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Citations sur Les métamorphoses du gras : Histoire de l'obésité du Moyen .. (43)

La liste de Michel Lévy, campant la géographie organique de l’obèse, est bien celle d’un mal « sournois », danger multiforme, déployé de place en place dans le secret des tissus et des chairs :
« Le thorax est écrasé et diminué de hauteur par l’ampliation de l’abdomen ; les poumons comprimés ont moins de volume que chez les sujets maigres ; le cœur, enveloppé de couches solides de graisse, est en général moins volumineux ; le foie, augmenté dans toutes ses proportions, laisse suinter par la pression une graisse fluide, mêlée d’une bile claire ; la vésicule biliaire est dilatée par le fluide peu coloré qu’elle contient, la capacité de l’estomac est agrandie, sa tunique musculeuse très développée ; le pancréas, cerné de graisse, est volumineux, le mésentère surchargé de graisse, les reins petits et enfouis dans la graisse, la vessie petite et contractée. »
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La nomenclature inédite de Lavoisier, carbone, hydrogène, oxygène… vieillit d’emblée les images traditionnelles : les représentations quasi poétiques surtout, celles de l’engraissement animal, par exemple, où se détaillaient les « pâtures », les « herbes tendres et succulentes », les « herbes fines et savoureuses », sont toutes subverties par des représentations plus concises où se déclinent les seuls « éléments » chimiques. Lieu de composition de corps simples, la graisse, en définitive, change d’objet.
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Rarissimes, en revanche, sont les indications chiffrées des traits eux-mêmes. La seule allusion de Pierre du Moulin, en 1638, donnant à la mesure de la ceinture une valeur double de celle du cou, demeure aussi artificielle que peu pratiquée :
« deux fois le tour du col fait le tour du corps par l’endroit où est le diaphragme. J’entends parler d’un corps bien composé et proportionné et non d’un corps enflé et crevant de graisse. »
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La seule station de Vichy, dont les eaux combattraient les « anomalies de la nutrition », reçoit 2543 visiteurs en 1840, 40 000 en 1860, 100 000 en 1890. La station d’Evian, elle aussi toujours plus fréquentée, voit son urbanisme bouleversé à la fin du siècle : aménagements des quais, ouverture d’avenues monumentales, création de réseaux d’eaux souterrains, rénovation totale de l’accueil hôtelier. Alors qu’un « voyage d’études médicales » en 1901 confirme, dans sa langue abstraite, l’effet de la source sur l’ensemble des phénomènes digestifs :
« Ce sont ces matières osmotiques qui font plus complète, plus active la vie organique, d’où meilleures sont la respiration, les oxydations, les assimilations, les désassimilations cellulaires, la désintégration des déchets organiques, l’élimination des cendres, la solubilisation des matières usées… »
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L’auteur de la Physiologie du goût […] installe une démarche totalement inédite, recherchant le plaisir du manger malgré les surveillances obligées. Une manière de confirmer la nécessité du régime, tout en aiguisant une « érotique ». […]
Plus largement, le projet est de prétendre utiliser les sciences le plus récemment développées pour instituer une « gastronomie » : « connaissance raisonnée de tout ce qui a rapport à l’homme en tant qu’il se nourrit ». « Intelligence » de l’estomac, sans doute, cette gastronomie aurait aussi une vocation magistrale. Conversion bourgeoise, conversion savante, maîtrise de la digestion, finesse du goût, l’ambition scientifique et culturelle s’affirme comme jamais jusque-là.
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Tout change […] dans le deuxième tiers du XIXe siècle, lorsque ces constats sont soumis au calcul statistique. L’appréciation du poids, d’abord, s’affirme davantage. Un rapport s’impose : l’échelle des poids rapportée à celle des tailles. […] D’où l’établissement d’une normalité et de ses dérives, entièrement fondée sur le chiffre. Non pas la normalité de l’idéal, mais celle du réel : l’homme se définit par ce qu’il vit, moins par ce qu’il juge ou ce qu’il voudrait.
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La démonstration effectuée en 1778 sur des personnes placées dans des chambres closes transforme à vrai dire le regard sur l’organique. L’analyse de l’air respiré révèle l’absorption d’oxygène et le rejet de gaz carbonique. Conclusion inévitable : la respiration est une combustion. L’acte peut être alors réinterprété. Son rôle est bouleversé : respirer ne consiste plus à favoriser la contraction du cœur ou à rafraîchir et affiner le sang, comme les médecins et savants l’avaient toujours pensé, mais à entretenir la chaleur animale et, plus largement, la vie par quelque invisible brasier. Une flamme existe, dont l’oxygène serait une des conditions. Une « matière » comburée existe aussi, comme la cire pour la bougie ou le charbon pour le foyer. La nourriture serait bien cet « aliment » : une de ses « transformations » s’explique par cette contribution.
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L’originalité […] tient à un débat nouveau au XVIIIe siècle : la présence de la viande dans le régime lui-même. […]
Le débat se double d’un enjeu culturel déjà cent fois étudié : la critique du luxe et de l’artifice, des modes urbaines et des excès de raffinement, l’ « amollissement » dont l’abondance de viandes serait une des causes. […] La menace de « dépérissement » collectif se dit ici bien autrement que se disaient les vieilles craintes de recul moral ou d’abandon religieux. L’inquiétude porte sur l’amoindrissement physique, l’atteinte organique, les conséquences présumées des techniques et des préciosités. Un mal censé inverser le progrès, convertir la modernité en faiblesse, altérer des santés collectives pour la première fois clairement désignées : voie déclinante où « les races périssent ou dégénèrent au bout de quelques générations ». L’humanisme des Lumières peut alors condamner les tueries animales, les « massacres », la « voracité » des peuples, l’installation de « vastes boucheries » couvrant l’univers.
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Buffon ne confirme pas une pratique accrue de la pesée, mais il exploite un rapport longtemps intuitif, longtemps sourdement perçu et non calculé : la grosseur d’un homme grand n’est pas celle d’un homme petit, le poids d’un géant ne saurait être celui d’un nain. D’où la présentation totalement originale de liaisons réglées : le poids « normal » et le poids « excessif » le sont en fonction d’un même repère, celui d’une hauteur de corps identique.
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L’homme explique avoir voulu surmonter un « état valétudinaire » en recourant à la vieille pratique de Sanctorius : entretenir une égalité entre le poids de sa nourriture et celui de ses rejets. Il a fait construire un instrument massif pour mieux enregistrer toute oscillation de poids : gigantesque balance romaine avec siège et table incorporés […]. Il l’a utilisé avec rigueur, s’est pesé trois ans durant, a noté ses ingestions, ses excrétions, les a comparées jour après jour, traquant tout excès d’humeur censé compromettre l’intérieur du corps. Il se dit déçu : son état physique est inchangé, son esprit demeure « inquiet », ses forces « languissantes ». Plus encore, l’attention aux mesures constantes l’a quasiment accablé.
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