AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,68

sur 726 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Un jeune homme écrit à sa mère. Toute la beauté du geste réside dans le fait que la mère, illettrée, ne pourra jamais lire cette lettre. Ce qui autorise le narrateur à une incroyable sincérité, souvent très crue. le procédé n'est pas nouveau, on pense forcément à la formidable Lettre à mon père dans laquelle Franz Kafka dresse un réquisitoire bouleversant, analysant cette figure paternelle terrible qui l'a construit dans la peur et la culpabilité.

Un bref instant de splendeur est un roman d'apprentissage. Océan Vuong raconte comment il s'est construit, dans la solitude, sans père, sans frère ni soeur, aux côtés d'une mère aimante mal maltraitante et d'une grand-mère schizophrène, toutes deux hantées par la guerre du Vietnam qu'elles ont fui en passant par les camps philippins avant de migrer à Hartford dans le Connecticut. Sa solitude d'enfant puis de jeune adulte est exacerbée par son altérité ( petit, pauvre, asiatique, homosexuel ).

Océan Vuong écrit sa lettre dans une liberté absolue, faisant fi de toute logique chronologique. Son récit est fragmenté, maniant audacieusement ellipses et analepses, sculpté de fragments qui errent dans les cercles de la mémoire de façon spiralaire mais revenant toujours vers l'épicentre de la construction chaotique du moi. Ainsi les vignettes sur les mauvais traitements maternels s'allument puis s'éteignent rapidement comme des allumettes que l'on frotte.

Si le texte peut sembler un peu inégal et parfois même répétitif, il est traversé d'instants de pure magie littéraire. Océan Vuong est un grand poète, capable, par la seule force de ses mots, de créer des images impressionnistes touchées par la grâce. Dans cette mise à nu, les émotions sont toutes palpables et bouleversent, comme si nos sentiments nous faisaient penser. Il parvient à capturer des sensations fugaces presque irréelles, suspendues à un fil, à partir de quelque chose de très tangible.

J'ai relu de nombreux passages tellement ils m'ont éblouie par leur intensité : lorsqu'il raconte son travail dans les champs de maïs aux côtés de migrants latinos, ou son histoire d'amour et l'éveil à la sexualité avec Trevor, un jeune Redneck avec lequel il vit une relation à la fois tendue et passionnée mais qui ne peut survivre à l'âge adulte. Ou encore les superbes pages sur la mort de la grand-mère.

Je referme ce roman autofictionnel très singulier subjuguée par la vulnérabilité et la force qui se dégage de cet auteur. Envahie par la mélancolie née d'un paradoxe : le chagrin et la liberté d'Ocean Vuong grandissent à mesure qu'il écrit son chemin loin de ses ancêtres, lui qui a fait des études, lui qui s'est réfugié dans l'amour des livres, dans l'écriture de la poésie pour se construire, à mesure qu'il tend des fils entre des mondes qui ne se touchent plus.
Commenter  J’apprécie          16614
« Je n'essayais pas de faire une phrase – j'essayais de me libérer. Parce que la liberté, paraît-il, n'est rien d'autre que la distance entre le chasseur et sa proie. »

De l'horreur à la splendeur, il n'y a parfois qu'un mot.

Mettre en mots son histoire, pour le poète vietnamo-américain Ocean Vuong, c'est la transcender, se livrer pour mieux la mettre à distance et la revisiter, voire y découvrir une beauté insoupçonnée. Une histoire familiale dont l'arbre généalogique tordu enfonce ses racines à l'épicentre de la guerre du Vietnam. Une histoire personnelle torturée par l'intolérance crasse qui règne partout, rythmée par les coups de sa mère traumatisée qui l'aime pourtant, baignée des vapeurs toxiques du salon de manucure où celle-ci travaille, et du parfum du riz au jasmin préparé par sa grand-mère détraquée mais bienveillante qui l'appelle Little Dog.

« Comment qualifier l'animal qui, découvrant le chasseur, s'offre pour être mangé ? Un martyr ? Un faible ? Non, une bête qui acquiert un pouvoir rare, celui de dire stop. Oui, le point dans la phrase - c'est ça qui nous rend humains, Maman je te le jure. C'est ce qui nous permet de dire stop pour pouvoir continuer. »

Dans une déroutante spirale de pensées couchée sur le papier sous la forme d'une lettre à sa mère, l'auteur scrute ces fils de son histoire avec une sincérité parfois crue, sonde leurs entremêlements jusqu'à leurs noeuds les plus intimes. Sur ses blessures et ses différences si lourdes à porter, il pose des mots sublimes qui nous prennent de court par leur pouvoir d'évocation et leur justesse.

La magie de la littérature est à l'oeuvre ici comme rarement. Celle qui déployait des univers-refuges entiers dans l'imaginaire du jeune Little Dog. Celle qui, par le même pouvoir des mots, nous fait ressentir dans notre chair le déracinement, le poids des traumatismes et des non-dits familiaux, la façon dont la guerre fait irruption dans le quotidien des décennies et des milliers de kilomètres plus loin, les violences de race, de genre et de classe dans la société américaine, le piège des addictions ; mais aussi le pouvoir rédempteur de la soumission, de l'amour et de l'écriture. Celle qui révèle l'humanité et la grâce, même fragile et éphémère, là où on s'était accoutumé à ne plus attendre que le monstrueux. Celle qui voit le récit faire naturellement place à la poésie, réduisant sa langue à l'essentiel, lorsque les émotions prennent le dessus.

« Quel est le prix à payer si on passe toute sa vie côte à côte avec les gens qu'on aime sans pouvoir leur parler, sans pouvoir leur dire exactement ce qu'on ressent ? »

Alors certes, la mère à qui cette lettre est adressée ne pourra jamais la lire – elle a été enfermée toute petite par une attaque américaine au napalm sur son école dans la « capsule temporelle » de sa langue d'alors. La communion et l'amour filial qui transpirent dans les pages de ce roman sont d'autant plus bouleversants qu'Ocean Vuong désespère de pouvoir les communiquer.

Un bref instant de splendeur n'est pas une lecture facile (et je ne me suis pas facilité la tâche en décidant de le lire en anglais) : la construction est déstabilisante, le propos souvent terrible. Pourtant, cette courageuse mise à nu est libératrice aussi pour le lecteur puisque chacun de nous a sa part de « monstre ». J'en retiens aussi la beauté de plusieurs scènes – cette mère et cette grand-mère disloquées qui parviennent malgré tout à puiser des réserves de tendresse, la façon dont Little Dog prétend que l'inscription homophobe sur leur porte signifie « Joyeux Noël » pour préserver sa mère ou celle dont le grand-père tourne la page de son amour perdu.

Voici un roman violet, mélange de tristesse et de ravissement. Un texte troublant, qui ouvre les yeux et éblouit.
Commenter  J’apprécie          839

Little Dog, écrivain asiatique de même pas trente ans à quitté le Connecticut où il a été elevé pour New York. Il écrit un soir une longue missive à sa mère qui ne la lira jamais car elle est est analphabete.

Au fil des pages, se déroulent les fils de sa vie de sa famille exilée du Vietnam pour aller tenter sa chance aux USA, entre une grand mère shizophrène et une mère amiamnte mais violente et ses difficultés à s'intégrer dans une Amérique où les barrières- linguistiques, culturelles, sociales-sont nombreuses .

Ocean Vuong, revisite son histoire dans une forme de mise à nu poétique d'une grande beauté et d'une grande sincérité.


Ce jeune homme, qui découvre aussi peu à peu son homosexualité, verra l'american dream se fracasser contre son identité et tenter de se construire malgré tout pour montrer à ses proches, et à cette mère qu'il hait autant qu'il adule, qu'il faut l'accepter tel qu'il est.Mais comment en fait réussir à exister avec tant de fantômes quand on est pret à s'effondrer au détour d'une phrase ou d'un son enfoui depuis longtemps?

Entre le poème élégiaque ( l'auteur avait été d'abord été consacré par un recueil de poèmes, carton aux USA) et la chronique semi autobiobraphique, ce premier roman d'Ocean Vuong emporte tout sur son passage et démontre un amour pour la langue et une inventivité littéraire étonnante.

Virtuosité, inventivité des images, art de sculpter le texte en différents fragments rendant le texte toujours lisible et toujours étonnant : toutes les pages de ce récit aussi lyrique que sincère forcent l'admiration.


Lien : http://www.baz-art.org/archi..
Commenter  J’apprécie          330
Ocean Vuong nous livre ici un récit magnifique et très fort. La langue est splendide, les mots cherchés avec soin ont beaucoup de poids et sont très poétiques, et le choix d'une narration à la deuxième personne du singulier est original et donne un impact encore plus fort au texte.

J'ai tout aimé dans ce roman. L'auteur nous offre un récit très sensible sur divers sujets. le premier, et pas des moindres, est la difficulté à se confier à sa mère et à dialoguer avec elle, ce qui entraîne d'ailleurs cette longue lettre qu'elle ne lira jamais dans laquelle le narrateur se lance dans une introspection et se livre à coeur ouvert.
Ocean Vuong évoque également la dure vie des émigrés dans un pays dont ils ne connaissent que très peu la langue, les difficultés économiques mais aussi celles à s'intégrer dans un endroit qui, soyons francs, est raciste. La guerre est elle aussi bien présente, avec ces atrocités et ces incompréhensions.
Outre ces sujets, l'auteur nous parle aussi du ravage de la drogue, notamment sur ces jeunes devenus accros et livrés à eux-mêmes, des jeunes partis trop tôt.
Il est également question des sentiments du narrateur, de son homosexualité, d'une belle histoire d'amour, elle aussi finie trop tôt.
J'ai été profondément touchée par le malaise ressenti par ce petit garçon, perdu entre l'anglais et le vietnamien, errant d'une langue (et d'une culture) à une autre, mais se sentant finalement n'appartenant ni vraiment à l'une ni vraiment à l'autre.

Concernant la langue (mais ici la langue du roman) j'ai été subjuguée par sa grande beauté et la finesse des descriptions, ainsi que par la force des mots. Ce roman est magnifiquement écrit !
Je pense que cette lettre d'un jeune homme à sa mère va rester longtemps gravée en moi. Véritable cri du coeur qui ne peut absolument pas passer inaperçu.
Commenter  J’apprécie          322
Un bref instant de splendeur est la lettre qu'un fils adresse à sa mère qui ne la lire jamais. Analphabète, fille d'une vietnamienne et d'un soldat américain, Rose a émigré aux Etats-Unis avec son petit garçon âgé de 2 ans, son mari et sa mère. Little Dog, le héros de ce livre, sera le premier de la famille à savoir écrire et prendra la plume pour raconter un fragment de leur histoire.

Un bref instant de splendeur est à l'image de son magnifique titre : poétique, onirique, il rassemble des scènes parfois disparates qui nous font petit à petit entrer dans l'univers de cette famille américano-vietnamienne. Ocean Vuong a l'art de manier les mots pour nous faire partager ses sensations ou ses réflexions : chaque page recèle mille trésors, le style est vraiment magnifique et certains passages s'apparentent plus à de la poésie en prose. L'histoire qu'il nous raconte est également très émouvante : comment ne pas s'attacher à ce petit garçon qui se sent américain mais pas tout à fait comme les autres, qui sert de traducteur à sa mère qui parle à peine anglais, qui ne comprend pas pourquoi elle et sa grand mère peuvent être soudainement terrifiées par un bruit brusque ou des réminiscences de la guerre qu'elles ont vécu ? Avec beaucoup d'honnêteté et de franchise, l'auteur semble se mettre à nu et explore les questions complexes de la double culture, du rêve américain et de la vie si difficile qui attend les immigrants, des racines et de la manière dont notre histoire familiale nous construit.

Ce roman décrit aussi les premiers émois amoureux du narrateur qui comprend très vite qu'il aime les garçons. On souffre avec lui de l'impossibilité de vivre une relation au grand jour, de la honte qui semble s'attacher à chacune de ses actions, son homosexualités étant rendue quasi impossible à vivre à la fois par l'environnement ultra-conservateur de la campagne profonde américaine où il vit et par ses origines vietnamiennes. L'auteur procède à petites touches pour nous conter son histoire, c'est toujours très juste, jamais appuyé et d'une grande beauté. C'est un roman qui est aussi foncièrement dur, très émouvant, le narrateur ne s'apitoie jamais sur lui-même alors qu'on sent parfois la rage s'échapper de certaines pages.

Un bref instant de splendeur est un roman que j'ai déjà envie de relire en prenant mon temps tant sa construction est riche et tant le style de l'auteur est magnifique. Pour cette première incursion dans le roman après la publication de plusieurs recueils de poésie, Ocean Vuong signe une belle réussite : c'est un livre qui restera longtemps dans ma mémoire, à la fois pour l'émotion qu'il dégage et pour toutes les pistes de réflexion qu'il ouvre. Félicitations également à la traductrice qui a su parfaitement retranscrire la richesse et la beauté des phrases de l'auteur en français. Une très belle découverte que je vous recommande !

Je remercie au passage Babelio qui m'a proposé la lecture de ce livre et surtout une rencontre (virtuelle vu les circonstances !) avec l'auteur et la traductrice, un beau moment d'échanges qui a prolongé le plaisir de la lecture.
Commenter  J’apprécie          312
Il est très dur de parler de ce roman tellement il est puissant, fort et bouleversant. le narrateur écrit une lettre à sa mère. Une lettre magnifique, dure, crue et sans tabou. Il lui dévoile tout : ses peurs, sa honte, son amour.
Le narrateur, Little Dog, prend la plume pour donner des réponses à sa mère, pour se délivrer de certaines vérités et sublimer son histoire à travers son univers poétique. C'est dans l'écriture qu'il trouve son échappatoire.

Little Dog est d'origine vietnamienne, il vit aux États-unis dans un quartier pauvre multiculturel. Il habite avec sa grand-mère schizophrène, hantée par le terrible traumatisme de la guerre du Vietnam et sa mère, américaine et vietnamienne, violente, elle aussi traumatisée par son enfance et ce qu'elle a pu voir. Comment arrive-t-il à se faire une place dans ce microcosme ?

Sa mère est blanche de peau, sa grand-mère est jaune et lui aussi. On le prend pour un fils adopté. Sa mère est considérée comme blanche jusqu'à ce qu'elle ouvre la bouche et ne puisse balbutier que quelques mots d'anglais...Little Dog doit s'affranchir de sa couleur de peau, de son origine et manier l'anglais mieux qu'un natif. En parallèle, il doit vivre avec la violence de sa mère et les crises de panique et de paranoïa de sa grand-mère. Sa grande sensibilité dénote dans la cour de récréation et dans son quartier, lui attirant beaucoup d'ennui.

Au fil de sa lettre, Little Dog raconte l'histoire de sa famille, la découverte de son corps et de son identité sexuelle, son premier amour. Il dépeint une Amérique sombre sujette aux prescriptions médicales qui font sombrer de nombreuses personnes dans la drogue. Il parle des drogues qui circulent dans son milieu et qui font disparaître petit à petit les amis avec qui il a grandi.

A travers son écriture poignante et ses images sublimes, le narrateur livre sa vérité, son histoire à sa mère. Sa plume nous emporte et on ne peut lâcher ce livre tant il est beau.

Little Dog dit que dans sa famille on ne dit pas "je t'aime". Il injure sa mère, "t'es un monstre". Il devient lui-même un monstre. Sa grand-mère est un monstre. Mais à travers diverses actions, actes pour s'en sortir, ils se subliment et trouvent une porte de sortie vers la beauté, leur beauté. Alors même s'il traite sa mère de monstre, même si "je t'aime" n'est jamais prononcé, cet écrit est la plus belle lettre d'amour qu'un fils pouvait écrire à sa mère. Je suis là, tu es là. Peu importe ce que nous nous sommes faits. Nous sommes là.
Commenter  J’apprécie          260
Quelle belle découverte que la plume de ce jeune auteur et poète américano-vietnamien. Ce roman est bien plus qu'un « bref instant de splendeur » !

En effet, dans ce premier roman autobiographique, écrit d'une plume magnifique, l'auteur nous parle du traumatisme de la guerre du Vietnam sur trois générations. Récit d'une enfance entre deux femmes dont la vie reste marquée à jamais par la guerre, l'exil, le déracinement, le rejet par la société américaine. Née en 1988, Little Dog comme l'appelle sa grand-mère, est le fruit d'un double traumatisme subi par ses ainées, et qui fait de lui la victime d'un trauma passif.

C'est l'histoire, le témoignage d'un enfant qui arrive sur le sol états-unien à l'âge de deux ans, grandit en voulant être invisible, assimile rapidement qu'il n'est pas assez blanc pour être accepté par ses congénères et pas assez jaune pour être totalement intégrée à sa communauté d'origine. Métis, fils d'un soldat américain et d'une femme vietnamienne, il évolue entre une grand-mère schizophrène et une mère éreintée par la solitude et par une vie d'un labeur mal payé dans un bar à ongles, une mère brutale et colérique.

Ce récit prend la forme d'une lettre adressée à sa mère. Lettre plusieurs fois recommencée. Une déclaration d'amour et de haine, de tendresse et de souffrance. Dans cette ville du Connecticut, dans ses quartiers défavorisés, Little dog va se construire sur les bribes d'un passé qui n'est pas le sien, vivre un premier amour violent et intense, trouver l'énergie et la force de s'extraire de cet environnement pour échapper à la violence, à la drogue, au racisme et à l'homophobie, devenir un universitaire, un poète et un écrivain.

Cette lettre, il sait que sa mère ne la lira jamais puisqu'elle est analphabète. Et cela ajoute à la beauté du style de ce roman bouleversant, construit non pas sur une chronologie mais sur une progression émotionnelle et dramatique qui multiplie les voyages dans le temps sans que jamais cette absence de linéarité ne soit un obstacle à la lecture. L'écriture, parfois crue, toujours sensible, alterne les rythmes, bouleverse.

Récit d'une enfance, adolescence et jeunesse, entre rêve américain et cauchemar de déraciné, « Un bref instant de splendeur » est un roman bouleversant et peut-être la naissance d'un grand auteur. J'ai très envie de découvrir ses poèmes et guetterai son second roman.
Commenter  J’apprécie          192
Ce récit semi-autobiographique est magnifique et bouleversant.

L'écriture de cet auteur poète américano-vietnamien m'a profondément touché : recherchée, pudique, crue, sensible. En cours de lecture, j'ai souvent relu des passages posément, pour apprécier davantage. Avec l'envie de recopier des lignes entières pour garder leur beauté et l'émotion qu'elles me procuraient instantanément.

Sous forme de lettre adressée à sa mère, il revient sur son enfance, la recherche de ses origines et la découverte de lui-même.

Une lettre salvatrice d'une rare intensité. Une confidence émouvante et sincère.

Une lettre que sa mère ne lira jamais car écrite dans une langue qu'elle ne comprendra pas. L'anglais qui la sépare du monde, de la société. L'anglais comme barrage entre eux deux. L'anglais qu'il apprend à l'école et qui va lui permettre de comprendre sa profonde différence, sociale et identitaire.

Son enfance difficile. Avec une grand-mère schizophrène, traumatisée par la guerre du Vietnam et ses bombes. Avec une mère, elle aussi victime d'un syndrome post-traumatique. A la fois aimante et violente qui n'hésite pas à le battre régulièrement jusqu'à ses treize ans.

Ils quittent le Vietnam pour la "terre promise". Il comprend très jeune que leur couleur de peau les marginalise et que le rêve américain ne leur est pas destiné.

Souvent sans argent, sa mère réussit malgré tout à lui offrir son premier vélo. Mais il réalise que sa couleur rose (parce que ce vélo est le moins cher dans le magasin) sera signe de différence et d'hostilité de la part des autres enfants du quartier qui à leur tour le brutalisent et l'excluent.

Sa mère passe des journée harassantes dans une boutique de manucure. "Sorry", le rare mot en anglais qu'elle connaît et qu'elle répète à longueur de journée aux clients pour souligner sa soumission, espérer de la compassion et des pourboires.

Cette soumission, il va à son tour la connaître adolescent lorsqu'il commence à travailler dans un champ de tabac. Cet été où tout bascule pour lui, où il découvre aussi le désir et son homosexualité.

Ce garçon blanc, américain, si différent de lui avec qui il expérimente les drogues, contracte ses premier secrets. Il partage avec lui son corps et sa soumission. Mais celle-ci n'est qu'apparente. C'est pour lui le moyen de reprendre le contrôle de sa vie. A 17 ans, il commence à se définir sexuellement et socialement. Son désir de devenir écrivain naît.

Ocean Vuong décortique admirablement l'enfance, ses histoires cachées, les souvenirs qu'il reconstitue adulte. Il analyse finement d'où il vient et le processus identitaire. le tout dans une langue poétique et pleine d'émotions contrastées.

Un roman puissant dans l'écriture, brut, profond et délicat. Bref j'ai adoré !
Lien : https://fromtheavenue.blogsp..
Commenter  J’apprécie          170
Voici un récit semi-autobiographique.
L'histoire est racontée par Little boy, garçon vietnamien élevé aux États-Unis par sa mère et sa grand-mère vietnamiennes qui souffrent de chocs post traumatique.
Le roman prend la forme d'une lettre à une mère analphabète, traumatisée la guerre du Vietnam et souvent abusive.
Il écrit en sachant que les chances qu'elle lise ou encore moins qu'elle comprenne sa lettre sont minces. le narrateur peut donc se laisser aller à écrire, à détailler sa relation avec elle, sa grand-mère, son quasi-grand-père, et son premier amour pour un jeune homme.
La narration n'est pas linéaire, on passe d'une époque à une autre.
Il s'agit également d'être différent sur le plan racial, culturel et sexuel dans cette Amérique d'aujourd'hui.
C'est magnifiquement écrit, le langage est intime mais presque distancié. Les situations peintes sont à la fois dures, tendres et complexes.
L'écriture est mûre pour un jeune écrivain. Sa capacité à mettre en mots des sentiments contraires et ambigus est étonnante.
Sans jamais rentrer dans les détails, le lecteur sait que les adultes souffrent, qu'ils ont un sentiment d'abandon, qu'ils sont victimes de maladies mentales et que l'enfant puis jeune homme doit se construire malgré ça.
Il y a beaucoup d'émotions brutes presque dérangeantes dans ce livre, dans cette confession ; j'ai parfois eu du mal à respirer à la lecture de certaines situations.
Il y a néanmoins quelques longueurs sur la fin.
Il est aimé mais il n'est pas protégé ; c'est néanmoins une lettre d'amour à une mère
Un roman puissant

Lu dans le cadre du Grand prix des lectrices Elle
Commenter  J’apprécie          170
Poète, Ocean Vuong dit son premier amour et son second – celui qui le lie à sa mère puis celui qui lui fait découvrir le monde. Par éclats éclatants, il raconte avec une finesse grandiose mais parfois crue ses jeunes années, avance d'un pas puis recule de deux : il est celui qu'il est parce que sa grand-mère et parce que sa mère, parce qu'elles sont Vietnamiennes et que ce pays pulse encore en lui (plus d'infos : https://pamolico.wordpress.com/2021/02/11/un-bref-instant-de-splendeur-ocean-vuong/)
Lien : https://pamolico.wordpress.c..
Commenter  J’apprécie          130




Lecteurs (1953) Voir plus



Quiz Voir plus

Les écrivains et le suicide

En 1941, cette immense écrivaine, pensant devenir folle, va se jeter dans une rivière les poches pleine de pierres. Avant de mourir, elle écrit à son mari une lettre où elle dit prendre la meilleure décision qui soit.

Virginia Woolf
Marguerite Duras
Sylvia Plath
Victoria Ocampo

8 questions
1725 lecteurs ont répondu
Thèmes : suicide , biographie , littératureCréer un quiz sur ce livre

{* *}