A l'heure où la mode est au thriller à tout crin, accommodé à toutes les sauces au point d'en devenir indigeste,
Gilles Vincent, lui, nous fait la démonstration qu'avec une histoire simple ,parfaitement maîtrisée, et des personnages dotés d'une réelle épaisseur psychologique , il est possible d'écrire un roman abouti, qui délivre un profond et vrai plaisir de lecture à celui qui a la chance d'en parcourir les pages.
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Parjures » fait partie de ces romans qui vous prennent par la main dès le premier chapitre et ne vous laissent pas repartir, qui vous ballotent au grès de rebondissements savamment orchestrés par un scénario sans faille, et vous emmènent à la rencontre de personnages que vous aurez bien du mal à quitter une fois le roman achevé.
Comment par exemple, ne pas tomber sous le charme de cette jeune commissaire de police, Aïcha Sadia, une femme au nom gorgé du soleil méditerranéen et au caractère forgé dans le roc. Une dure à cuire, qui mène ses hommes avec poigne et qui n'est pas la dernière à prendre des risques dans une opération de police.
Pourtant derrière ce visage ferme et déterminé, Aïcha porte en elle une absence qui la ronge, qui remplit sa vie d'une nostalgie corrosive. Celle de son compagnon Sébastien, disparu en mer depuis plusieurs semaines, on ne sait trop comment, ni pourquoi .Aïcha n'a retrouvé sur la plage que les vêtements soigneusement pliés de Sébastien. Mais la mer ne lui a jamais rendu ce qu'elle lui a volé.
Et il faudra bien un moment d'absence, d'abandon passager dans les bras d'un de ses collègues pour qu'explose toute sa féminité et réaliser que son coeur bat encore.
C'est bien là l'intelligence de
Gilles Vincent que de nous faire pénétrer dans l'intimité de ses personnages, de porter sur eux une lumière différente selon les moments, qui met à jour leurs faiblesses, leurs forces, et leurs histoires personnelles, donnant ainsi au roman tout son relief et sa profondeur.
Mais les personnages ne se suffiraient pas à eux même pour faire de ce livre un très bon roman, s'ils n'étaient pas inscrits dans un scénario particulièrement efficace. En la matière l'auteur joue avec brio avec son lecteur.
Marseille, des taulards fraîchement libérés de prison sont retrouvés décapités dans des entrepôts abandonnés, quelques jours à peine après leur sortie. Pour Aïcha et son équipe il est clair qu'un groupuscule d'extrémistes a décidé de délivrer une autre justice, expéditive et sans appel.
C'est ce sort funeste qui attendait Abdel Charif. Condamné pour meurtre mais ayant toujours clamé son innocence celui-ci a bénéficié d'une grâce et quitte enfin ces murs qui l'ont retenu pendant quatre ans. Libre, il va retrouver sa femme Laila chez son beau-frère Mouss, loin du tumulte journalistique provoqué par sa libération.
Mais à peine sort-il prendre l'air pour imprégner ses poumons de sa ville et de son quartier retrouvés, que celui-ci échappe de justesse aux hommes qui lui tendent une embuscade et tentent de l'embarquer de force dans une fourgonnette.
Conscient du danger qui le menace, ms ne sachant pas d'où il vient, Abdel décide de se rendre au commissariat, pour demander à rencontrer Aïcha Sadia dont il a entendu parler.
Dans son bureau, celui-ci va lui faire une bien étrange proposition : Elle le protège et l'aide à prouver son innocence dans l'affaire qui l'a envoyée derrière les barreaux, et en échange il l'a conduira à Sébastien, son compagnon disparu.
Là où le lecteur pensait avoir à faire à une version revisitée de « la nuit des juges », (un film où des notables de New York s'arrogeaient le droit de vie et de mort sur des coupables en puissance dans un tribunal de l'ombre, en donnant une autre lecture de la justice des hommes.) , celui va rapidement réaliser que
Gilles Vincent à d'autres intentions.
Reprenant à zéro l'enquête qui a fait d'Abdel un coupable, tout en essayant d'obtenir de lui un maximum d'informations pour remonter la piste de Sébastien, Aïcha se lance à corps perdu dans la quête de son amour disparu.
L'histoire va se resserrer progressivement autour d'elle et d'Abdel, et devenir plus personnelle. Au fil des pages l'auteur diffusera avec malice une tension qui se fera de plus en plus forte à mesure que l'on s'approchera de la vérité. le lecteur ira de surprise en surprise sans que l'histoire ne perde un seul instant de sa cohérence et de sa crédibilité.
Gilles Vincent aime à brouiller les pistes, à surprendre son lecteur. Mais Au-delà de sa capacité à donner du rythme à son roman, il parvient à merveille à retranscrire les sentiments et les états d'âmes de ses personnages. le lecteur n'en n'éprouve que plus d'empathie pour eux, et vit avec intensité leur aventure.
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Parjures » ne se lit pas, il se savoure comme un bon pastis sous le soleil de Marseille ! Pas le livre qui chamboulera le genre, juste un très bon bouquin qui vous offrira un bon moment d'évasion ! Et c'est déjà pas si mal !
Quant à moi, je guetterai à l'avenir les nouvelles aventures d'Aïcha Saida, car je crois bien, qu'au fil des pages, je suis secrètement tombé amoureux de ce personnage !
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