Citations sur Nous sommes l'étincelle (93)
"La nuit est bleue. Elle marche le nez en l'air. La forêt exhale encore la chaleur du jour - des parfums de sève et d'humus et de bois… Ce souvenir de la Beauté, c'est encore la beauté même."
Il ne t'écoute pas, le monde, il ne croit pas que tu puisses le déranger fût-ce un instant ; il va rouler sur toi comme un torrent, un fleuve, même,
chose impossible à endiguer,
sans que tu puisses rien y faire. Il a les années pour lui, et la multitude, le nombre, l'habitude, tout le reste.
Tu vas t'épuiser, à nager à contre-courant,
et tu seras finalement un débris dans son flot, quand il t'aura rompue, et lentement, lentement, tu descendras vers le fond. Une alluvion. Un sédiment.
Mais tu ne te laisses pas faire.
Page 500.
Page 174, un journaliste sur le plateau de télévision où se trouve Xavier.
C'est très beau, mais très facile, reprend le commentateur. Franchement démagogique. Vous avez bénéficié de l'argent de l'État pour votre naissance, vos soins, votre croissance, votre scolarité, vos études. Vous avez profité de la société de consommation pour vos besoins et votre plaisir, d'un système politique pour voter les lois qui vous protègent. Vous dénoncez un cirque médiatique, mais vous en profitez pour vous faire entendre... Regardez... Ce soir... Sur ce plateau de télévision... Alors, je trouve ça un peu gonflé de dire : "On s'en va..." Une fois que vous avez bien profité... Précisément au moment où vous devriez contribuer à la société qui vous a tout donné jusque-là.
Partir. Ses parents ont fait ça, déjà, plusieurs fois, ils ont franchi des déserts, traversé une mer, un tombeau, sur un esquif fragile, ils sont morts de soif, de faim, plusieurs fois, ont continué - ses frères se sont glissés dans des trains d'atterrissage - ses amis sont partis pour venir. Ici. Sans savoir. Et c'est son tour. Partir. pour des rêves. Conquérir autre chose pour aller décrocher la lune.
Page 168,, Joan au moment de la grande manifestation.
La nuit est bleue. Elle marche le nez en l’air. La forêt exhale encore la chaleur du jour – des parfums de sève et d’humus et de bois… Ce souvenir de la Beauté, c’est encore la Beauté même.
ça ne s’oublie pas, tirer, tuer l’ennemi, c’est comme d’autres choses apprises, le vélo, la natation, tu tires sur un humain et ça te revient, c’est comme à la chasse
La plupart sont partis le soir même, ou le lendemain, après une nuit à discuter, chanter, se tenir chaud, se tenir droit et se donner du cœur. Ils ont lancé un dernier appel à leurs familles et à ceux qu’ils aiment. Arrachement. Adieu. Au revoir. À l’espoir… Puis ils ont jeté leurs téléphones-liens, leurs téléphones-garrots, leurs téléphones-menottes dans les poubelles au passage et ils sont partis comme on s’en va en vacances, en camping.
(Depuis que l’être humain nomme « intelligents » des voitures, des téléphones, des villes, il semble que l’intelligence se soit retirée du monde.)
Est-ce cela qu’ils vont faire ? Se retrancher ? Se soustraire ? Refuser le combat ? Disparaître ?
Et ce livre a retenti, avoue Xavier, avec le dénuement de San Damiano, avec cette idée de vie dans les cabanes, dans les bois, avec ces rêves de mômes, ces souvenirs de vacances où on pêchait des poissons, sur la plage, on les faisait cuire au feu, on jouait dans la poussière pieds nus, et dans le ruisseau ; on n’avait rien, on était heureux.