Je n'ai pas souvent peur. J'attendrai d'être mort pour avoir peur, ça me gâchera moins la vie.
Sans vouloir accuser les représentants de la police de falsifier les faits, aujourd'hui comme hier, pour nous masquer la réalité, cette petite note d'histoire rappelle utilement aux citoyens que l'Etat a ses vérités que la vérité ne connaît pas et qu'en tous les temps, il a su manier l'art de la dissimulation.
p.205
Les premières vous prennent la raison, les seconds l’âme, et la troisième la vie.
Il avait atteint l'état d'énergie d'une éponge ballottée par la houle, l'état exact qu'il recherchait parfois.
Et en fin de criée, alors que Joss abordait sa conclusion naufragée, il sursauta, comme si un caillou aigu avait heurté durement l'éponge.
Deux fois, ça ne donne pas le temps de faire le tour d' un homme .
Ca permet de survoler et l'image aérienne était bonne.
Si tout le monde faisait comme vous, elle n'avancerait pas vite, la civilisation.
- Elle avancerait peut-être mieux.
- [...]Il s'agit toujours du même thème. On tourne autour sans en dire le nom, sans y toucher, comme les vautours se rapprochent en cercle autour d'une charogne.
- Autour de quoi ? demanda Joss, perdant un peu pied.
- Autour du thème, Le Guern, je viens de vous le dire. De l'objet unique de toutes les spéciales. De ce qu'elles annoncent.
- Qu'est-ce qu'elles annoncent ? [...]
- La peste, dit-il en baissant la voix.
- Quelle peste ?
- LA peste.
- La grande maladie du vieux temps ?
- Elle-même. En personne.
Le verbe hisse l'idée comme l'humus hisse le petit pois. Un acte sans papier et c'est un petit pois de plus qui meurt dans le monde.
Les riches mouraient peu de la peste, protégés sans le savoir par leur maison solide, épargnée par les rats.
C’est le peuple qui y passait.
On avait d’autan plus tendance à croire au pouvoir des pierres précieuses.
Les pauvres ne portaient pas de rubis et ils mouraient ; le nec plus ultra était le diamant, la protection par excellence. Le diamant, porté à la main gauche, passe pour neutraliser toute sorte de devenirs.
C’est ainsi que les hommes fortunés prirent pour habitude d’offrir un diamant à leur fiancée pour la protéger du fléau.
C’est resté.
Mais plus personne ne sait pourquoi.
Non, pour rien au monde Joss n'aurait accordé sa confiance aux choses, pas plus qu'aux hommes ou à la mer. Les premières vous prennent la raison, les seconds l'âme et la troisième la vie.