Ai-je jamais construit une Machine, ou un modèle de Machine à voyager dans le Temps ? Ou bien tout cela n'est-il qu'un rêve ! On dit que la vie est un rêve, un pauvre rêve, précieux parfois, mais je puis en subir un autre qui ne s'accorde pas. C’est de la folie. Et d'où m'est venu ce rêve ? Il faut que j'aille voir la Machine… si vraiment il y en a une ! »
Si seulement j'avais eu un compagnon ! Mais j'étais si horriblement seul que l'idée de descendre dans l'obscurité du puits m'épouvantait.
Je respirai, serrai les dents, empoignai des deux mains le levier de mise en train et partis d’un seul coup. Le laboratoire devint brumeux, puis sombre. La servante entra, et se dirigea, sans paraître me voir, vers la porte donnant sur le jardin. Je suppose qu’il lui fallut une minute ou deux pour traverser la pièce, mais il me sembla qu’elle était lancée d’une porte à l’autre comme une fusée. J’appuyai sur le levier jusqu’à sa position extrême. La nuit vint comme on éteint une lampe ; et un moment après, demain était là. Le laboratoire devint confus et brumeux, et à chaque moment de plus en plus confus. Demain soir arriva tout obscur, puis le jour encore, puis une nuit, puis des jours et des nuits de plus en plus précipités ! Un murmure vertigineux emplissait mes oreilles, une mystérieuse confusion descendait sur mon esprit.
Les paysages, les lieux lieux évoqués sont ceux d'une nouvelle genèse,l'éden des Éloïs.
Que faire si la cruauté était devenue une passion commune? Que faire, si dans cet intervalle, la race avait perdue son humanité, et s'était développé dans la malfaisance, la haine et une volonté farouche de puissance?
La nature ne fait jamais appel à l'intelligence que si l'habitude et l'instinct sont insuffisants. Il n'y a pas d'intelligence là où il n'y a ni changement, ni besoin de changement.
Le fait est que notre ami était un de ces hommes qui sont trop intelligents, trop habiles ou trop adroits pour qu'on les croie ; on avait avec lui l'impression qu'on ne le voyait jamais en entier ; on suspectait toujours quelque subtile réserve, quelque ingéniosité en embuscade, derrière sa lucide franchise.
Un animal en harmonie parfaite avec son milieu est un pur mécanisme. La nature ne fait jamais appel à l'intelligence que si l'habitude et l'instinct sont insuffisants. Il n'y a pas d'intelligence là où il n'y a ni changement, ni besoin de changements. Seuls ont part à l'intelligence les animaux qui ont à affronter une grande variété de besoins et de dangers.
Je cherchai alors à me protéger contre l'horreur qui m'envahissait en envisageant la chose comme une punition rigoureuse de l'égoïsme humain. L'homme s'était contenté de vivre dans le bien-être et les délices, aux dépens du labeur d'autres hommes ; il avait eu la Nécessité comme mot d'ordre et excuse et, dans la plénitude des âges, la Nécessité s'était retournée contre lui. J'essayai même une sorte de mépris à la Carlyle pour cette misérable aristocratie en décadence. Mais cette attitude d'esprit était impossible. Quelque grand qu'ait été leur avilissement intellectuel, les Éloïs avaient trop gardé de la forme humaine pour ne pas avoir droit à ma sympathie et me faire partager de force leur dégradation et leur crainte.
C'est une loi naturelle trop négligée : la versatilité
intellectuelle est le revers de la disparition du danger et de
l'inquiétude. Un animal en harmonie parfaite avec son milieu est un
pur mécanisme. La nature ne fait jamais appel à l'intelligence que
si l'habitude et l'instinct sont insuffisants. Il n'y a pas
d'intelligence là où il n'y a ni changement, ni besoin de
changement. Seuls ont part à l'intelligence les animaux qui ont à
affronter une grande variété de besoins et de dangers.