancolique, à son point d'ancrage initial (du point de vue du lectorat français) le plus profond, celui de cette plaine inondable du Pô, entre Émilie-Romagne et Lombardie, soumise aux crues du grand fleuve, à l'habitat dispersé et taiseux pourtant si proche de la métropole parmesane, celle-là même que nous avions découverte dans « le fleuve des brumes ». Comme le confirmera d'ailleurs le volume suivant, « La main de Dieu », on pourrait ainsi esquisser une histoire-géographie en spirale de l'ouest de l'Émilie-Romagne selon Valerio Varesi, passant de la plaine du Pô à la ville (« La pension de la via Saffi »), de la ville à la montagne (« Les ombres de Montelupo »), pour revenir à la ville (« Les mains vides ») puis à la plaine, par deux fois (« Or, encens et poussière » et cette « Maison du commandant »), avant de repartir pour les contreforts apennins (« La main de Dieu », prochainement sur ce blog). Cette spirale envoûtante n'a rien à voir avec une quelconque figure de la répétition, mais bien avec celle de l'approfondissement : sous le regard aigu et sensible du commissaire Soneri, une véritable connaissance par les gouffres se fait jour de proche en proche, celle du poids des lieux – et de leurs mémoires historiques, trafiquées ou non – sur les existences présentes, qu'elles l'acceptent ou s'en défendent. Et c'est ainsi que se construit volume après volume l'une des séries les plus attachantes du roman policier contemporain – et au-delà.
Lien : https://charybde2.wordpress...
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