Citations sur Nous sommes l'étincelle (93)
Si ces hommes rient, s’ils rient de leurs doubles sens lorsqu’ils trouvent Montana « appétissante », s’ils ricanent des lapins qu’ils croquent, s’ils se régalent par avance, jettent les reliefs de leur repas sur le dos de Daniel, si Dan masque à sa sœur leur dévoration – leurs lèvres gourmandes, leurs dents limées, leurs doigts luisants sur les os maigres –, c’est parce que les braconniers sont cannibales. Anthropophages.
Dit-on.
J’aime la forêt, pense-t-il. J’aime qu’elle m’enseigne, qu’elle décide du jour et de l’heure, mais qu’elle me laisse le droit, le temps, la chance d’apprendre ses leçons.
........Tu sais, on dit que quitter l'enfance, c'est perdre ses utopies.....Devenir raisonnable. Moi, je crois que c'est l'inverse. C'est plutôt les choisir.
C'est la seule chose à faire quand on est devenu vieux : faire rempart de nos corps devant les rêves, pour qu'ils puissent s'élever à l'abri de ce bouclier, pousser, mauvaises graines, de travers, dans les herbes folles, arbustes, arbres, forêts, forêts de rêves.....Et qu'un jour, il soit beaucoup trop tard pour les couper.
Le temps qui passe, panse, émate, suture, endurcit le pourtour des plaies comme une corne.
Ces naïfs, ces non-violents, qui n'appliquaient leur révolution qu'à eux-mêmes, ne demandaient pas d'autre changement que celui qu'ils étaient.
[...] parce qu'il ne t'écoute pas le monde, il ne croit pas que tu puisse le déranger fût-ce un instant ; il va rouler sur toi comme un torrent, un fleuve même,
chose impossible à endiguer,
sans que tu puisses rien y faire.
Il a les années pour lui, et la multitude, le nombre, l'habitude, tout le reste.
Tu vas t'épuiser, à nager à contre-courant,
Et tu seras finalement un débris dans son flot, quand il t'aura rompue, et lentement, lentement, tu descendras vers le fond. Une alluvion. Un sédiment.
Mais tu ne te laisses pas faire.
Ils se méfient des grands mots, "chaos", "révolution", "communisme", mots usés par les échecs. Ils savent qu'on va dans le mur et qu'on finira par perdre, et que ceux qui perdent le plus, dans ce cas, ce sont toujours les pauvres.
Révolution : tour complet sur soi-même pour revenir au point de départ, et rebâtir le statu quo ante, sur d'autres bases peut-être, avec d'autres vainqueurs, d'autres injustices, d'autres lésés pour compte, mais pour finir toujours au même endroit. Sur le même théâtre.
C'est la seule chose à faire, quand on est devenu vieux : faire rempart de nos corps devant les rêves, pour qu'ils puissent s'élever à l'abri de ce bouclier, pousser, mauvaises graines, de travers, dans des herbes folles, arbustes, arbres, forêts, forêts de rêves... Et qu'un jour, il soit beaucoup trop tard pour les couper.